Ma’an News- le Ministère Palestinien des Affaires des Prisonniers a publié le texte d’une lettre adressée au ministre Issa qaraqe par le prisonnier Misbah Shuqair, 48 ans, de la région de Salfeet, marié, deux enfants, il est condamné à perpétuité et emprisonné depuis le 14 juillet 1986.
« Je vous écris cette lettre après la libération d’une partie des détenus. Pour un certain nombre d’entre eux, ils étaient mes compagnons de chambre et de section, ils m’ont accompagné durant ces longues années derrière les barreaux.
Ils sont sortis vers la vie, j’étais heureux pour eux et pour leur liberté mais un sentiment mystérieux m’a envahi entre la joie pour mes collègues et la tristesse et la douleur de mon sort et le sort de tous ceux qui sont restés comme moi à l’intérieur des prisons, oppressés par l’obscurité et meurtris par l’injustice de nos geôliers qui ont volé impitoyablement notre vie et notre jeunesse à la fois.
Je me regarde, je vieillis, les mois et les années passent, je sombre sous les mesures d’une administration colonisatrice qui détruit notre humanité avec ses lois et son racisme, elle exerce tous les moyens de frustration pour nous tuer psychologiquement et se comporte avec nous comme si nous n’étions pas des humains.
Je regarde ces pages de notre histoire qui passe et nous restons derrière elle, tous nos espoirs sont vains, avant les accords d’Oslo nous nous attendions, nous les détenus à ce que ses accords de paix nous fassent libérer et nous sauver de l’emprise de nos geôliers tortionnaires, nous les résistants qui avons combattu l’occupant nous ne serons pas oubliés ou laissés derrière des murs, mais les accords d’Oslo sont passés, l’Autorité a été établie, les accords d’échange de prisonniers sont terminés et nous sommes restés derrière les portes fermées.
Je vous écris, Monsieur le Ministre, pour transmettre notre message, nous les vétérans, devant le monde afin que cesse cette exécution à notre encontre et que notre cause soit prise en compte dans toutes négociations si négociation il y a et dans toute solution politiques car nous avons porté le projet national, son esprit, ses sacrifices, nous méritons toute votre attention.
Je ne peux pas vous décrire la situation psychologique des vétérans prisonniers après les derniers échanges en date, c’est la folie humaine que d’estime que nous avons été oubliés et laissés à notre sort, on ne dort pas la nuit et on ne savourent pas le jour, le jour et la nuit sont identiques devant l’ironie des bourreaux, la salinité des sentiments et l’ambiguïté de l’avenir.
L’homme et la terre sont inséparables, la valeur de la terre est la valeur de l’homme sur cette terre, l’occupant israélien cherche à briser nos rêves, les rêves de liberté, de souveraineté et de dignité et nous, prisonniers, sommes une cible facile pour eux, ils nous isolent pour nous torturer et nous faire sentir que notre lutte est vaine et que nos rêves sont faux, ils détruisent nos familles et l’esprit de nos enfants pour leurs extirper toute idée de résistance .
Nous ne nous sommes pas affaiblis, vingt-sept ans ont passé et nous ne nous sommes pas soumis et nous n’avons pas cédé à nos geôliers, nous avons gardé la tête haute, nous sommes fiers de notre peuple et fiers de notre résistance, nous ne permettrons à personne de nous diminuer ou de nous humilier.
Nous sommes au dessus de cela et nous le serions encore plus à chaque fois que nous sentirons que quelqu’un se soucie de nous, ne nous oublie pas et nous considère comme une partie intégrante du projet de libération nationale, nous défend, préserve nos noms, parle de nous tout le temps, dans toutes les instances et ne nous laisse pas des otages entres les mains de l’état de l’occupation.
Nous espérons que les expériences précédentes servent de leçons, que l’étape qui suit porte nos noms comme un grand titre digne dans tout règlement ou paix ou coexistence, rappelez-vous de nous toujours pour qu’on puisse franchir cette étape, en vie, de la détention à la liberté ».