Paris, le 11 février 2013
M. Laurent Fabius
Ministre des Affaires étrangères
37, quai d’Orsay
75007 Paris
Vous n’avez pas répondu à cette question et indiqué, une fois de plus, votre volonté de « reprise des négociations ». Vous avez également indiqué que vous soutiendrez les initiatives américaines prises lors de la prochaine visite du Président Obama sur place, initiatives dont on ignore tout du contenu par ailleurs.
Dans un courrier récent que vous m’avez adressé en réponse à cette même question que je vous posais de la reconnaissance par la France de la Palestine, vous aviez déjà indiqué votre préférence pour cette « reprise des négociations » permettant, selon vous, la création sur le terrain de l’Etat de Palestine et ceci en 2013 !
Comment croire que les dirigeants israéliens en viennent à accepter l’existence de cet Etat palestinien dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, alors qu’ils ont manifesté – et je parle aussi des dirigeants qui seront mis en place après les élections législatives israéliennes – leur totale hostilité à cette perspective et ont pris des mesures unilatérales sur le terrain pour empêcher cette existence de pareil Etat palestinien ?
La France, il faut le rappeler, a reconnu Israël le 24 janvier 1949, soit près de 4 mois avant l’admission de ce pays à l’ONU qui a eu lieu le 11 mai 1949 ! Et la France ne reconnaîtrait pas la Palestine 65 ans plus tard alors que cet Etat vient d’être admis comme Etat non membre à l’ONU ?
Cette attitude est à mettre en relation avec un autre passage de cette émission où vous avez parlé de l’Iran et de sa volonté de se doter de l’arme nucléaire. Sur ce cas, vous avez indiqué que la France observait une « double approche, c’est-à-dire les sanctions et les négociations » afin que les dirigeants iraniens changent de position. Vous avez même précisé que les « sanctions sont efficaces » signalant que depuis leur mise en œuvre l’Iran avait déjà perdu à ce titre 40 milliards d’euros.
Le parallélisme n’est pas au bout de ces deux logiques énoncées par vous hier soir concernant deux situations qui ont à voir l’une avec l’autre.
Dans un cas ce sont les « sanctions-négociations », dans l’autre c’est la seule « négociation » qui est envisagée laquelle à d’ailleurs la préférence, et pour cause, des dirigeants israéliens : cela fait plus de 20 ans qu’il y a des « négociations » et tout s’est dégradé sérieusement sur place côté palestinien.
Si l’idée devait exister que la question israélo-palestinienne n’est plus aujourd’hui centrale, ce serait une grave erreur d’appréciation lourde de conséquences.
Notre pays ne peut être en retard ni en décalé sur les exigences stratégiques conformes à ses valeurs et à ses intérêts justement compris.
Vous ne pourrez pas repousser très longtemps, sauf à provoquer de lourds dommages politiques, la reconnaissance par la France de la Palestine.
Logique et efficace cette reconnaissance attendue serait un fort signal lancé par notre par la France. Et ce serait un acte qui le ferait renouer avec ce que notre pays a fait de meilleur dans le domaine international. Ce serait affirmer solennellement l’universalité des valeurs de liberté et de justice portées par la patrie des droits de l’homme.
C’est donc, de manière insistante vous l’aurez compris, que je reviens vers vous porteur de ce message que je souhaite vous faire partager : reconnaissez la Palestine ! Donnez une chance à la paix au Proche-Orient ! La Palestine ce n’est pas le problème mais la solution !
Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de mon respect.
Jean-Claude Lefort
Député honoraire
Président de l’AFPS