Cher P’tit Libé,
Nous sommes un groupe d’enseignants et de militants qui s’intéresse à la façon dont la question du « conflit » Israël Palestine est présenté aux jeunes de notre pays. Nous avons ainsi organisé un colloque sur le contenu des manuels scolaires qui a donné lieu à publication : Israël-Palestine Le conflit dans les manuels scolaires Ed. Syllepse 2014. Nous regardons également comment cette question est abordée dans la presse en direction des jeunes.
Nous savons que présenter l’actualité politique internationale de façon compréhensible pour des enfants de 7 à 12 ans est une gageure, et nous apprécions les efforts que vous avez faits pour présenter le conflit Israël Palestine dans votre dossier du 15 novembre.
Ainsi, l’illégalité du Mur, de l’occupation, de la colonisation, de l’annexion de Jérusalem Est, des colonies, du point de vue du droit international sont bien mentionnées.
Toutefois, parce que l’enfer est pavé de bonnes intentions, et parce que le Diable se cache dans les détails, nous nous permettons de faire quelques remarques sur le dossier du 15 novembre, sans reprendre toutes les formules qui peuvent faire débat.
– déjà, dans le chapeau, en datant le problème de 69 ans, le choix est de faire un raccourci discutable : la déclaration Balfour a un siècle et le projet de la création d’un État juif sur un territoire déjà occupé n’est pas seulement la conséquence de la seconde guerre mondiale.
– la fiche 3 contient plusieurs approximations qui sont dommageables pour la compréhension, notamment
* dire que LES survivants voulaient quitter l’Europe : or beaucoup de juifs ont choisi de rester en Europe quand ils le pouvaient ; ce sont souvent les pays occidentaux qui ont poussé les survivants vers la Palestine
Il est écrit toujours dans la fiche 3 : D’autres Palestiniens sont devenus Israéliens et vivent en Israël, notamment dans des villes comme Nazareth. Ils sont 20% de la population d’Israël et se définissent de plus en plus comme "Palestiniens d’Israël" . Il est nécessaire d’ajouter qu’ à la suite des vagues d’expulsions de 1947et de 1967, plus de la moitié de la population palestinienne est à l’étranger : réfugiés et descendants de réfugiés.
– d’ailleurs, la fiche 4 signale ce départ vers le Liban et la Jordanie, mais le présente comme une fuite, ce que les historiens ont démenti, et les « territoires palestiniens » sont jusqu’en 1967 administrés par l’Égypte et la Jordanie
Le fait que le retrait de la bande de Gaza en 2005 s’accompagne d’un renforcement du blocus n’est pas signalé.
Détails trop compliqués pour les enfants ? Nous ne le pensons pas. Et puis, comme vous le savez ces dossiers sont aussi lus par leurs parents, qu’il ne faut pas induire en erreur.
Nous supposons qu’il vous sera difficile de diffuser un dossier corrigé. Pourtant, si dans les archives de votre publication les erreurs les plus manifestes étaient rectifiées, cela serait à notre avis une preuve de votre respect pour vos lecteurs.
Bon courage dans la poursuite de cette expérience de vulgarisation.