Monsieur Georges Plassat,
Président Directeur Général de Carrefour
33, av. Emile Zola
92649 Boulogne-Billancourt cedex
Paris, le 5 décembre 2016
Objet : vente de produits des colonies israéliennes implantées en Palestine occupée
Monsieur le Président Directeur Général,
Le ministère de l’Économie et des Finances a publié le 24 novembre 2016 « un avis aux opérateurs économiques relatif à l’indication de l’origine des marchandises issues des territoires occupés par Israël depuis juin 1967 » [1] . Cet avis reprend celui que la Commission Européenne a publié le 11 novembre 2015 sur le même sujet http://eur-lex.europa.eu/legal-cont... . Il précise notamment que les produits alimentaires originaires de colonies israéliennes en Cisjordanie doivent être étiquetés avec la mention « colonie israélienne ».
Votre enseigne vend des produits étiquetés « Israël », fruits et légumes en particulier. Comme ceci a été mis en évidence à de nombreuses reprises (notamment par des procès-verbaux de DDPP, constats d’huissier, procédures judiciaires, rapports d’organismes israéliens [2] ), une part conséquente des produits étiquetés « Israël » qui pénètre sur le marché français est en réalité produite dans les territoires palestiniens occupés.
Lorsque nous avons rencontré le 3 novembre dernier, en compagnie de la FIDH, votre direction RSE, celle ci s’est engagée à effectuer un travail de vérification de l’origine réelle des produits vendus par Carrefour et étiquetés comme provenant d’Israël en s’appuyant sur les factures des fournisseurs et remontant si nécessaire jusqu’aux importateurs. Le but est que Carrefour se mette en conformité avec la réglementation européenne.
L’étiquetage des produits des colonies israéliennes comme tels doit en effet permettre aux consommateurs de pouvoir choisir en toute connaissance de cause et de ne pas se rendre complices de la colonisation de la Palestine, en n’achetant pas les produits qui en sont issus.
Mais continuer dans ces conditions à vendre des produits des colonies israéliennes serait totalement contradictoire avec la charte éthique et sociale que vous vous êtes engagé à appliquer. Rappelons ici les deux premiers principes énoncés dans cette charte :
• « Principe No. 1 : Les entreprises sont invitées à promouvoir et à respecter la protection du droit international relatif aux droits de l’Homme dans leur sphère d’influence.
• Principe No. 2 : à veiller à ce que leurs propres sociétés ne se rendent pas complices de violations des droits de l’Homme. »
Poursuivre la commercialisation de produits dont il sera assuré qu’ils sont issus de colonies israéliennes, c’est poursuivre en toute connaissance de cause le soutien à un système économique et institutionnel contraire aux droits de l’homme, tant du point de vue du droit de propriété, de la liberté de circulation que plus généralement de celui du droit des peuples à disposer d’eux–mêmes. C’est donc renier votre propre charte éthique.
En Grande-Bretagne, le gouvernement avait recommandé en 2009 un étiquetage spécifique des produits agricoles issus des colonies israéliennes. Suite à cette recommandation, les principales chaînes de distribution dans le pays ont décidé progressivement de cesser l’importation de tous les produits des colonies israéliennes.
Carrefour se doit de saisir l’opportunité de la publication de l’avis du ministère de l’économie pour prendre la même décision. Votre groupe s’honorerait en étant la première chaîne de distribution de notre pays à suivre l’exemple britannique. C’est pourquoi nous réitérons la demande que nous avons faite dans nos précédents courriers d’arrêter la vente de produits issus des colonies israéliennes implantées en Palestine occupée.
Dans l’attente de votre réponse, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président Directeur Général, l’expression de nos respectueuses salutations.
Taoufiq Tahani
président de l’Association France Palestine Solidarité