Des manifestations sont attendues dans toute la bande de Gaza, accusant le Hamas d’être responsable des prix élevés et de l’augmentation des taux de chômage.
"Nous voulons vivre" est un mouvement populaire qui a commencé en mars 2019 par des appels sur les médias sociaux à des manifestations pacifiques en raison des conditions économiques difficiles et des taux de chômage élevés à Gaza. Les manifestations, qui ont évolué en grèves, en désobéissance civile de masse et en camping dans les rues de Gaza, ont été lourdement réprimées par les forces de sécurité du Hamas, qui ont arrêté des dizaines de manifestants.
Après la mort par noyade de migrants gazaouis au large des côtes grecques le 6 novembre, le mouvement "Nous voulons vivre" a refait surface pour réclamer une vie décente pour les Gazaouis.
Dans une déclaration du 21 novembre, le mouvement a annoncé qu’il continuerait à protester contre le coût élevé de la vie et à exiger des droits économiques et sociaux à Gaza. "L’augmentation des prix vide nos poches au milieu des taxes et des péages illégaux et inhumains que le gouvernement de facto prélève par la force sur les commerçants, les fournisseurs, les entreprises et les hommes d’affaires de la bande de Gaza", peut-on lire.
Le hashtag "Nous voulons vivre" est devenu viral sur les médias sociaux, des dizaines d’utilisateurs ayant exprimé leur colère face aux conditions de vie à Gaza.
L’utilisateur de Twitter "Oncle Hassan" a tweeté le 25 novembre : "Nous, les Gazaouis, voulons un pays ouvert comme autrefois pour pouvoir travailler en Cisjordanie et en Israël. Nos jeunes sont devenus de la nourriture pour poissons pendant leur émigration de Gaza à la recherche d’une vie décente."
Le 24 novembre, le compte Twitter "Nous voulons vivre" a publié une vidéo d’un jeune homme de Gaza appelant les dirigeants du Hamas à offrir une vie décente et un foyer à sa famille sans abri.
"Trop, c’est trop ! Pourquoi mes enfants devraient-ils souffrir d’être sans abri ? Ils seraient mieux morts", a-t-il déclaré.
Le coordinateur de la manifestation, Azmi al-Shuyukhi, a déclaré à Al-Monitor : "Nous disons aux seigneurs des palais et des hôtels et aux sultans au pouvoir à Gaza que la révolution des affamés de Gaza peut exploser à tout moment, comme un volcan."
Il a précisé qu’aucune date n’a encore été fixée pour les manifestations, "mais ce sera très bientôt". Il a poursuivi : "Cette révolution se fera contre le gouvernement de facto de Gaza et en rejet de ses impôts considérables et du manque d’opportunités d’emploi. Ce gouvernement a affamé, humilié et privé les gens de leur capacité à subvenir aux besoins de leurs enfants."
Il a expliqué que les taxes ont fait augmenter les prix des produits de base. Le prix d’un kilo de lentilles dans la bande de Gaza est passé de quatre shekels (1,20 $) à sept shekels (2,20 $) et un sac de 50 kilos de sucre est passé de 100 shekels (31,50 $) à 130 shekels (41 $). Les prix des légumineuses, du riz, de l’huile de cuisson, de la farine, des œufs, du fromage et du café ont tous augmenté.
Shuyukhi a souligné la nécessité de "se débarrasser de toutes les entraves que le Hamas met au travail du gouvernement palestinien à Ramallah, dirigé par le Premier ministre Mohammad Shtayyeh, pour qu’il puisse exercer librement son rôle gouvernemental dans la bande de Gaza, comme il en a le mandat."
Lors de la visite d’une délégation de 20 ambassadeurs et représentants de pays de l’UE dans la bande de Gaza le 25 novembre, le mouvement a demandé à la délégation d’intervenir pour réduire les taxes à Gaza.
Shuyukhi a déclaré dans une déclaration du 25 novembre adressée aux représentants de l’Union européenne, "Les citoyens de la bande de Gaza espèrent que la visite de la délégation [produira des mesures pour] sauver notre économie nationale effondrée et soulager la souffrance des citoyens", ajoutant que le taux de pauvreté à Gaza a dépassé 80% et que le chômage a atteint 60%.
La déclaration attribue cette situation désastreuse à la division palestinienne depuis 2007 "et à l’interférence et l’obstruction du gouvernement de facto dans le travail du gouvernement palestinien à Ramallah pour mettre en œuvre son plein rôle officiel et gouvernemental à Gaza."
Le militant des droits de l’homme Moumen ALnatour a déclaré à Al-Monitor que le mouvement "Nous voulons vivre" exprime les préoccupations de toute une population de Gaza qui a été forcée de vivre sous un régime politique indifférent aux préoccupations et aux souffrances de la population.
Natour, qui a été arrêté à plusieurs reprises par les forces de sécurité du Hamas alors qu’il surveillait les violations des droits de l’homme à Gaza, a souligné que les appels répétés à de nouvelles manifestations contre les politiques du Hamas à Gaza étaient le résultat naturel des pressions qui s’y exercent. "Ce qui est également attendu, c’est que les services de sécurité du Hamas répondent par la répression, la violence, les arrestations et les accusations de collaboration avec Israël et de commettre des actes de trahison nationale."
Il a expliqué que les demandes du mouvement de réduire les impôts et d’offrir des opportunités d’emploi aux jeunes sont raisonnables et justes.
Une source de sécurité du Hamas a déclaré à Al-Monitor, sous couvert d’anonymat, que les forces de sécurité du mouvement se préparent à faire face à l’explosion des protestations populaires.
"Ces protestations sont menées par des parties étrangères et ces parties cherchent à déstabiliser la bande de Gaza. Nous avons contrecarré plusieurs appels à de telles manifestations ces derniers jours", a déclaré la source.
"Ces parties profitent de tout événement local ou international pour monter les citoyens contre le Hamas, comme les noyades d’immigrés palestiniens et la hausse mondiale des prix des denrées alimentaires, car elles font croire aux citoyens que le Hamas en est la cause", a-t-il ajouté.
La source a souligné que l’appareil de sécurité du mouvement "est capable de contrôler avec un minimum de dégâts tout événement ou manifestation qui pourrait émerger sur le terrain."
Le 10 novembre, le site Web du Hamas Palestine Online a publié un rapport affirmant que le mouvement "Nous voulons vivre" a été créé par le Shin Bet pour inciter les citoyens de la bande de Gaza à s’opposer à la résistance palestinienne.
Traduction : AFPS