Photo : Mosquée de Al-Aqsa en 2013 (Wikipedia)
La Ligue arabe s’apprête à tenir une réunion d’urgence pour discuter de l’attaque de la police israélienne contre la mosquée d’Al-Aqsa à Jérusalem, qui a fait au moins 12 blessés palestiniens, alors que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a déclaré qu’il s’efforçait de "maintenir le statu quo" sur le lieu saint.
La réunion de la Ligue arabe a été convoquée par la Jordanie, l’Égypte et des responsables palestiniens, les tensions restant vives à Jérusalem depuis que la police israélienne a attaqué des fidèles dans l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa dans la nuit de mercredi à jeudi, pendant le mois sacré du ramadan.
Les raids se sont poursuivis dans la matinée, lorsque les forces israéliennes ont de nouveau été vues en train d’agresser et de pousser les Palestiniens hors de l’enceinte et de les empêcher de prier, avant que les Israéliens ne soient autorisés à entrer sous la protection de la police.
La Ligue des droits de l’homme avait déjà condamné l’attaque, le secrétaire général Ahmed Aboul Gheit déclarant dans un communiqué : "Les approches extrémistes qui contrôlent la politique du gouvernement israélien conduiront à des confrontations généralisées avec les Palestiniens s’il n’y est pas mis un terme".
Selon des responsables palestiniens ,au moins 400 Palestiniens ont été arrêtés mercredi et sont toujours détenus par Israël. Ils sont détenus dans un poste de police à Atarot, dans la partie occupée de Jérusalem-Est.
Des témoins palestiniens ont déclaré que les forces israéliennes avaient eu recours à une force excessive, notamment à des grenades assourdissantes et à des gaz lacrymogènes - qui ont fait suffoquer les fidèles- ainsi qu’à des coups de matraque et de fusil.
"Nous faisions l’itikaf [retraite spirituelle musulmane] à Al-Aqsa parce que c’est le Ramadan", a déclaré Bakr Owais, un étudiant de 24 ans qui a été arrêté. "L’armée a brisé les fenêtres supérieures de la mosquée et a commencé à nous lancer des grenades assourdissantes [...] Ils nous ont fait nous allonger sur le sol, nous ont menottés un par un et nous ont tous fait sortir. Ils n’ont cessé de nous insulter pendant tout ce temps. C’était extrêmement barbare.
Le Croissant-Rouge palestinien a indiqué que trois des blessés avaient été transférés à l’hôpital. Il a également déclaré dans un communiqué que les forces israéliennes avaient empêché ses médecins d’atteindre Al Aqsa.
"J’étais assise sur une chaise et je récitais [le Coran]", a déclaré une femme âgée à l’agence de presse Reuters - alors qu’elle était assise à l’extérieur de la mosquée et qu’elle avait du mal à reprendre son souffle. "Ils ont lancé des grenades assourdissantes, l’une d’entre elles m’a touchée à la poitrine", a-t-elle ajouté en se mettant à pleurer.
La police israélienne a déclaré dans un communiqué qu’elle avait été contrainte de pénétrer dans l’enceinte de la mosquée après que des "agitateurs masqués" s’y soient enfermés avec des feux d’artifice, des bâtons et des pierres.
"Lorsque la police est entrée, elle a été la cible de jets de pierres et de feux d’artifice tirés depuis l’intérieur de la mosquée par un groupe important d’agitateurs", indique le communiqué, qui précise qu’un policier a été blessé à la jambe.
Dans un communiqué publié plus tard dans la journée de mercredi, M. Netanyahu a déclaré qu’il essayait de calmer la situation à Al-Aqsa.
"Israël s’est engagé à maintenir la liberté de culte, la liberté d’accès à toutes les religions et le statu quo, et ne permettra pas à des extrémistes violents de changer cela", a déclaré M. Netanyahu.
La tension est déjà vive depuis des mois à Jérusalem-Est et en Cisjordanie occupées. Il y a des craintes de nouvelles violences à l’approche d’importantes fêtes religieuses - le mois de jeûne musulman du ramadan et la Pâque juive.
Natasha Ghoneim, d’Al Jazeera, a déclaré que les attaques étaient attendues car des appels ont été lancés sur les réseaux sociaux pour exhorter les Palestiniens à se rendre à Al-Aqsa et à la "défendre contre les occupants".
Un certain nombre de juifs devraient se rendre dans l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa pendant les heures de visite habituelles des non-musulmans.
"Les visiteurs habituels sont des nationalistes à l’idéologie très conservatrice et, bien que les juifs ne soient pas autorisés à prier dans l’enceinte, leur simple présence est un sujet sensible", a déclaré M. Ghoneim depuis Jérusalem-Est occupée.
Les groupes palestiniens ont condamné les dernières attaques contre les fidèles, qu’ils ont qualifiées de crime.
Le premier ministre de l’Autorité palestinienne, Mohammad Shtayyeh, a déclaré dans un communiqué : "Ce qui s’est passé à Jérusalem est un crime majeur contre les fidèles. La prière dans la mosquée Al-Aqsa n’est pas autorisée par l’occupation [israélienne], c’est notre droit.
"Al-Aqsa est aux Palestiniens et à tous les Arabes et Musulmans, et son attaque est une étincelle pour la révolution contre l’occupation", a-t-il ajouté.
La Jordanie, qui assure la garde des lieux saints chrétiens et musulmans de Jérusalem - en vertu d’un accord de statu quo en vigueur depuis la guerre de 1967 - a condamné la prise d’assaut "ostensible" de l’enceinte par Israël.
Le ministère égyptien des affaires étrangères a quant à lui appelé à l’arrêt immédiat de "l’agression flagrante" d’Israël contre les fidèles d’Al-Aqsa.
"Un crime sans précédent"
Les affrontements à Al-Aqsa, troisième lieu saint de l’islam et site le plus sacré du judaïsme - dans lequel il est appelé "mont du Temple" - ont déclenché par le passé des guerres transfrontalières meurtrières entre Israël et les dirigeants du Hamas à Gaza, la dernière remontant à 2021.
Le Hamas a condamné le dernier raid comme "un crime sans précédent" et a appelé les Palestiniens de Cisjordanie "à se rendre en masse à la mosquée Al-Aqsa pour la défendre".
Après les violences à Al-Aqsa, plusieurs roquettes ont été tirées depuis le nord de Gaza en direction d’Israël.
L’armée israélienne a déclaré que cinq roquettes avaient été interceptées par le système de défense aérienne autour de la ville de Sderot, dans le sud d’Israël, et que quatre autres étaient tombées dans des zones inhabitées.
Selon Maram Humaid d’Al Jazeera à Gaza, les avions israéliens ont attaqué plusieurs sites à Gaza, frappant des cibles sur un "site militaire" à l’ouest de la ville et un site dans le camp de réfugiés de Nuseirat au centre de la bande.
À Gaza, des dizaines de manifestants sont descendus dans les rues cette nuit et ont brûlé des pneus.
"Nous jurons de défendre et de protéger la mosquée Al-Aqsa", ont-ils déclaré selon l’agence de presse AFP.
Les Palestiniens considèrent Al-Aqsa comme l’un des rares symboles nationaux sur lesquels ils conservent un certain contrôle. Ils craignent toutefois un lent empiétement de la part de groupes juifs, à l’instar de ce qui s’est passé à la mosquée Ibrahimi (Caveau des Patriarches) à Hébron, où la moitié de la mosquée a été transformée en synagogue après 1967.
Les Palestiniens s’inquiètent également des mouvements israéliens d’extrême droite qui veulent démolir les structures islamiques dans l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa et construire un temple juif à leur place.
Traduction : AFPS