Photo : Un autre jour atroce à Gaza. Une autre école de l’UNRWA devenue abri attaquée. Philippe Lazzarini, 6 juin 2024 © Philippe Lazzarini
Les forces israéliennes ont affronté des groupes palestiniens à Rafah et ailleurs dans le sud de la bande de Gaza, malgré l’annonce faite dimanche par l’armée israélienne de pauses tactiques dans les opérations pour permettre l’entrée de l’aide humanitaire, a déclaré Philippe Lazzarini, chef de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a critiqué dimanche les plans annoncés par l’armée pour organiser des pauses quotidiennes dans les combats le long de l’une des principales routes menant à l’enclave palestinienne assiégée, qui subit des bombardements israéliens incessants depuis plus de huit mois.
M. Lazzarini, commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA), la principale organisation fournissant de l’aide humanitaire à Gaza, a déclaré qu’il n’y avait pas eu de pause dans les combats.
"Il y a eu des informations selon lesquelles une telle décision a été prise, mais le niveau politique dit qu’aucune décision n’a été prise", a déclaré M. Lazzarini lors d’une conférence de presse lundi.
"Pour l’instant, je peux donc vous dire que les hostilités se poursuivent à Rafah et dans le sud de la bande de Gaza. Et que sur le plan opérationnel, rien n’a encore changé".
L’armée israélienne a déclaré lundi que ses forces poursuivaient leurs opérations dans la région de Rafah, y compris les combats au sol.
Les habitants ont déclaré que les forces israéliennes avançaient plus profondément dans les zones centrales et occidentales de Rafah. Les forces du Hamas se battaient à bout portant à l’intérieur du camp de Shaboura, au cœur de Rafah, selon la branche armée du groupe et les habitants, qui ont déclaré avoir entendu des explosions et des tirs ininterrompus.
L’armée israélienne avait annoncé ce week-end des pauses quotidiennes de 05h00 GMT à 16h00 GMT dans la zone allant du point de passage de Karem Abu Salem (Kerem Shalom) jusqu’à la route de Salah al-Din, puis vers le nord.
Elle a ensuite précisé que les opérations se poursuivraient à Rafah, principal point d’appui de l’assaut qu’elle mène actuellement dans le sud de la bande de Gaza.
Les responsables humanitaires internationaux ont déclaré à plusieurs reprises que les inspections israéliennes, les combats en cours et le pillage par des habitants désespérés avaient entravé l’acheminement de l’aide. Les troupes israéliennes au sol opèrent dans la ville méridionale de Rafah depuis le début du mois de mai. Elles ont depuis fermé le poste frontière vital de Rafah avec l’Égypte.
Avant l’opération terrestre de Rafah, le flux d’aide humanitaire vers Gaza était déjà insuffisant et le nombre de camions entrant dans le sud de la bande de Gaza se comptait par centaines, ce qui est loin d’être suffisant pour répondre aux besoins quotidiens des 2,3 millions d’habitants de l’enclave.
L’enfer sur terre
"Comme nous l’avons répété, les opérations humanitaires à Gaza doivent être pleinement facilitées et tous les obstacles doivent être levés", a déclaré Farhan Haq, porte-parole adjoint de l’ONU, à l’Associated Press lundi. "Nous devons être en mesure d’acheminer l’aide en toute sécurité dans toute la bande de Gaza".
Alors que l’assaut israélien sur Gaza en est à son neuvième mois, M. Haq a déclaré que les Palestiniens déplacés dans le territoire ont un besoin urgent de nourriture, d’eau, d’installations sanitaires, d’abris et de soins de santé, "beaucoup d’entre eux vivant près de piles de déchets solides, ce qui accroît les risques pour la santé".
Il a ajouté qu’Israël devait veiller à ce que les convois d’aide et les membres du personnel franchissent rapidement les points de contrôle, à ce que toutes les routes soient opérationnelles et à ce que le carburant, qui fait cruellement défaut, entre régulièrement dans la bande de Gaza.
Dans le même temps, Martin Griffiths, chef des opérations humanitaires des Nations unies, a déclaré dans un article d’opinion publié dans le New York Times que la bande de Gaza, appauvrie et soumise à un blocus, était devenue un "enfer sur terre", alors que la famine menaçait.
Il a déclaré que l’aide humanitaire était entravée et politisée alors que la faim et les maladies se propageaient, "et que les travailleurs humanitaires, les travailleurs de la santé et les journalistes avaient tous subi des pertes inacceptables".
Faisant écho à ses remarques, le bureau des médias du gouvernement de Gaza a accusé Israël et les États-Unis d’aggraver "délibérément" les conditions de famine à Gaza en "retenant l’aide humanitaire comme outil de pression politique".
Dans un communiqué publié lundi, le bureau des médias a accusé Israël et l’administration américaine d’"aggraver délibérément la situation humanitaire" à Gaza pour atteindre des objectifs politiques.
Par ailleurs, la Norvège a annoncé lundi qu’elle augmentait de 100 millions de couronnes (9,3 millions de dollars) son financement à l’UNRWA.
L’UNRWA a été plongé dans une crise en janvier, lorsqu’Israël a accusé une douzaine de ses 13 000 employés de Gaza d’avoir participé aux attaques du 7 octobre menées par le Hamas contre le sud d’Israël.
Ces allégations ont incité plusieurs pays, dont les États-Unis, principal bailleur de fonds, à suspendre le financement de l’agence, bien que nombre d’entre eux aient depuis repris leurs versements.
"L’UNRWA est l’épine dorsale de la réponse humanitaire à Gaza", a déclaré la ministre norvégienne du développement international, Anne Beathe Tvinnereim, dans un communiqué.
"La guerre, les accusations d’Israël, les attaques incessantes contre l’organisation et les retenues de fonds par les principaux donateurs ont placé l’UNRWA dans une situation financière extrêmement difficile", a-t-elle ajouté.
Un examen indépendant de l’UNRWA, mené par l’ancienne ministre française des affaires étrangères, Catherine Colonna, a mis en évidence certains "problèmes liés à la neutralité", mais a déclaré qu’Israël n’avait pas encore fourni de preuves de ses principales allégations.
Traduction : AFPS