Photo : Capture d’écran d’une vidéo téléchargée le 11 novembre 2023 sur la chaîne YouTube Artzenu qui sollicite des fonds pour des "équipes d’urgence civile" © Artzenu/YouTube
Des réseaux de combattants connectés, lourdement armés et ouvertement coordonnés sur une série de plateformes en ligne ont émergé pour sécuriser et développer les colonies israéliennes en Cisjordanie palestinienne.
S’appuyant sur des méthodes de renseignement en source ouverte (OSINT), les résultats de notre enquête de dix mois révèlent comment les milices de colons israéliens en Cisjordanie occupée ont collecté depuis le 7 octobre 2023 plus de 3,75 millions de dollars par l’intermédiaire d’ONG.
Bien que le montant total des dons à ces milices de colons soit probablement beaucoup plus élevé, il complète plus de 47 millions de shekels (12 millions de dollars) alloués au ministère israélien de la Sécurité nationale dans son budget 2024 pour ces milices.
Certaines des colonies les plus violentes reçoivent une aide du Canada, des États-Unis et du Royaume-Uni pour l’achat d’équipements militaires. Tout cela a été rendu possible grâce à Internet et aux lacunes dans l’application transfrontalière de la réglementation des organisations à but non lucratif et des plateformes en ligne.
Les sanctions imposées aux colons israéliens plus tôt cette année semblent être largement inefficaces pour paralyser les sources de financement et les programmes de sensibilisation à l’international du mouvement des colons dans son ensemble.
Pour analyser l’activité des milices de colons israéliens sur Telegram, l’unité d’enquête de The New Arab (TNA) a utilisé Open Measures, un outil de recherche qui archive les activités en ligne dangereuses, pour isoler 4 400 000 messages Telegram entre le 1er janvier 2023 et le 15 juin 2024 sur 86 canaux différents liés à la colonisation israélienne de la Palestine. En outre, nous avons recherché des termes clés sur une série de sites web israéliens de collecte de fonds. Un exemple de ces données est disponible ici.
Financement participatif pour les armes à feu
Les Israéliens de droite utilisent le terme géopolitique de "Samarie" (Shomron en hébreu), qui a des racines étymologiques remontant à la Bible, pour désigner la partie nord de la Cisjordanie occupée. Yossi Dagan dirige le Conseil régional de Samarie, qui gouverne 31 colonies israéliennes. Toutes les colonies israéliennes de Cisjordanie sont considérées comme illégales au regard du droit international.
Moins d’un mois après l’attaque du 7 octobre 2023 du Hamas contre Israël, M. Dagan a publié sur Facebook que le conseil avait acheté des "centaines de kits Roni" qui transforment les pistolets semi-automatiques en carabines, ainsi que plus de 300 fusils, en vue de la création de milices de colonies.
"Nous avons collecté les fonds auprès des amis de la Samarie à Miami, New York et Paris. Ces dernières années, nous avons investi dans le plaidoyer auprès des parlements et dans la création de liens d’amitié avec les communautés juives du monde entier. Aujourd’hui, elles ouvrent leur cœur et donnent de nombreux millions pour la défense des implantations de Samarie", peut-on lire dans le message de M. Dagan.
Le responsable du Conseil a sollicité des dons auprès d’une organisation appelée Shivat Zion Israeli Charity Trust. Son appel aux dons affirmait, entre autres, que les fonds serviraient à financer "l’équipement tactique de nos intervenants civils". Le Shivat Zion Trust mène une campagne de collecte de fonds sur la plateforme israélienne de financement participatif Givechak au nom de deux conseils régionaux, dont celui de Samarie. Au moment de la publication, elle a recueilli quelque 3,27 millions de NIS (865 000 dollars).
Les documents financiers du Shivat Zion Trust de 2023 indiquent des lignes pour le soutien aux "kitot konenut" (brigades armées d’intervention rapide qui opèrent dans les colonies). Selon des documents de 2023 obtenus par le New Arab, leur principal donateur était un homme d’affaires russe, suivi par la branche new-yorkaise de l’Association juive européenne. Leur troisième donateur était le Central Fund of Israel, basé aux États-Unis, qui serait impliqué dans l’achat de terres palestiniennes à Jérusalem-Est, afin de les revendre à des colons.
Le 12 octobre 2023, le site d’information israélien Arutz Sheva a confirmé que le Conseil régional de Samarie avait acheté des armes israéliennes grâce à des dons internationaux. "Bien que le Conseil régional de Samarie soit déjà considéré comme une entité agréée pour l’achat d’armes à feu, un sujet qui est strictement contrôlé en Israël, le Conseil a demandé au ministère de la Sécurité nationale d’accélérer les approbations requises pour la transaction. Le ministre Itamar Ben-Gvir a approuvé la demande et a ordonné à ses services d’accélérer le processus", peut-on lire dans le rapport.
M. Dagan n’a jamais précisé si une entité à but non lucratif avait servi d’intermédiaire pour l’achat d’armes ; toutefois, le calendrier et la formulation de ses messages soulèvent des questions quant au respect de la réglementation relative aux donateurs.
Depuis le 7 octobre 2023, la Cisjordanie a connu une recrudescence de la violence des colons à l’encontre des Palestiniens.
La plateforme Givechak utilisée par le Shivat Zion Trust recueille des fonds spécifiquement destinés à Rehelim, une colonie relevant de la juridiction du conseil de Samarie, où, le 28 octobre 2023, un colon aurait abattu un cueilleur d’olives palestinien.
Le même collecteur de fonds est aussi associé au Conseil régional de Mateh Binyamin, un autre conseil regroupant des colonies de Cisjordanie, qui comprend la colonie de Shilo. En août 2024, selon une enquête préliminaire israélienne, des colons de Shilo auraient participé à des raids et incendié le village palestinien de Jit, pendant que l’armée israélienne "se tenait à côté d’eux, voyait tout et ne faisait rien".
La plateforme comporte même un sous-groupe pour le Conseil régional du Mont Hébron, où se trouvent de nombreux colons et fermes sanctionnés. Trois dons, chacun d’un montant de 60 000 NIS (16 000 $), sont spécifiquement affectés au Fonds du Mont Hébron, désormais sanctionné.
L’unité d’enquête du New Arab (TNA) a demandé des commentaires à Yossi Dagan, aux conseils régionaux de Samarie, de Mateh Binyamin et du Mont Hébron, au Shivat Zion Trust, au Central Fund of Israel et à Givechak. Aucune réponse n’a été reçue à temps pour la publication.
Néanmoins, l’utilisation de l’argent des donateurs internationaux pour acheter des fusils pour les milices des colonies constitue une exception à la règle. Il est beaucoup plus facile de trouver des donateurs multinationaux pour financer des équipements tactiques autres que des armes à feu, tandis que l’État israélien fournit les armes.
Des sanctions inefficaces ?
Yossi Dagan s’est récemment rendu aux États-Unis pour encourager les actionss contre les sanctions imposées aux colons. Il a notamment rencontré Anthony D’Esposito et Claudia Tenney, deux membres républicains de la Chambre des représentants qui ont exprimé leur soutien à sa cause.
Depuis le début de la guerre contre Gaza, les États-Unis ont imposé des sanctions liées à la Cisjordanie à 23 entités et individus israéliens. Il comprennent des colons et leurs exploitations agricoles, mais aussi des organisations impliquées dans le financement participatif de personnes sanctionnées. Celles-ci ont été ciblées pour un large éventail d’actions contre les civils palestiniens, y compris l’engagement direct et indirect dans des actes de violence, des menaces, la saisie et la destruction de biens.
Pourtant, les sanctions semblent être appliquées de manière incohérente et sans cibler les responsables israéliens favorables à la colonisation. Eitay Mack, un avocat israélien spécialisé dans les droits de l’homme qui a soumis de nombreuses demandes de sanctions contre des entités israéliennes, a établi un parallèle avec les sanctions américaines appliquées aux responsables bosniaques en 2023. "Le Royaume-Uni et les États-Unis ont imposé des sanctions à presque tous les dirigeants des Serbes de Bosnie en Republika Srpska parce qu’ils menacent la stabilité des accords de Dayton et la paix dans les Balkans. Ils devraient faire de même en Israël et en Palestine. Ils pourraient le faire ; ce n’est pas comme réinventer la roue", a déclaré Mack à TNA.
TNA a contacté les membres du Congrès Anthony D’Esposito et Claudia Tenney, mais aucune réponse n’a été reçue à temps pour la publication.
"Des milices soutenues par l’État aux milices d’État"
Dans son avis consultatif publié le 19 juillet 2024, la Cour internationale de justice (CIJ), qui est la plus haute juridiction des Nations unies, a estimé que les colonies israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est "ont été établies et sont maintenues en violation du droit international", que la Cisjordanie fait partie d’un État palestinien souverain et qu’Israël doit évacuer tous ses colons de ce territoire occupé. En dépit du droit international, Israël ne considère que seules les colonies non autorisées ("avant-postes") sont illégales.
La CIJ a estimé que les colonies constituaient une violation de l’article 3 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, qui interdit la discrimination raciale et l’apartheid.
"Nous avons recueilli les fonds des amis de la Samarie à Miami, New York et Paris. Ces dernières années, nous avons investi dans le plaidoyer auprès des parlements et dans la création de liens d’amitié avec les communautés juives autour du monde. Aujourd’hui, ils ouvrent leur cœur et donnent de nombreux millions pour la défense des implantations de Samarie", peut-on lire dans un message de Yossi Dagan, responsable du conseil régional de Samarie.
Le statut ambigu des unités paramilitaires qui mènent l’annexion est évident dans les situations où des réservistes, actifs et inactifs, défendent les colonies. Une loi récemment adoptée par la Knesset permet désormais aux kitot konenut de bénéficier des mêmes avantages que les réservistes de l’armée israélienne.
Michael Omer-man, directeur de recherche pour Israël-Palestine à Democracy for the Arab World Now (DAWN), une organisation à but non lucratif basée à Washington, a déclaré à TNA que les kitot konenut étaient au départ une sorte de groupes civils de surveillance de quartier armés. Cependant, depuis le 7 octobre, ils ont développé des rôles officiels au sein de l’État où ils sont souvent payés, assignés à leurs zones de résidence et reçoivent des uniformes militaires. Omer-man a qualifié cette évolution comme celle de "milices soutenues par l’État à des milices d’État".
Les activités de ces groupes s’inscrivent dans le contexte d’une montée en puissance de la rhétorique de responsables colons tels que le ministre des finances Smotrich, qui a déclaré vouloir annexer la Cisjordanie "d’abord sur le terrain, puis par la voie législative". Le ministre israélien de la sécurité nationale et résident d’une colonie de Cisjordanie, Itamar Ben-Gvir, a cherché à mobiliser une garde nationale de type milice, dans le cadre des actions visant à cibler les civils et les militants palestiniens. Il a également assoupli un grand nombre de réglementations sur les armes à feu.
Certaines milices disposent de leurs propres entités fiscales déductibles des impôts en Israël, tandis que d’autres s’appuient sur le statut à but non lucratif des plateformes de financement participatif. Bien que le financement participatif reste un moyen important de coordination internationale, M. Omer-man a fait remarquer que le plus gros du soutien reçu par ces milices, qu’il soit financier ou autre, provient toujours de l’État israélien lui-même.
Des frontières floues entre civils et militaires
Des universitaires et des chercheurs ont discuté du flou qui existe entre les catégories de "paramilitaire civil" et de "combattant d’État" dû à la nature particulière du système de réserve israélien et de l’appareil politique environnant.
En Israël, les milices kitot konenut sont présentées comme des entités défensives et antiterroristes. Les colonies embauchent et financent les kitot konenut en Cisjordanie, mais c’est principalement le ministère de la sécurité nationale et l’armée israélienne qui les arment.
Ces milices de colons ont été créées en 1959 après la crise de Suez, mais elles sont passées au premier plan avec le début de la guerre contre Gaza. Depuis lors, un grand nombre d’armes et de munitions supplémentaires ont été distribuées aux kitot konenut. Le quotidien israélien Haaretz a rapporté qu’aucune communauté arabe d’Israël n’était éligible aux distributions d’armes financées par l’État.
Étant donné qu’Israël dispose d’une armée de conscription où la plupart de la population juive effectue une période de service obligatoire, il n’est pas surprenant que les kitot konenut soient composées de réservistes qui ne sont pas en service.
Selon les Nations unies, dans près de la moitié des attaques de colons recensées en 2023, les forces israéliennes accompagnaient ou soutenaient activement les responsables.
Le 11 juillet 2024, les États-Unis ont annoncé qu’ils imposaient des sanctions à Isaschar Manne, un colon basé dans les collines du sud d’Hébron. Quelques jours plus tard, Betzalel Taljah, un réserviste commandant une compagnie de la "Brigade de Judée", a publié sur Facebook le récit d’une fête avec Isaschar Manne et des soldats israéliens. Taljah a écrit : "Aujourd’hui, ce sont des sanctions contre une ferme, demain contre une colonie, et à la fin, ils sanctionneront aussi la municipalité de Jérusalem. Nous ne devons pas laisser faire cela".
Selon son propre site internet, Taljah est propriétaire de la ferme Talia, un avant-poste situé dans les collines du sud d’Hébron. La ferme est annoncée sur Facebook et sur le site web de l’ONG israélienne Hashomer Yosh, qui fait également l’objet de sanctions américaines.`
The New Arab a contacté Betzalel Taljah pour obtenir des commentaires sur le contenu de cet article. Il a simplement demandé si nous pensions que "les Juifs ont le droit de vivre dans l’État d’Israël" et n’a pas précisé sa réponse plus avant.
TNA a également contacté Isaschar Manne et Hashomer Yosh, mais aucune réponse n’a été reçue à temps pour la publication.
"Combattez avec votre argent !"
Pendant que The New Arab enquêtait sur les réseaux de collecte de fonds des colons, le média d’investigation israélien Shomrin publiait ses propres résultats sur une organisation à but non lucratif apparentée, bien que différente, appelée Shivat Zion Lerigvy Admata. Selon Shomrin, cette ONG de Shivat Zion opère sous le nom d’Artzenu (‘Notre terre‘ en hébreu).
Selon son site web, "Artzenu travaille à renforcer et à approfondir les efforts de colonisation dans diverses régions du pays en améliorant et en renforçant la résilience économique, sécuritaire et fonctionnelle de ces implantations agricoles".
Début juillet 2024, une collecte de fonds pour Artzenu sur la plateforme israélienne de financement participatif Peach avait permis de récolter plus de 9 millions de shekels (2,6 millions de dollars) pour kitot konenut. Les fonds sont collectés par l’intermédiaire d’une organisation basée aux États-Unis, la Ne’eman Foundation.
Le collecteur de fonds invite les donateurs internationaux à verser tout montant par carte de crédit, PayPal ou Bit (l’application de paiement de la banque israélienne Hapoalim), pour l’achat d’une large gamme d’équipements tactiques : gilets tactiques pare-balles en céramique, caméras de sécurité thermiques, drones de sécurité et équipements médicaux. Et ce, malgré l’interdiction de posséder des drones en Cisjordanie, qui ne s’applique généralement qu’aux Palestiniens, selon l’ONG israélienne de défense des droits de l’homme B’tselem.
Artzenu a collecté des fonds pour former ou pour fournir du matériel aux milices de certaines des colonies les plus violentes, notamment Kiryat Arba, Ma’aleh Levona, Bat Ayin, Shilo et Avigayil. Elle l’a fait en partenariat avec le Forum Hineni, une initiative pour créer des milices civiles en collectant des fonds pour plus de 620 groupes.
Artzenu a également fourni des volontaires agricoles à la ferme de Moshe, aujourd’hui sanctionnée.
Sur sa page Facebook, Artzenu a collecté des fonds explicitement pour la création de classes de réserve parmi les colons armés. Le groupe a eu recours au financement participatif pour financer l’expansion des colonies non seulement en Cisjordanie occupée, mais aussi sur le plateau du Golan occupé.
Toujours sur Facebook, l’organisation se demande si les résidents palestiniens peuvent réellement être considérés comme des civils innocents et partage une vidéo dans laquelle un réserviste déclare : "Nous ne partirons pas tant que Gaza ne sera pas détruite : "Nous ne partirons pas tant que Gaza n’aura pas été exterminé". Dans le même message, le réserviste est décrit comme un "champion".
En même temps qu’il lançait la campagne de collecte de fonds pour l’équipement tactique sur Peach, Artzenu a fait circuler sur Facebook un formulaire Google demandant aux gens de préciser s’ils collectaient des fonds pour les kitot konenut ou pour une unité militaire israélienne officielle.
Le groupe est présent sur de nombreuses plateformes israéliennes financement participatif. Il collecte des fonds par l’intermédiaire de JGive et de Charidy, et dispose d’un profil sur IsraelGives.
De nombreuses organisations de colons collectent actuellement des fonds par l’intermédiaire d’IsraelGives, qui, a fait remarquer le journaliste Jason Wilson, présente un risque élevé pour les donateurs en raison de son implication dans la guerre officielle et paramilitaire en Palestine.
Jalal Abukhater, responsable du plaidoyer chez 7amleh, une organisation palestinienne de défense des droits numériques, a déclaré à TNA que les groupes de colons collectent régulièrement des fonds en utilisant des plateformes israéliennes, y compris pour les colons qui commettent des actes terroristes.
"Les colons utilisent des plateformes en ligne pour soutenir leur entreprise, généralement des sites web locaux qui ressemblent à Paypal ou GoFundMe , mais qui sont techniquement hébergés en Israël", a déclaré Abukhater. Il a noté que des collectes de fonds ont également été lancées pour soutenir les colons condamnés pour avoir commis des crimes contre les Palestiniens, comme la famille Dawabsheh, qui a été brûlée vive dans le village de Duma en 2015.
Nous avons contacté IsraelGives pour savoir si le financement participatif au profit de colons violents était conforme à la mission et aux valeurs de la plateforme. Un porte-parole d’IsraelGives a déclaré à TNA que "s’il est vrai qu’en tant qu’organisation à but non lucratif enregistrée, Artzenu serait éligible à travailler avec notre plateforeme, il en serait de même pour l’ensemble des 40 000 organisations à but non lucratif enregistrées en Israël, y compris les organisations qui s’opposent aux objectifs soutenus par cette organisation en particulier".
Le porte-parole d’IsraelGives a ajouté que "après examen de leur compte chez nous, Artzenu n’a pas reçu de dons via notre plateforme depuis février 2024, et n’a pas mené de campagne active depuis mai 2023."
A propos du travail de Jason Wilson, le porte-parole a souligné que l’article "a attiré notre attention sur un certain nombre de campagnes de collecte de fonds qui violaient nos conditions de service. Elles ont été rapidement retirées de notre plateforme".
En 2022, Artzenu/Shivat Zion Lerigvy Admata a reçu des dons nationaux et internationaux pour plus de 3 millions de shekels (890 000 dollars). Entre 2021 et 2024, elle a également reçu plus de 7 millions de shekels (1,96 million de dollars) de subventions du gouvernement israélien.
Selon l’enquête de Shomrin, le président de l’organisation est Yonathan Ahiya, un résident de la vallée du Jourdain et une personnalité bien introduite au sein du parti au pouvoir, le Likoud. Depuis qu’il a pris la tête d’Artzenu en 2020, le budget du groupe est passé de 600 000 shekels (175 000 $) à 2,3 millions (684 000 $) en 2022.
Artzenu a également cherché à s’approprier les ressources en eau et à transformer les sources naturelles de la vallée du Jourdain en destinations touristiques pour les colons. Une source d’Artzenu est située à l’extérieur d’une grande ferme de colonisation dans le village d’Ad Deir, près de la frontière avec la Jordanie. Le site Google mentionne le site web d’Artzenu et montre des photos de son logo sur des panneaux. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies a signalé qu’en avril 2023, dans cette petite communauté de Cisjordanie, des colons "ont fait irruption sur des terres palestiniennes privées et ont détruit des cultures et des biens agricoles".
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- Artzenu/Shivat Zion Lerigvy Admata organise des visites touristiques autour des sources d’eau douce de la colonie d’Ein Yarmouk, en Cisjordanie occupée. © Artzenu/Facebook
Nous avons contacté PayPal pour leur demander quel était leur rôle dans la facilitation des activités des colons dans les territoires occupés. TNA a également envoyé un courriel à Meta (la société mère de Facebook) et à Google (la société mère de YouTube), pour leur demander s’ils étaient impliqués dans la diffusion de contenus sur les colons. Aucune réponse n’a été reçue à temps pour la publication.
Abukhater, le responsable du plaidoyer de 7amleh, a affirmé que Meta n’appliquait pas des "politiques justes et égales" aux utilisateurs palestiniens et israéliens. Il a déclaré à TNA que, puisque Meta supprime le contenu associé à une liste non divulguée d’entités dangereuses, qui cible les Palestiniens de manière disproportionnée, "il a l’obligation de faire la même chose avec les colons israéliens, dont les activités sont illégales en vertu du droit international".
D’autres organisations de colons ont collecté des fonds sur JGive. Rujum-Zionist Entrepreneurship l’a fait pour fournir des équipements tactiques aux colons. Comme l’indiquent les pages de donation de Rujum, les dons à Rujum sont déductibles des impôts en Israël et aux États-Unis.
Une autre organisation, Keren Ahiezer Achisamch, affirme que son principal objectif caritatif est "d’aider les familles qui ne peuvent pas se débrouiller financièrement en raison des faibles revenus de l’un ou des deux membres du couple". Cependant, l’inspection de leur page web sur JGive révèle qu’ils collectent des fonds pour une "équipe de sécurité civile d’urgence bénévole" dans le cadre d’un projet intitulé "Protecting Our Home ! ” (Protégeons notre maison !). La page web fournit des estimations de prix pour diverses équipements tactiques, tels que des viseurs de jour Raytheon ELCAN Specter pour AR-15, des lunettes de visée thermique, des gilets tactiques et des drones thermiques.
Nous avons contacté JGive et demandé si la collecte de fonds pour l’achat d’équipement militaire était conforme à la mission philanthropique de la plateforme. Rimone Hersch, qui gère les demandes de dons aux États-Unis chez JGive, a déclaré à TNA que le site Web était "utilisé par des ONG reconnues et agréées qui respectent nos règlementations et les lois de l’État d’Israël".
Hersch a ajouté que "JGive se conforme à toutes les réglementations financières israéliennes et internationales car elle continue à servir de plateforme caritative principale visant à accroître l’impact social et les dons de charité en Israël et dans le monde juif".
Nous avons également contacté le Rujum-Zionist Entrepreneurship et Keren Ahiezer Achisamch, mais aucune réponse n’a été reçue à temps pour la publication. Peu après que nous les ayons contactés, Keren Ahiezer Achisamch a modifié la page de ses collectes de fonds pour kitot konenut afin de supprimer les références aux milices de colons et au type d’équipement qu’elles financent.
Des associations caritatives illégales ?
Selon le collecteur de fonds Keren Ahiezer Achisamch, "tous les dons sont déductibles des impôts en Israël, aux États-Unis (JGive-Friends of Asor Fund USA Inc.), au Canada (Mizrahi Canada Foundation) et au Royaume-Uni (UK Toremet Foundation)".
L’association à but non lucratif Dawn MENA, basée aux États-Unis, avait déjà appelé à des sanctions contre les propriétaires de JGive - Asor Fund, enregistré en Israël, et JGive-Friends of Asor Fund USA Inc. enregistré aux États-Unis - pour avoir collecté des fonds pour Tzav 9, le groupe extrémiste israélien responsable du blocage de l’aide destinée à la bande de Gaza. Les États-Unis ont sanctionné Tzav 9 en juin 2024.
En janvier 2024, la Commission islamique des droits de l’homme (IHRC) a soumis un rapport à la Commission britannique des organisations caritatives intitulé "Enabling Genocide Fundraising in the UK" (Permettre la collecte de fonds pour le génocide au Royaume-Uni). Ce rapport de 600 pages documente la manière dont les organisations caritatives enregistrées au Royaume-Uni, y compris UK Toremet, contreviendraient aux règlements de la Commission des organisations caritatives en facilitant la collecte de fonds pour la fourniture d’équipements militaires à l’armée israélienne.
TNA a contacté la Commission britannique des organisations caritatives pour obtenir un commentaire sur ces violations signalées de son code de conduite. Un porte-parole de la commission a répondu : Plus tôt cette année, nous avons ouvert un dossier de conformité réglementaire pour évaluer les allégations selon lesquelles UK Toremet Limited avait financé les Forces de défense israéliennes, contrairement à la loi sur les œuvres de bienfaisance. Après avoir discuté avec les administrateurs de l’organisation caritative, nous n’avons trouvé aucune preuve à l’appui de ces allégations".
Le porte-parole a toutefois admis qu’ils avaient "identifié des améliorations qui seraient nécessaires à la gouvernance de l’organisation caritative et avaient transmis à l’organisation un plan d’action pour y remédier".
Enfin, le représentant de la commission a souligné que "si promouvoir l’efficacité des forces armées de la Couronne [britannique] est un objectif caritatif en droit, il n’est pas juriqiquement caritatif de soutenir l’armée ou la milice d’une autre juridiction".
En mai 2024, le Centre international de justice pour les Palestiniens (ICJP), un groupe juridique basé au Royaume-Uni, a soumis à la Charity Commission une demande distincte d’enquête sur les activités d’UK Toremet, entre autres organisations à but non lucratif basées au Royaume-Uni. La demande était centrée sur la façon dont des organisations israéliennes extrémistes telles que Tzav 9 pouvaient apparemment faire du financement participatif par l’intermédiaire de Toremet.
En septembre, l’ICJP a publié un résumé de l’état des plaintes qu’elle avait déposées contre des organisations caritatives britanniques : au mois d’août, après que la commission eut remis à Toremet son "plan d’action" non divulgué, l’avant-poste de colons Hashomer Yosh aurait utilisé la même organisation caritative pour collecter des fonds pour ses activités. Les États-Unis ont sanctionné Hashomer Yosh le même mois.
Dans son résumé, l’ICJP a conclu que "compte tenu de la fourniture continue par UK Toremet de services à des organisations israéliennes ayant un comportement illégal, [...] ce plan d’action était soit insuffisant soit non mis en œuvre par l’organisme de bienfaisance".
Au Canada, où la Fondation Mizrahi Canada est enregistrée, il n’est pas non plus légalement caritatif de "soutenir les forces armées d’un autre pays".
Just One Chesed, une autre organisation à but non lucratif israélienne, également enregistrée aux États-Unis, est allée plus loin que les autres organisations, dans la mesure où elle a collecté des fonds pour sa propre "Initiative de réponse rapide" afin de fournir aux colonies de Gush Etzion et d’Efrat du "matériel tactique, médical et de défense". L’équipement comprenait des lasers de visée de nouvelle génération de L3Harris, dont la vente est normalement réservée à l’armée américaine active et aux forces de l’ordre. Au moment de la publication, la campagne avait récolté 622 368 dollars.
The New Arab a contacté la UK Toremet Foundation, la Mizrahi Canada Foundation, Artzenu/Shivat Zion Lerigvy Admata, la Ne’eman Foundation, Just One Chesed, Charidy et Peach afin d’obtenir des commentaires sur cet article. Aucune réponse n’a été reçue à temps pour la publication.
Nous avons également envoyé un courriel au procureur général de l’Ontario et au procureur général de l’État de New York, dont les responsabilités incluraient respectivement d’enquêter sur des organisations à but non lucratif comme la Mizrahi Canada Foundation et le Central Fund of Israel. Dans notre correspondance, nous avons demandé, en vain, s’il était légal pour ces ONG de collecter et de donner des fonds pour l’achat d’équipements militaires israéliens.
Enfin, TNA a contacté le ministère israélien de la justice, qui est chargé de réglementer les organisations caritatives locales, et le bureau du procureur général d’Israël, qui est l’organisme qui devrait enquêter sur les organisations à but non lucratif. Nous avons demandé quelles mesures étaient prises pour s’assurer que les ONG ne collectaient pas de fonds pour l’achat d’équipements militaires dans les colonies illégales. Le ministère de la justice s’est abstenu de tout commentaire et nous a recommandé de déposer une plainte pour déterminer si l’affaire relevait de sa compétence. Nous n’avons reçu aucune réponse du procureur de l’État.
Vol numérique de terres en Palestine
Bien que les organisations à but non lucratif et le financement particpatif existent principalement pour le bien social, ils peuvent également être utilisés dans le cadre d’un effort de colonisation paramilitaire pour lever des fonds à l’échelle internationale.
Le degré d’intégration avec les codes fiscaux nationaux, tels que ceux des États-Unis, du Canada et du Royaume-Uni, soulève d’autres questions sur la complicité de ces États - sans parler des donateurs individuels - dans l’annexion illégale en cours de la Palestine.
Bien qu’il soit souvent illégal d’utiliser des organisations à but non lucratif pour soutenir des forces armées et des groupes paramilitaires étrangers, des structures imbriquées de contributions présentant divers niveaux de déni plausible restent cachées au milieu du chaos de la guerre hybride.
Si les sanctions introduites depuis le 7 octobre 2023 tentent de remédier à ce problème, elles continuent de cibler principalement les colons, plutôt que les plateformes et les organisations à but non lucratif concernées. Des plateformes telles que Facebook, Google, YouTube, Telegram et WhatsApp continuent d’être exploitées comme des mécanismes de guerre moderne. En outre, les organisations utilisent toute une série de plateformes de collecte de fonds, principalement israéliennes, pour permettre le déplacement continu des Palestiniens.
Ces derniers mois, des oppositions ont émergé en amont de ces mécanismes de financement de guerre à but non lucratif. Citons par exemple le Not On Our Dime Act (("Loi Pas à nos frais"), qui propose d’endiguer la vague de dons déductibles d’impôts des organisations à but non lucratif basées à New York aux colonies israéliennes. Mais en raison de l’opposition de l’assemblée législative de l’État de New York, le projet de loi est au point mort, les collecteurs de fonds pour les colons et l’armée israélienne continuant de bénéficier d’avantages fiscaux.
Sumaya Awad, directrice de la stratégie du projet de justice Adalah, l’un des groupes qui fait campagne pour la loi Not On Our Dime, a déclaré à TNA : « Notre économie et nos investissements étrangers devraient refléter nos valeurs en tant qu’État, et subventionner le génocide et l’expansion des colonies illégales est absolument incompatible avec un État qui prétend être fier d’être progressiste. »
S’adressant à The New Arab, un autre partisan du projet de loi, le député de l’État de New York Zohran Mamdani, l’a décrit comme une tentative « de combler le fossé entre ce qui est explicite dans notre loi et ce qui est implicite – que les organisations caritatives ne devraient pas financer les crimes de guerre ».
Réfléchissant à la manière d’étendre les restrictions internationales existantes, l’avocat israélien des droits de l’homme Eitay Mack a souligné que « pour le gouvernement américain, il serait très facile d’informer les quelques sites Web de financement participatif [israéliens] populaires qu’ils pourraient eux-mêmes être sanctionnés, s’ils étaient reconnus coupables de violation des sanctions américaines ».
L’administration Biden reste toutefois réticente à durcir les sanctions contre les colons et leurs complices. Interrogé sur la possibilité pour Washington d’envisager des sanctions contre les responsables israéliens et les plateformes de financement participatif favorables aux colons, un porte-parole du département d’État américain a répondu : « Nous ne prévoyons pas de sanctions potentielles. »
Alors que les élections présidentielles américaines se profilent le 5 novembre, une victoire de Donald Trump pourrait se traduire par encore moins de contraintes pour les colons. L’administration Trump précédente avait déclaré que les colonies ne constituaient pas une violation du droit international.
Et alors que la guerre en Israël, en Palestine et maintenant au Liban continue de s’intensifier, les groupes de colons armés sont de plus en plus encouragés à la violence, tandis leurs efforts de financement participatif international restent largement sans limites.
Traduction : AFPS