Ce dimanche 1er juin, le Républicain Lorrain du 2 juin nous apprend que, à la veille d’une nouvelle rencontre avec le président palestinien Mahmoud Abbas, le premier ministre israélien Ehud Olmert autorise la construction de 121 logements au Jebel Abou Ghneim renommé Har Homa et 763 autres à Pisgat Zeev – précisément sur la ceinture de colonies qui boucle Jérusalem – pour « célébrer la réunification de la ville ». Cette annonce cynique, provocatrice, fait tomber encore un peu plus le masque d’un Israël qui ne veut à aucun prix la paix.
Un peu d’histoire…
Juin 1967 : Israël, du fait de sa victoire militaire dans la guerre des Six jours, occupe les territoires palestiniens : Jérusalem-Est, Cisjordanie et Gaza (ainsi que le Golan syrien et le Sinaï égyptien). Dès septembre 1967, la première colonie de peuplement est établie en Cisjordanie, à Kfar Etzion, dans la région d’Hébron ; dans le même temps, le gouvernement travailliste de Levy Eshkol entreprend la judaïsation de Jérusalem annexée.
Depuis, les gouvernements israéliens, de droite comme de gauche, ont poursuivi obstinément la colonisation des Territoires palestiniens occupés. Entre l’accord d’Oslo de 1993 et l’automne 2002, le nombre de colons a quasiment doublé, la progression la plus rapide revenant aux gouvernements travaillistes d’Itzhak Rabin - qui avait pourtant annoncé le gel de la colonisation – et d’Ehoud Barak.
Aujourd’hui, le nombre de colons se monte à 495 000 colons en Cisjordanie (chiffre cité par la « Foundation for Middel-East Peace ») dont 220 000 à Jérusalem-Est.
Depuis 41 ans, Israël viole la résolution 242 de l’ONU du 22 novembre 1967 qui pose le principe « le retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés lors du récent conflit ». Depuis 41 ans, Israël viole l’article 49.6 de la IVème Convention de Genève : « La puissance occupante ne pourra pas procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa propre population civile sur le territoire occupé par elle. »
La farce tragique du « gel des colonies »
La feuille de route, élaborée par le quartette, pose comme principe la concomitance des exigences faites aux protagonistes : Israël doit geler la colonisation en même temps que les Palestiniens mettent un terme aux actions de type « terroriste ». La conférence d’Annapolis de novembre 2007 –censée préparer la paix pour 2008 - reprend l’exigence du gel des colonies.
La conférence à peine terminée, le gouvernement israélien annonce de nouvelles constructions à Har Homa et à Pisgat Zeev ; en mars 2008, la mairie de Jérusalem annonce à son tour 600 logements nouveaux à Jérusalem-Est, ce plan faisant partie « d’une initiative globale pour la construction de 40 000 unités de logement dans la ville afin de faciliter à de jeunes couples l’accès au logement ». L’organisation israélienne « La Paix maintenant » révèle dans son dernier rapport « qu’aucun projet de construction n’a été gelé, que les constructions se sont poursuivies sur les sites existants, que des centaines de bâtiments comptant des milliers de logements sont en chantier depuis janvier 2008 dans 101 colonies de Cisjordanie »
Toutes ces annonces dispersées sont en fait l’application d’un programme concerté, comme le constate Régis Debray : « Ainsi se développe une colonisation doublée de travaux d’infrastructures, de captation d’eau, d’occupation des hauteurs, de raccordements d’une colonie à l’autre, une colonie sauvage qui est très vite officialisée…bref, un processus qui est un rouleau compresseur. » Leïla Shahid n’est pas en reste : « je reviens d’un mois en Palestine après quatre ans d’absence…je suis effondrée. J’ai l’impression qu’en quatre ans, c’est devenu quasiment irréversible. A commencer par Jérusalem –c’est à Jérusalem que l’agrandissement des colonies a été le plus important. Si cela continue, il n’y aura plus rien à négocier. »
« Gel des colonies » : assez de mots, des actes.
Le porte-parole du département américain se contente de poser une question : « l’annonce du gouvernement israélien (sur les colonies) est-elle utile au processus de paix ? non, elle est inopportune ». Pour sa part, Nicolas Sarkozy insiste : « En tant qu’ami, je vous dis que la sécurité d’Israël passe par l’arrêt de la colonisation ». Bernard Kouchner, en visite en Israël et dans les Territoires palestiniens occupés le 22mai dernier, déclare : « rien non plus ne saurait justifier la poursuite de la colonisation, obstacle à la paix ».
Messieurs les politiques, il y a urgence ; au-delà de vos belles paroles, posez enfin des actes, à commencer par des sanctions à l’encontre d’Israël qui, encouragé par l’impunité totale dont il jouit, ne peut qu’accélérer sa politique des faits accomplis.