Au début du mois, les forces israéliennes ont arrêté trois lycéens palestiniens, perturbant l’obtention de leur diplôme de fin d’études secondaires.
Selon les informations recueillies par Defense for Children International-Palestine (DCIP), les forces israéliennes ont arrêté Amin Al-Sulaibi, 17 ans, le 1er juin à l’aube, chez lui dans la ville de Hébron.
Saifuddin Najajreh, 17ans, et Khalaf Shakarneh, 17 ans, ont été arrêtés chez eux au cours de descentes distinctes à l’aube du 9 juin, à Bethléem.
Les trois garçons étaient en train de préparer leur diplôme de fin d’études secondaires appelé Tawjihi, dont les épreuves sont organisées entre le 30 mai et le 17 juin.
Saifuddin Najajreh et Khalaf Shakarneh ont été emmenés au centre de détention de Etzion, près de Hébron et le 11 juin 2020, ils ont comparu pour la première fois, par liaison vidéo, devant un juge militaire au tribunal militaire de Ofer en Israël, situé entre Jérusalem et Ramallah. Pendant l’audience, à la demande du procureur militaire, la mise en liberté sous caution a été refusée et leur détention prolongée jusqu’au 15 juin pour, soi-disant, prolonger l’enquête, selon Iyad Misk, avocat de DCIP en charge de ces dossiers.
Le 15 juin, les deux garçons ont de nouveau comparu devant le tribunal militaire de Ofer : le procureur militaire israélien n’a pas porté plainte contre eux et ils ont été libérés sous caution.
« Le droit et les tribunaux militaires israéliens ont peu de choses à voir avec la justice », a déclaré Ayed Abu Eqtaish, Directeur du Programme de Responsabilisation à DCIP. « Les autorités israéliennes connaissent l’importance des épreuves du Tawjihi. Leur intention est d’arrêter des enfants en sachant qu’il ne leur sera pas possible de terminer leurs études plutôt que de tenir un enfant responsable d’un quelconque acte répréhensible spécifique ».
Son père a raconté qu’Amin Al-Sulaibi a été arrêté chez lui à l’aube par cinq soldats israéliens en armes. Ils n’ont pas présenté de mandat d’arrêt et n’ont donné aucun renseignement sur la raison de son arrestation. « Mon fils était en train de réviser et se préparait à son épreuve de langue arabe. Ils ne nous ont donné aucune explication. Nous leur avons dit qu’il avait une épreuve ce jour-là. »
Le 7 juin, Amin a comparu par liaison vidéo devant le tribunal militaire israélien de Ofer, accusé d’avoir jeté des pierres. Il est actuellement détenu à la prison israélienne de Megiddo, au nord de Jénine, en Cisjordanie occupée.
Au cours de leur détention, Saifuddin Najajreh et Khalaf Shakarneh se sont montrés très inquiets pour leur diplôme. Ils n’ont pas pu se présenter à trois épreuves et devront repasser leur Tawjihi plus tard.
La réussite à toutes les épreuves qui durent trois semaines est nécessaire pour obtenir le diplôme officiel. L’enjeu des épreuves est important parce que les résultats déterminent quelles universités les étudiants pourront fréquenter ainsi que leur futur parcours d’études.
Les arrestations par l’armée israélienne perturbent le parcours éducatif des enfants palestiniens ; les recherches de DCIP montre qu’un enfant libéré, quand il retourne à l’école après sa période d’incarcération, redouble sa classe.
Entre août 2019 et février 2020, DCIP a enregistré 120 atteintes aux droits liées à l’instruction perpétrées par les soldats et colons israéliens en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est et dans la Bande de Gaza, dont l’arrestation d’enfants dans les écoles ou près de celles-ci et des attaques contre les écoles.
Les enfants palestiniens sont confrontés régulièrement aux violences physiques et au harcèlement sur le chemin de l’école, aux descentes de l’armée et des colons, aux graffitis haineux sur les murs des écoles et à la démolition partielle ou totale de leur établissement scolaire, selon DCIP.
Indépendamment de leur culpabilité ou de leur innocence, les enfants en conflit avec la loi peuvent bénéficier de mesures de protection spéciales et avoir accès à une procédure régulière en application du droit international des droits de l’homme.
Les normes internationales de la justice des mineurs sont fondées sur deux principes fondamentaux : l’intérêt supérieur de l’enfant doit être la préoccupation primordiale dans les décisions qui le concernent ; les enfants ne doivent être privés de leur liberté qu’en dernier recours, pour la durée la plus courte possible.
Israël possède la distinction douteuse d’être le seul pays au monde qui, de façon systématique, poursuit les enfants devant les tribunaux militaires où leur droit fondamental à un procès équitable n’est pas respecté. Israël poursuit chaque année entre 500 et 700 enfants palestiniens devant les tribunaux militaires.
Les tribunaux militaires israéliens ne sont ni impartiaux ni indépendants, comme le droit international le requiert parce que les juges qui y siègent sont des officiers d’active ou de réserve de l’armée israélienne, soumis à la discipline militaire et dépendants de leurs supérieurs pour leur promotion.
Le transfert des détenus palestiniens, y compris les enfants, vers les prisons et les centres d’interrogatoire, même pendant de brèves périodes, constitue une violation de l’article 76 de la Quatrième Convention de Genève et un crime de guerre en violation du Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale.
Traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT de l’AFPS sur les prisonniers