Le plan de redéploiement était décrit comme la fin de l’occupation et vu par des militants Palestiniens comme une victoire et par la droite israélienne comme une soumission « terroristes ».
En fait ce plan n’est ni l’un ni l’autre - en réalité il va aggraver et poursuivre la guerre d’occupation israélienne, à présent dans sa 37e année. Le plan équivaut à une stratégie du premier ministre israélien qui cherche à détourner l’attention sur la détérioration de la situation des droits humains dans les territoires occupés, suite à la continuelle violation de ces droits par les forces israéliennes. Ce plan permet aussi de gagner du temps et de l’espace pour éviter la mise en œuvre du jugement de la Cour de Justice Internationale de la Haye en créant autant de « faits accomplis » en Cisjordanie.
Le PCHR affirme avec force que ce plan facilitera l’objectif d’Israël de se couper de Gaza pour échapper à ses responsabilités par un refus permanent d’appliquer les lois internationales. De plus le plan israélien a pour objectif d’accentuer l’isolement imposé à la bande de Gaza et par conséquent d’augmenter l’étouffement social et économique de la population civile.
Le PCHR affirme que les documents sur les lois internationales (et spécialement la Quatrième Convention de Genève) restront applicables dans le cas d’un redéploiement militaire israélien, du fait que le pouvoir occupant continuera à s’exercer sur la bande de Gaza. Le PCHR affirme aussi que l’unilatéralisme et le mépris des obligations concernant le respect des droits humains ne permettront jamais de parvenir à une solution pacifique dans ce conflit.
Introduction
Le PCHR s’inquiète vivement du « plan de désengagement »1 proposé par le premier ministre israélien Ariel Sharon le 14 avril 2004 concernant le redéploiement militaire dans la Bande de Gaza y compris le redéploiement limité dans certaines zones de la Cisjordanie. Le PCHR s’inquiète surtout du fait que selon les détails publiés jusqu’à présent par le bureau du premier ministre², ce plan de « désengagement » proposé ainsi que des déclarations additionnelles vont faciliter la poursuite de l’abrogation des obligations légales et morales d’Israël selon la loi internationale qui inclut le droit au retour des réfugiés, le blocage de la mise en œuvre de la décision du ICJ (Cour Internationale de Justice) concernant le Mur d’Annexion et le droit à l’autodétermination.
Le plan de désengagement total n’a ni été publié ni finalisé mais la structure et le concept qui prévalent inquiètent beaucoup les organisations des droits humains qui peuvent être surs que ce plan ne sert ni la loi humanitaire internationale ni la loi sur les droits humains. Le plan n’aboutit pas à la fin de l’occupation. En fait il renforce la position des autorités israéliennes en tant que pouvoir occupant. Israël pourra toujours exercer un total contrôle sur la Bande de Gaza et par conséquence la Quatrième Convention de Genève devrait rester le document légal fondamental régissant les territoires occupés.
Le premier ministre Ariel Sharon a d’abord annoncé en décembre 2003, une proposition de « plan de désengagement » pour la Bande de Gaza et une action apparentée en Cisjordanie comme une action unilatérale qui devrait être prise sans accord négocié avec les contreparties palestiniennes.3 Le plan par lui-même est une stratégie militaire et politique qui a des graves implications sur le statut économique, social, et politique du peuple palestinien. Les organisations des droits humains doivent considérer les aspects légaux, politiques et militaires de ce plan comme faisant partie de leur stratégie pour chercher activement la mise en œuvre de la Quatrième Convention de Genève, de la Convention sur les Droits Civils et Politiques (ICCPR) et de la Convention Internationale sur les Droits Economiques, Sociaux et Culturels (ICESCR) dans les territoires occupés.
Le PCHR s’inquiète de la tentative de mettre en route ce plan qui ne respecte pas les droits humains internationaux et la loi humanitaire ; de ce plan résultera une détérioration supplémentaire de la situation militaire, politique et économique sur le terrain. Ce présent document essaye de démontrer les défauts de cette proposition en ce qui concerne à la fois les obligations d’Israël selon la loi internationale et l’impact qu’aura un tel plan sur les droits humains et la situation humanitaire dans le territoire occupé palestinien.
1 Le mot hébreu utilisé pour décrire le plan est Hitnatkut qui signifie littéralement « couper » ou « désengagement » : cela illustre l’intention des autorités israéliennes de retirer leurs responsabilités politiques le légales vis-à-vis des civils palestiniens dans la Bande de Gaza ainsi que leur volonté de couper la bande de Gaza du reste du monde et en ce faisant d’augmenter l’asphyxie des civils dans les territoires occupés.
2 Voir « Ligne générale du Plan de désengagement », 18 avril 2004, disponible sur : www.mfa.gov.il . Ce document fait aussi référence aux lettres échangées entre le premier ministre israélien et président des Etats-Unis lors de leur rencontre le 14 avril 2004 et une lettre du directeur de bureau du premier ministre au conseiller de la sécurité nationale des Etats Unis.
3 Voir « Discours du premier ministre à la Conférence/Traduction d’Herzlia, 18 décembre 2003, disponible sur : www.pmo.gov.il
Ce document donne une analyse critique du plan autour duquel tout débat fait gravement défaut jusqu’à présent. Jusqu’à ce jour, le « plan de désengagement » a été décrit de diverses manières comme étant la fin de l’occupation de Gaza (que ce soit dans les média ou par le gouvernement israélien) ou comme une victoire (par certains éléments de la société palestinienne). En réalité ce n’est ni l’un ni l’autre.
Les membres du Quartet ont émis une déclaration après l’annonce du « plan de désengagement », déclaration qui inclut une mauvaise compréhension fondamentale de la nature du plan :
« Le Quartet a estimé que l’annonce de l’intention du premier ministre israélien Sharon de se retirer de toutes les colonies de Gaza et de certaines parties de la Cisjordanie était positive. Le Quartet accueille favorablement et encourage une telle démarche qui devrait offrir un rare moment d’opportunité pour rechercher la paix au Moyen Orient ».
De plus le Quartet a souligné que le « plan de désengagement » appuyait le processus de la feuille de route. En fait ce plan n’est ni un plan de paix ni de circonstance. Sa portée est destinée à limiter les progrès de la paix en amenant une détérioration du statut économique, social et politique des territoires occupés tout en excluant le OLP/PNA (en infraction claire de la Feuille de Route) et en renforçant un réel contrôle sur la Cisjordanie et la bande de Gaza.
Le PCHR s’inquiète du fait que le « plan de désengagement » est en fait une méthode tendant à faciliter une stratégie du gouvernement israélien pour :
i. détourner l’attention de la détérioration de la situation des droits humains dans les territoires occupés, caractérisée entre autres par l’augmentation des tueries de civils, de démolitions de maisons et d’exécutions extrajudiciaires
ii. éliminer le rôle de l’OLP lors des négociations sur le statut futur de la Palestine
iii. continuer la mainmise asphyxiante économique et sociale imposée sur la Bande de Gaza et ainsi de continuer l’occupation belligérante
iv. arrêter le débat sur la mise en œuvre de l’avis consultatif de l’ICJ (Cour Internationale de Justice) concernant le mur d’Annexion qui vise à annexer 58% du territoire de la Cisjordanie. De cette façon Israël pourra avoir l’opportunité d’accélérer la construction et de mettre en route sa stratégie de fait accompli qui vise finalement à rendre tout état palestinien absolument invivable
v. placer la responsabilité de la situation sécuritaire dans la bande de Gaza sous la responsabilité du gouvernement égyptien tout en permettant à l’armée d’occupation israélienne de mener des incursions dans Gaza
4- Les Accords d’Oslo du 13 septembre 1993, a établi l’OLP comme partenaire des négociations avec les autorités israéliennes, au nom du peuple palestinien. Le PNA (Palestinian National Authority) est le produit de ces accords.
Le plan visant à redéployer les troupes israéliennes autour de la Bande de Gaza est la dernière manifestation de la stratégie israélienne pour exclure l’OLP du processus de négociations. Le plan a été formulé sans référence ni consultation avec la PNA (et enfreint donc les stipulations de la Feuille de Route). En fait il y a eu un accord que les colonies israéliennes dans Gaza soient sous la responsabilité
de la Banque Mondiale. Cela démontre encore une fois la volonté des autorités israéliennes d’exclure le PNA pour mettre fin à la possibilité de souveraineté et pour essayer de passer la responsabilité pour Gaza à un organisme international (et en ce faisant, essayer d’abandonner la responsabilité israélienne qui, selon la loi humanitaire internationale, est évidente).
vi. faciliter l’expansion accélérée des colonies israéliennes en Cisjordanie, colonies qui sont illégales selon la loi humanitaire internationale
vii. prévenir le retour des réfugiés palestiniens ce qui est leur droit légal selon la loi internationale
viii. mettre fin aux demandes de la communauté internationale concernant les différentes résolutions au UNSC et UNGA.
Le PCHR affirme fermement que le plan revient à redéployer les forces israéliennes dans la Bande de Gaza, et signifiera la continuation de l’occupation militaire israélienne. De plus la présence continue du pouvoir occupant n’implique pas un transfert de souveraineté à un état palestinien. Cela illustre encore plus le fait que le plan israélien est un moyen pour détruire la portée et la capacité du peuple palestinien de construire un état indépendant tout en voulant créer l’illusion d’une fin à l’occupation.
Statut des territoires de la Palestine occupée
La Bande de Gaza et la Cisjordanie y compris Jérusalem Est, sont depuis 1967 sous une occupation belligérante israélienne. En conséquence, la Convention de Genève relative à la Protection des Personnes Civiles en Temps de Guerre (1949) qui régit la protection des civils pendant les conflits et sous occupation, est le cadre légal fondamental pour toutes les activités dans la Bande de Gaza et en Cisjordanie y compris Jérusalem Est.
L’applicabilité de jure de cette Convention aux territoires occupés a été maintes fois confirmé par la communauté internationale dont le forum des Nations Unies, les gouvernements, la Cour Internationale de Justice et les organisations internationales. Israël est le seul état du monde qui ne reconnaît pas l’applicabilité ’de jure’ de la Convention.
La Bande de Gaza a une surface de 365 km². Elle a une frontière avec l’Egypte de 11 km et une autre avec Israël de 51 km. Ces frontières ainsi que la façade côtière (45km) sont contrôlées par Israël. L’armée israélienne a établi une barrière électronique autour des terres frontalières de la Bande de Gaza et continue à agrandir une zone tampon de terre dégagée entre la barrière et les zones palestiniennes.
Plus de 1.3 millions de palestiniens vivent dans la Bande de Gaza, pour la plupart des réfugiés de 1948. Depuis les accords d’Oslo, Israël a pris le contrôle direct de 58% de la Bande de Gaza pour une utilisation exclusive militaire et pour des colons, y compris des colonies, des postes militaires, des routes et des zones tampons dont le but est de protéger les colonies. Environ 6.000 colons vivent actuellement dans 19 colonies dans la Bande de Gaza. Alors que la politique israélienne de raser et de confisquer des terres continue, la surface de terres qui est de facto sous contrôle israélien continue à croître.
L’armée israélienne coupe régulièrement la Bande de Gaza en trois secteurs distincts utilisant des check-points militaires pour fermer des routes au nord, au centre et au sud de la Bande. Cela signifie que l’armée exerce en fait un contrôle sur les déplacements de toute la population civile palestinienne de la bande de Gaza. A côté de cela, un certain nombre de zones dont Mawasi et al-Sayafa sont complètement isolées du reste de la Bande de Gaza et les accès sont contrôlés par les check-points militaires.
Malgré la présence de barrières électroniques autour de la bande de gaza, les opérations militaires dans la Bande de Gaza ont augmenté depuis septembre 2000. Les opérations militaires sont caractérisées par des incursions régulières et répétées au sol et par des attaques aériennes sur des zones résidentielles au nord, au centre et au sud de la Bande de Gaza.
L’existence de ces barrières électroniques est utilisée comme modèle pour justifier la construction du Mur d’Annexion en Cisjordanie- mais l’échec de ce modèle de « sécurité » est clairement démontré par l’escalade des incursions dans des zones résidentielles de la Bande de Gaza. En plus de leur intention d’annexer de grandes parties de la Cisjordanie, les autorités israéliennes pourront imposer le même régime d’asphyxie économique et sociale en Cisjordanie sous le prétexte de « souci de sécurité ».
La Bande de Gaza : Contrôle de la terre, de la mer et des airs par les forces d’occupations israéliennes
A partir des détails donnés dans le plan, il est évident que si celui-ci est mis en œuvre, la bande de Gaza restera effectivement sous le contrôle économique et social d’Israël y compris à travers une présence permanente interne et dans toutes les zones frontalières.
Le plan prévoit spécifiquement qu’Israël va « transférer les installations militaires et tous les villages et villes israéliennes situées dans la Bande de Gaza »5 et garder certain postes et bases militaires internes. Le plan prévoit également :
« Qu’Israël continuera à maintenir une présence militaire le long de la frontière entre la bande de Gaza et l’Egypte (route Philadelphi)…à certains endroits des considérations de sécurité peuvent nécessiter un élargissement de la zone dans laquelle l’activité militaire est menée »
Ainsi non seulement la présence militaire continuera mais elle va également s’étendre. Des annonces récentes concernant la construction d’une tranchée le long de la ligne frontalière souligne l’inquiétude par rapport à l’extension de la présence militaire israélienne dans la zone.
Cette zone du camp de réfugiés de Rafah le long de la frontière avec l’Egypte est l’une de celles où l’activité militaire israélienne a été la plus fréquente, en grande partie sous la forme de destruction de maisons civiles. Les terrains ont été déblayés des maisons civiles dans une large zone tampon parallèle à la ligne frontière. La zone tampon s’étend jusqu’à 200 mètres de la ligne frontière originale, résultant de la destruction de centaines de maisons de réfugiés. Cette zone tampon est maintenant une « zone d’activité militaire » dans laquelle les palestiniens n’ont pas le droit d’entrer.
5 Les « villages et villes » auquel on se réfère sont en fait les colonies israéliennes qui constituent une grave infraction de la loi humanitaire internationale. Réf. article 49, paragraphe 6 de la Quatrième Convention de Genève sur le transfert de personnes dans un territoire occupé.
6 « Un élargissement de la zone dans laquelle l’activité militaire est menée » peut être compris comme la démolition de propriétés civiles y compris de maisons, de terres agricoles, d’écoles, de terrains de jeux pour enfants, d’entreprises etc.
7 Voir Harel, Amos, « IDF Plans to Build Trench Along Philapelphi Road », Ha’aretz, 28 avril 2004 sur : www.haaretz.com
Il est en plus affirmé explicitement dans le plan qu’Israël gardera le contrôle de l’espace aérien, côtier et toutes les terres frontalières. La lettre du président des Etats-Unis sur le plan, déclare que :
« …après le retrait d’Israël de Gaza et/ou de parties de la Cisjordanie et en attendant les accords ou autre arrangements, des arrangements existants concernant le contrôle de l’espace aérien, des eaux territoriales et des points de passages à terre de la Cisjordanie et de Gaza, continueront ».
La décision des autorités israéliennes d’empêcher la réouverture de l’Aéroport International de Rafah démontre leur intention d’empêcher la liberté de mouvement de personnes, de services et des biens aller retour dans la Bande de Gaza.
En plus de cela, les pêcheurs palestiniens ne pourront pas naviguer au-delà d’une zone de 8 à 10 km le long de la côte de Gaza qui est contrôlée par des patrouilles de la marine israélienne.9 Les pêcheurs ont également été empêchés de naviguer le long de plus de la moitié des eaux territoriales de la Bande de Gaza. Cela empêche aussi les palestiniens d’avoir accès aux ressources de gaz naturel dans leurs eaux territoriales.
En combinant ceci avec la destruction de l’aéroport international à Gaza (et le refus à la demande égyptienne de permettre sa reconstruction) cela devient évident que le pouvoir occupant augmentera le niveau de l’asphyxie économique et social de la vie dans la Bande de Gaza.
En parallèle à ce « plan de désengagement », Israël a fait une demande à la Banque Mondiale pour déménager le point de passage international de Rafah à l’intérieur du territoire israélien. Malgré le fait que l’Egypte (dont le consentement est requis) s’oppose au plan, le but d’Israël est de revendiquer un contrôle total légal et militaire sur le passage des marchandises et des personnes palestiniennes.
Si cette stratégie réussit, les bouclages, les difficultés et les humiliations que subissent les palestiniens seront sous la souveraineté d’Israël et ne seront pas soumis aux observations de la communauté internationale. En fait, le déplacement du point de passage de Rafah sera le dernier acte pour isoler la Bande de Gaza du reste du monde.
Des restrictions plus sévères s’appliqueront sur les exportations de produits agricoles et autres venant de Gaza car l’armée d’occupation maintiendra un contrôle sur toutes les frontières et les points de passage. En même temps, Israël s’est engagée à mettre un terme à l’entrée de travailleurs palestiniens en Israël d’ici 2008.
Néanmoins le bouclage strict imposé au check-point militaire d’Erez au nord de Gaza, signifie déjà que ces travailleurs n’ont quotidiennement pas accès à leur lieu de travail. Cette asphyxie constante de la croissance économique et sociale de la Bande de Gaza augmentera si le plan proposé est mis en route.
8 L’utilisation du mot ’retrait’ dans la lettre de Bush montre la disparité entre la rhétorique et la réalité de ce plan. Le plan ne facilite pas le « retrait » mais au contraire consolide l’occupation.
9 Depuis le début de l’Intifada jusqu’à la fin de l’année 2003, les pêcheurs n’ont pas eu accès à la mer pendant 600 jours.
La Bande de Gaza est une zone isolée et occupée qui dans les meilleures circonstances, commerce en utilisant les aéroports égyptiens de Port Saïd et du Caire.10 Sous le « plan de désengagement » cela va devenir de plus en plus difficile, surtout si le passage international de Rafah est déplacé.
L’effet de cette asphyxie économique sera d’augmenter la souffrance des palestiniens tout en colportant l’illusion de retrait à la communauté internationale. La souffrance économique croissante aura de multiples effets. En premier, cela conduira des centaines de milliers de palestiniens hors de la Bande de Gaza de façon permanente.
Ensuite, pour les palestiniens qui resteront à Gaza, la vie deviendra pratiquement intenable. Ce niveau de souffrance forcera une réaction politique inévitable et plus important, une réaction militaire de la part de certains éléments de la société palestinienne. Une telle réaction donnera une justification de plus à Israël pour augmenter le niveau de l’activité militaire (qui se manifeste sous diverses formes d’infractions de la loi humanitaire : punitions collectives, exécutions extrajudiciaires, attaques disproportionnées et aveugles contre des civils).
Le plan pourvoit à cette éventualité quand il spécifie qu’Israël gardera le droit d’entreprendre des actions militaires dans la bande de Gaza :
« Israël se réserve les droits fondamentaux d’autodéfense y compris de prendre des mesures préventives ainsi que de répliquer en utilisant la force à toutes menaces en provenance de la Bande de Gaza ».
En fait, selon le plan publié à ce jour, le statut de la Bande de Gaza en tant que territoire occupé, ne changera pas : article 42 de la Convention IV concernant le Respect des Lois et Coutumes de Guerre sur Terre, 1907 (Convention de la Haye 1907) qui déclare clairement :
« Un territoire est considéré comme occupé quand il est de fait placé sous l’autorité d’une armée hostile. L’occupation ne se prolonge que sur le territoire ou une telle autorité a été établie et peut s’exercer ».
Israël soutient que ce plan servira à « dissiper les revendications concernant la responsabilité d’Israël envers les palestiniens de la Bande de Gaza ». La politique d’Israël et ses pratiques démontrent qu’Israël conserve une autorité effective sur la Bande de Gaza et les détails du plan de désengagement indiquent fortement que cette autorité n’est pas prête à diminuer mais plutôt à augmenter.
En tant que telle, l’occupation de la Bande de Gaza va continuer même dans l’éventualité d’une mise en œuvre de ce plan et la Quatrième Convention de Genève restera inapplicable. La Convention, article 6, spécifie que le pouvoir occupant sera lié à la Convention tant que l’occupation dure.
10 Port Saïd est à environ 275 km de Rafah Les civils palestiniens devront voyager le long de Gaza, attendre au point de passage de Rafah pour que l’armée israélienne facilite leur passage, puis parcourir cette distance à travers le désert avant de pouvoir atteindre Port Saïd. Les marchandises agricoles, généralement périssables, seront détruites par un tel voyage et ainsi toute exportation de marchandises venant de Gaza deviendra impossible.
Même si ce plan est mis en route, Israël sera toujours le pouvoir occupant avec des obligations claires et étendues vis-à-vis de la population civile palestinienne dans les territoires occupés qui continuera à être définie comme des personnes protégées sous l’article 4 de la Quatrième Convention de Genève.
« Les personnes protégées par la Convention sont celles qui, à un moment donné et en quelque façon que ce soit, se trouvent en cas de conflit ou d’occupation, aux mains d’un Parti au Conflit ou de Pouvoir occupant dont ils ne sont pas citoyens ».
Annexion illégale de territoire occupé
Le programme de colonisation dans les territoires occupés : les colonies, les postes avancés de colonies, les infrastructures des colonies y compris les postes militaires sont une violation flagrante de la loi humanitaire internationale. Le transfert d’une partie de la population en particulier par le pouvoir occupant vers un territoire occupé est une infraction grave de la Quatrième Convention de Genève et est défini en plus de crime de guerre selon l’article 85 du Premier Protocole Additionnel des Conventions de Genève.
Les colonies contredisent le principe général de la loi internationale disant qu’un pouvoir occupant ne peut pas altérer le caractère du territoire occupé à l’exception de raisons de nécessité militaire et seulement lorsque de tels changements sont susceptibles de bénéficier à la population occupée.
Le programme de colonisation israélien y compris les politiques et pratiques mises en œuvre afin de maintenir ce programme, ne bénéficie ni à la population palestinienne ni ne peut être considéré comme nécessité militaire. Le fait que les colonies procèdent à une grave infraction de la loi humanitaire internationale et relèvent de crime de guerre, a été réitéré maintes fois par de nombreux organismes internationaux et inter-gouvernementaux y compris par les Nations Unies.
Néanmoins le « plan de désengagement » confirme explicitement les intentions du gouvernement israélien en ce qui concerne l’annexion illégale de terres palestiniennes en Cisjordanie.
« Il est évident qu’en Cisjordanie, il y a des zones qui deviendront une partie de l’état d’Israël, y compris des villes et des villages, des zones de sécurité et d’installations et d’autres lieux représentant un intérêt particulier pour Israël ».
Cette dernière expression des buts annexionnistes d’Israël est appuyée par la déclaration du président des Etats-Unis :
« A la lumière des nouvelles réalités sur le terrain y compris les centres majeurs de population israélienne qui existent déjà, il est irréaliste d’escompter que l’issue des négociations finales soit un retour total et complet aux lignes d’armistice de 1949. »
11 Beaucoup des colonies de la Cisjordanie sont construites afin de contrôler les points stratégiques comme l’alimentation en eau qui sont dénié aux palestiniens. C’est le genre de chose à laquelle on se réfère en utilisant le terme de « lieux représentant un intérêt particulier pour Israël ».
Le « Mur d’Annexion » d’Israël qui est actuellement en construction en Cisjordanie, est la manifestation la plus importante de la politique d’annexion d’Israël. Le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur les territoires occupés, John Dugard, a déclaré récemment : « …le but principal du Mur est l’annexion de facto, de terres supplémentaires pour l’état d’Israël » .
Le plan pourvoit à l’accélération de la construction du Mur d’Annexion israélien. Israël a prétendu, y compris dans ce plan, que le Mur est :
« .. une sécurité plutôt qu’une barrière politique, temporaire plutôt que permanent et ne sera donc pas préjudiciable à quelque issue que ce soit sur le statut final, y compris pour les frontières définitives ».
De telles déclarations sont néanmoins contradictoires avec les faits sur le terrain : le Mur est en train d’être construit non pas sur la Ligne Verte (la frontière de 1967) mais en grande partie à l’intérieur de la Cisjordanie ; sa construction est actuellement estimé à un coût d’environ 4.7 $ millions par kilomètre 13, la construction inclut la destruction de larges secteurs de terres agricoles et de récoltes palestiniennes, de destruction de maisons, d’infrastructures et équipements civils ; le Mur se compose d’une structure de béton de 8 mètres de haut, de tranchées, de barrières électriques, d’écrans de contrôle sophistiqués et de routes.
Le Mur n’est pas supposé être une barrière temporaire et il n’est pas non plus construit pour des raisons de sécurité. L’adjoint du procureur général israélien, Malchiel Balass, a été cité dans le Ha’aretz disant que même s’il y avait un fin à l’infiltration de groupes militants palestiniens en Israël, le gouvernement israélien ne « démonterait que certaines sections » du Mur14. Cela démontre bien que le gouvernement israélien a bien l’intention d’ériger le Mur en tant que structure permanente.
La stratégie derrière le « plan de désengagement » est liée étroitement à celle derrière le Mur d’Annexion.
Le plan israélien est de redéployer de 4 colonies de la Cisjordanie. Mais cela va avec une large annexion de grandes parties de la Cisjordanie et l’effet sera d’imposer le même régime restrictif, comme celui qui existe à Gaza, sur les ’bantoustans’ palestiniens de la Cisjordanie : des restrictions sur la liberté de mouvement, le déni du droit à la nourriture et à l’eau, la destruction de la vie culturelle et sociale, imposition de traitements cruels, inhumains et dégradants (surtout aux check-points), éradication des chances de travail et d’éducation.
Israël privilégie ses considérations politiques et militaires en outrepassant la loi humanitaire internationale. Cela est démontré par la condamnation venant du ministère de la défense en réponse aux commentaires du procureur général israélien disant qu’Israël devrait « examiner à fond » la possibilité d’appliquer la Quatrième Convention de Genève ’de jure’.
Il a été répliqué au procureur général que son département ne comprenait pas les questions de « défense et de sécurité ». Le rejet israélien de l’applicabilité de la Quatrième Convention de Genève et du ICCPR et ICESCR est motivé par un désir d’affirmer un contrôle israélien absolu sur le statut légal et politique des territoires palestiniens occupés.
12 Voir le document des Nations Unies E/CN.4/2004/6/Add.1. 27 février 2004.
13 9 novembre 2003, OCHA, relevé de faits.
14 Ha’aretz, 25/08/2004 par Yuval Yoaz.
15 Tous ceux-là sont des infractions à la Déclaration Universelle des Droits Humains (articles 5, 17, 23, 25, 26,27) et aux dérivés des Conventions et Déclarations qui lui sont associés.
Alors qu’Israël insiste sur son droit à déterminer le futur légal des territoires occupés à travers l’abandon du processus de négociations et de partenariat, il s’ensuit qu’Israël garde un contrôle légal total sur les territoires occupés (malgré ses tentatives de nier une telle responsabilité à travers son affirmation de « retrait »).
A cause de ses allusions au « retrait », le « plan de désengagement » a détourné l’attention sur la mise en œuvre du jugement consultatif de l’ICJ contre le Mur. Le plan a créé un espace pour l’armée israélienne et pour les autorités politiques afin d’accélérer la construction du Mur et en ce faisant, amener encore plus de faits accomplis sur le terrain. Comme cela a été dit plus tôt, la justification de « sécurité » pour la construction du mur a été totalement miné par l’échec du modèle de sécurité de Gaza. La clé du but de la stratégie réside en l’assurance de l’annexion de territoires et pour faciliter l’asphyxie économique et sociale de la Cisjordanie.
Réfugiés
En tant que composant à plus long terme de ce plan, Israël et les Etats-Unis sont arrivés à un accord sur le problème des réfugiés. Le président des Etats Unis a déclaré dans sa lettre au premier ministre israélien, que :
« Cela semble évident qu’un cadre approuvé, juste, équitable et réaliste pour une solution au problème des réfugiés palestiniens faisant partie d’un accord sur un statut final devra être trouvé à travers la création d’un état palestinien et l’installation des réfugiés palestiniens là plutôt qu’en Israël ».
Le droit au retour pour ceux qui ont été exilé par la force hors de leurs maisons est garanti par la loi internationale. L’Article 12.4 de la Convention sur les Droits Civils et Politiques, dont Israël est un état signataire, prévoit spécifiquement que : « Personne ne doit être privé arbitrairement du droit d’entrer dans son propre pays ». Cela a été interprété d’une façon générale par le Comité des Droits Humains des Nations Unies pour comprendre :
« …tout au moins, une personne qui, à cause de ses liens spéciaux ou de ses revendications en relation avec un pays donné, ne peut pas être considéré comme un simple étranger. Cela serait par exemple le cas de citoyens d’un pays qui ont été dépouillé de leur nationalité en violation de la loi internationale, et d’individus dont le pays de nationalité a été incorporé ou transféré à une autre entité nationale, dont la nationalité leur est déniée »16.
Ainsi, l’intention d’Israël d’installer les réfugiés palestiniens en dehors du pays duquel ils ont été exilés, est contraire aux droits fondamentaux des réfugiés, y compris le droit à une compensation et celui de choisir de se réinstaller soit dans le pays duquel ils ont été exilés soit ailleurs.
16Commentaire Général du Comité sur les Droits Humains, #27 (1999), paragraphe 20.
Conclusion
Ce plan proposé par le premier ministre israélien est une tentative pour circonvenir les obligations légales absolues d’Israël en tant que pouvoir occupant. Les autorités israéliennes, soutenues par les Etats-Unis, se proposent d’engager un déplacement unilatéral qui niera le droit au retour, continuera les activités militaires illégales, continuera le siège et bouclage des territoires occupés, augmentera l’asphyxie sociale et économique des civils palestiniens et exercera un contrôle sur tous les aspects de la vie palestinienne. En tant que tel, cette initiative est totalement contraire aux droits humains internationaux et à la loi humanitaire.
Etant donné que cette initiative mine sape les obligations légales fondamentales comme définies dans la loi humanitaire internationale et la loi des droits humains, un soutien pour ce plan venant d’autres états, surtout des Etats Unis, soulève de sérieuses questions quant à leurs propres obligations légales, particulièrement en tant que Haute Partie Contractante de la Quatrième Convention de Genève.
L’Article 1 de la Convention confère une obligation absolue à toutes les Hautes Parties Contractantes de respecter et de garantir que la Convention soit respectée. Vis-à-vis des territoires occupés, cela oblige les Hautes Parties Contractantes de garantir qu’Israël respecte la Convention et qu’elles la respectent elles-mêmes dans leurs activités ayant rapport avec les territoires occupés. Ne pas s’assurer qu’Israël respecte la Convention représente une infraction vis-à-vis de cette obligation.
Une infraction supplémentaire peut se produire quand un état soutient activement les violations par Israël de la Convention, y compris celles commises dans le contexte du « plan de désengagement ».
Le PCHR appelle les Hautes Parties Contractantes à la Convention à demander une résolution à la situation dans les territoires occupés qui soit fondée sur la loi internationale, y compris à travers l’application des dispositions de la Quatrième Convention de Genève tant que l’occupation continue.
Une paix juste et durable dans cette région ne peut aboutir que quand elle est basée sur l’accomplissement des droits offerts à la population civile palestinienne selon la loi internationale, y compris les droits des réfugiés, la non admissibilité de l’acquisition de territoire par la force et le droit à l’autodétermination.
Recommandations du PCHR à la Communauté Internationale, à propos du « plan de désengagement » :
(i) une complète application de la Quatrième Convention de Genève dans les Territoires Occupés, y compris après un redéploiement des forces israéliennes
(ii) une fin immédiate de l’étouffement économique et social de la bande de Gaza, par le respect d’une pleine souveraineté sur l’air, la mer et l’espace
(iii) l’application de l’avis formulé par la Cour Internationale de Justice concernant le Mur d’Annexion, lequel est construit de façon préventive contre le développement économique et pour étrangler la Cisjordanie, en parfaite concordance avec le « modèle de Gaza »
(iv) un authentique et complet transfert de souveraineté au Peuple Palestinien et l’établissement d’un Etat Palestinien indépendant
(v) l’inclusion des droits humains internationaux et des lois humanitaires internationales comme élément de tout règlement final concernant le futur de la Palestine.