L’Autorité palestinienne condamne la visite du ministre, qui, selon l’opposition israélienne et le Hamas, pourrait conduire à une escalade dangereuse.
Le ministre israélien de la Sécurité nationale, d’extrême droite, , Itamar Ben-Gvir, a pénétré mardi sur l’’esplanade de la mosquée Al-Aqsa, à Jérusalem-Est occupée, ce qui ne manquera pas d’attiser les tensions.
Une vidéo publiée sur les médias sociaux montre M. Ben-Gvir visitant l’esplanade accompagné d’un important dispositif de sécurité.
Lundi, le mouvement palestinien Hamas a averti Israël qu’il "ne resterait pas les bras croisés" si le nouveau ministre de la Sécurité se rendait à la mosquée Al-Aqsa, comme il a promis de le faire dimanche.
Après sa visite mardi, Ben-Gvir a déclaré : "Notre gouvernement ne cèdera pas aux menaces du Hamas .
"Le Mont du Temple est le lieu le plus important pour le peuple d’Israël", a-t-il ajouté, en utilisant le nom juif du site.
"Nous maintenons la liberté de mouvement des musulmans et des chrétiens, mais les juifs montent aussi sur le site, et ceux qui profèrent des menaces doivent être traités avec une main de fer."
La mosquée Al-Aqsa est l’un des sites les plus sacrés de l’islam à l’emplacement du temple juif détruit par les Romains en 70 de notre ère.
Depuis qu’Israël a occupé le site après la guerre du Moyen-Orient de 1967, la prière juive y est interdite, bien que des colons d’extrême droite comme Ben-Gvir (dont certains veulent démolir Al-Aqsa et la remplacer par un troisième temple juif) y aient fréquemment prié sous haute sécurité ces dernières années.
Le ministère des Affaires étrangères de l’Autorité palestinienne, dirigé par le Fatah, rival du Hamas, a déclaré dans un communiqué qu’il tenait le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour "responsable de ll’intrusion de Ben-Gvir sur Al-Aqsa et de ses conséquences".
Il a ajouté qu’il "condamne fermement l’assaut du ministre extrémiste Ben-Gvir contre la mosquée bénie d’Al-Aqsa et le considère comme une provocation sans précédent et une menace sérieuse" pour la stabilité régionale.
Lundi, Yair Lapid, que Netanyahu a remplacé la semaine dernière au poste de Premier ministre, a dénoncé la visite prévue, la qualifiant de "provocation délibérée" qui entraînerait la mort de personnes.
Lapid a exhorté Netanyahu à restreindre son nouveau ministre de la Sécurité nationale.
Les premiers rapports des médias en hébreu indiquaient que Netanyahou et Ben-Gvir avaient convenu de reporter la visite. Toutefois, le parti Likoud de Netanyahou a nié qu’une telle demande ait été faite.
Réactions internationales
Les Émirats arabes unis, qui ont normalisé leurs relations avec Israël en 2020, ont publié une déclaration condamnant l’assaut d’Al-Aqsa.
"Les Émirats arabes unis condamnent fermement aujourd’hui l’intrusion sur l’esplanade de la mosquée Al-Aqsa par un ministre israélien sous la protection des forces israéliennes", indique le communiqué.
Ils ont appelé "les autorités israéliennes à assumer leur responsabilité pour diminuer l’escalade et l’instabilité dans la région".
Les EAU ont également "souligné la nécessité de soutenir tous les efforts régionaux et internationaux visant à faire avancer le processus de paix au Moyen-Orient, à mettre fin aux pratiques illégales qui menacent la solution des deux États et à établir un État palestinien indépendant sur les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale".
Selon les médias israéliens, l’ambassadeur américain en Israël Thomas Nides a averti le gouvernement israélien qu’il devait maintenir le statu quo sur les lieux saints de Jérusalem. "Les actions qui empêchent ce statu quo sont inacceptables", aurait déclaré Nides à ses homologues israéliens.
Le ministère jordanien des Affaires étrangères a également convoqué l’ambassadeur d’Israël. "La Jordanie condamne dans les termes les plus sévères l’assaut de la mosquée Al-Aqsa et la violation de son caractère sacré", a déclaré le ministère.
La Jordanie est le gardien officiel des lieux saints chrétiens et musulmans de Jérusalem depuis 1924. Même après avoir renoncé à sa revendication de souveraineté sur la Cisjordanie occupée en 1988, la Jordanie n’a jamais abandonné la garde des lieux saints de Jérusalem.
L’Arabie saoudite, qui, à la différence des Émirats arabes unis et de la Jordanie, n’entretient pas de relations ouvertes avec Israël, mais dont on dit qu’elle se rapproche d’une normalisation, a également critiqué la visite de M. Ben-Gvir : "L’Arabie saoudite condamne l’action provocatrice d’un responsable israélien qui a pris d’assaut l’esplanade de la mosquée al-Aqsa".
Dans le même temps, l’ambassade de France en Israël a appelé à la "préservation du statu quo des lieux saints de Jérusalem. Tout geste visant à le remettre en cause comporte un risque d’escalade et doit être évité."
Changer le statu quo
Le porte-parole du Hamas, Abd al-Latif al-Qanua, a déclaré lundi que la visite prévue était "un autre exemple de l’arrogance du gouvernement des colons et de leurs futurs plans pour endommager et diviser la mosquée Al-Aqsa".
"La résistance palestinienne ne permettra pas au gouvernement d’occupation néo-fasciste de franchir les lignes rouges et d’empiéter sur notre peuple et nos lieux saints."
Le sixième gouvernement de Netanyahou, l’administration la plus à droite de l’histoire d’Israël, a déclaré que sa principale politique directrice sera que "le peuple juif a un droit exclusif et indiscutable sur toutes les zones de la Terre d’Israël", faisant référence au concept de "Grand Israël" qui comprend la Cisjordanie occupée, Jérusalem-Est et d’autres terres étrangères.
Ce n’est pas la première fois que Ben-Gvir s’introduit sur Al-Aqsa. En mai dernier, accompagné de sa femme et de son fils, Ben-Gvir a posté une photo appelant à la destruction du site pour "établir une synagogue sur la montagne".
Lorsque l’ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon s’est rendu sur le site en 2000, il a déclenché la deuxième Intifada, le soulèvement palestinien.
Selon les données compilées par Middle East Eye, les forces israéliennes ont tué plus de Palestiniens en Cisjordanie occupée en 2022 qu’au cours d’une seule année civile depuis la deuxième Intifada.
Au moins 220 personnes sont mortes dans des attaques israéliennes à travers les territoires occupés, dont 48 enfants. Sur le nombre total de morts, 167 étaient originaires de Cisjordanie et de Jérusalem-Est, et 53 de la bande de Gaza.
Cinq autres citoyens palestiniens d’Israël ont été tués au cours de la même période. Entre-temps, les Palestiniens ont tué au moins 29 Israéliens, dont un enfant, ce qui constitue le bilan le plus lourd depuis 2008.