"A la lumière des événements sanglants qui ont marqué la commémoration du troisième anniversaire du décès du chef historique du mouvement de libération de la Palestine, Yasser Arafat, il apparaît qu’on ne peut plus parler d’une lutte entre le Fatah [parti au pouvoir] et le Hamas [mouvement islamiste qui a pris le contrôle de Gaza le 15 juin]. En réalité, la confrontation oppose désormais les défenseurs du patriotisme palestinien à un groupe de fondamentalistes extrémistes qui bénéficie de soutiens au niveau régional et international nuisibles au peuple palestinien, à leur image et à leur cause", estime le quotidien palestinien Al-Ayyam, édité à Ramallah.
Lors du rassemblement de centaines de milliers de Palestiniens qui s’est tenu lundi 12 novembre, les militants du Hamas ont ouvert le feu, faisant 7 morts et 130 blessés. "Les participants au rassemblement d’hier ne pouvaient pas être tous des membres du Fatah ou des partisans d’Arafat. S’ils sont venus nombreux à cette commémoration, c’est pour exprimer leur appartenance à la nation palestinienne. C’est ce sentiment qui l’emportera face à l’islam politique, même si le prix est élevé", poursuit le journal, qui réclame une enquête sur le déroulement des événements pour "désigner les responsables et les traduire devant la justice".
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Par ailleurs, selon l’Orient le Jour
Le Hamas a lancé hier un vaste coup de filet dans les rangs du Fateh à Gaza, où un deuil a été observé au lendemain de la mort de sept personnes tuées par les miliciens islamistes. En outre, des analystes constatent que les méthodes musclées du Hamas et la détérioration de la situation économique suscitent une grogne populaire à l’égard du groupe islamiste au pouvoir à Gaza.
La vague d’arrestations du Hamas est intervenue plusieurs heures après la tenue, dans la ville de Gaza, de la plus grande manifestation depuis la création de l’Autorité palestinienne en 1994, organisée à l’occasion du 3e anniversaire de la mort du chef historique Yasser Arafat. Sept Palestiniens ont été tués et 130 blessés, dont des femmes et des enfants, par les tirs du Hamas lors de heurts qui ont éclaté alors que des centaines de milliers de manifestants se dispersaient. Des miliciens en civil ou en uniforme du Hamas ont tiré sur les manifestants, dont certains scandaient des slogans contre le mouvement et lançaient des pierres sur sa police.
Selon le porte-parole de la Force exécutive, la police du Hamas, environ 200 personnes ont été arrêtées. « Ceux qui ont été interpellés (...) sont les organisateurs de la manifestation », a affirmé à l’AFP Islam Chahwane. « Ils sont actuellement entre les mains de la Sécurité intérieure et rentreront chez eux probablement ce soir », a-t-il précisé, assurant que ces interpellations avaient été menées pour les besoins d’une « enquête » sur les « émeutes » de lundi. Le Hamas a assuré que ces arrestations n’étaient pas politiques mais dirigées contre ceux qui avaient « troublé l’ordre et la sécurité publique, semé le chaos et poussé aux émeutes ». Un porte-parole du Fateh à Gaza, Hazem Abou Chanab, a fait état de 400 arrestations de « membres et cadres » du parti.
Pour le directeur du centre de défense des droits de l’homme Damir, Khalil Abou Chamallah, « les arrestations de dirigeants du Fateh indiquent que le gouvernement du Hamas veut interdire toute activité du parti Fateh qui pourrait montrer sa force dans la rue et influencer la situation à Gaza ». Le chef de l’aile politique radicale du Hamas à Gaza, Mahmoud Zahar, a d’ailleurs appelé son mouvement à « prendre toutes les mesures nécessaires, en coopération avec les services de sécurité officiels, pour éviter que ces troubles ne se répètent ». Le président Mahmoud Abbas a, quant à lui, dénoncé les « crimes horribles commis par une bande de rebelles sous les yeux du monde entier ». La presse palestinienne a stigmatisé le « massacre » commis, selon elle, par le Hamas.
Hier, de nombreux magasins et écoles de la bande de Gaza sont restés fermés en signe de deuil. À Ramallah et à Bethléem, en Cisjordanie, environ 3 000 personnes ont manifesté à l’appel du Fateh et dénoncé le Hamas.
À la suite de ces événements, plusieurs analystes ont constaté que les méthodes musclées du Hamas et la détérioration de la situation économique suscitent une grogne populaire à l’égard du groupe islamiste, à Gaza. « La grande mobilisation d’hier (lundi) s’explique largement par le fait que les gens commencent à en avoir assez du Hamas », estime Abdelnasser Srour, professeur de sciences politiques à l’université al-Aqsa de Gaza. Affirmant que les voix les plus modérées au sein du Hamas « sont étouffées », il juge que le mouvement islamiste « ne jouit plus de la grande popularité dont il pouvait se targuer auparavant (...). On a l’impression que c’est une machine de peur et de terreur qui contrôle Gaza (...). Cela attise les haines ». Pour le politologue Naji Chourrab, le rassemblement « sans précédent » est une expression populaire « du rejet de la division, de la violence, de la logique de force et du blocus ». « Les gens n’ont pas participé parce qu’ils sont pro-Fateh, même si cela peut refléter une hausse de sa popularité et une baisse de celle du Hamas », ajoute-t-il. Moukhaimar Abou Saada, professeur de sciences politiques à l’université al-Azhar de Gaza, en convient. « C’est un message de colère des masses palestiniennes et des partisans du Fateh face aux divisions et de rejet des agissements des forces du Hamas à Gaza », explique-t-il.
Indépendamment des obédiences politiques des uns et des autres, le simple exercice du pouvoir par le Hamas l’expose à la vindicte publique. « Les gens sont confrontés aux difficultés économiques, au gel du versement des salaires et au bouclage. Sans réfléchir, ils imputent cela au Hamas car c’est lui qui est au pouvoir », souligne enfin Walid al-Moudallal, professeur de sciences politiques et d’histoire à l’Université islamique de Gaza.
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