L’agression aérienne inattendue menée la semaine dernière par Israël contre des sites militaires près de la capitale syrienne, a encore compliqué la situation régionale et internationale. Elle a fait naître des doutes sérieux quant aux intentions du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, qui est parti pour Pékin rencontrer les dirigeants chinois tout de suite après les raids menés vendredi et dimanche.
Le voyage de Netanyahou se déroule juste après que le président palestinien, Mahmoud Abbas, a conclu ses entretiens avec le président chinois, Xi Jinping. Celui-ci a révélé une proposition en quatre points pour la résolution du conflit qui dure depuis des décennies entre Palestiniens et Israéliens. Cette proposition accorde la souveraineté totale aux Palestiniens sur le territoire délimité par les lignes d’armistice de 67, avec Jérusalem-Est comme capitale de la Palestine. Elle souligne que c’est “un droit inaliénable du peuple palestinien et la clé de la résolution de la question palestinienne”. En même temps, la proposition en quatre points affirme : “le droit d’Israël à l’existence et ses préoccupations sécuritaires légitimes doivent être respectés”.
Que la proposition de la Chine, qui a également approuvé l’Initiative de Paix arabe de 2002 amendée, serve de catalyseur dans les négociations attendues, reste à démontrer. Des amendements ont été présentés à Washington lors de la visite d’une délégation de la Ligue arabe, afin de calmer les Israéliens.
Mais les motifs de l’agression israélienne contre la Syrie qui s’est faite, selon l’administration Obama, sans concertation préalable avec la Maison blanche, sont vus comme une tentative du gouvernement Netanyahou de remiser toute reprise des discussions entre Palestiniens et Israéliens et de focaliser toutes les attentions sur le soulèvement sanglant en Syrie.
Il paraît qu’au début du mois le Premier ministre israélien s’inquiétait parce que le Secrétaire d’Etat US, John Kerry, qui semblait décidé à concentrer ses efforts immédiats sur le conflit israélo-palestinien, “dérivait” vers la position de la Ligue arabe sur la solution à deux Etats.
Selon le quotidien israélien Haaretz, “les conseillers du Premier ministre n’apprécient guère l’annonce de la Ligue arabe. Netanyahou et ses conseillers considèrent qu’il aurait mieux valu que cette annonce ne fût pas faite”.
Israël est, dit-on, mécontent de l’annonce de la Ligue arabe, soulignant le nouvel amendement qui montre la volonté arabe de faire de “petites modifications” des lignes d’armistice d’Israël de 67. En d’autres termes, des échanges de terre “minimes”. Il y a actuellement plus de 500 000 Israéliens illégalement installés en Cisjordanie.
L’ancien Premier ministre Ehud Olmert et l’ancienne ministre des Affaires étrangères,Tzipi Livni, actuellement ministre de la Justice du gouvernement Netanyahou en charge du processus de paix, ont accepté dans le passé des échanges de terre sur 6 à 10 pour cent de la Cisjordanie occupée par Israël.
Et dans le passé, les Palestiniens auraient été prêts à échanger 1.9 pour cent de la Cisjordanie. Selon Haaretz, “Le fait que Kerry se soit tenu près du Premier ministre quatarien alors qu’il lisait la déclaration (sur les “petits changements” de la ligne d’armistice de 67) a ajouté aux soupçons des aides de Netanyahou envers Kerry”.
Les responsables de la Ligue arabe présents à Washington ont assuré à Kerry et au vice-Président Joe Bidden que la Ligue restait attachée au plan qu’elle avait proposé il y a plus de 10 ans, en 2002. Une fois l’accord signé, tous les Etats arabes se sont engagés à normaliser leurs relations avec Israël. Le président Obama a été informé de cette position pendant la visite qu’il a effectuée à Ramallah le mois dernier.
Le mécontentement affiché par Israël concernant l’initiative de la Ligue arabe l’a amené à lancer les attaques contre la Syrie afin de tenter de détourner l’attention internationale vers la présence en Syrie de caches de missiles iraniens destinés au Hezbollah, le groupe de combattants qui contrôlent les lignes d’armistice entre le Liban et Israël. Les dirigeants israéliens semblent avoir oublié que le Hezballah n’a eu aucune confrontation avec Israël depuis la guerre de 2006. Il convient donc de rejeter d’emblée cette exagération.
Bien que l’administration Obama n’ait pas de certitude sur le comportement qu’elle va adopter envers la Syrie, les raids israéliens flagrants de la semaine passée comportent d’énormes risques.
“Au lieu d’inciter Moscou à appeler au départ d’Assad, cela peut entraîner une plus grande sympathie des Arabes pour Assad et déclencher une plus grande implication de l’Iran et du Hezbollah,” d’après une dépêche de l’ Associated Press venue de Moscou”. En fait, la Ligue arabe a déjà dénoncé les deux raids aériens israéliens.
Avec la volonté évidente d’améliorer l’ambiance politique, la radio de l’armée israélienne a annoncé que Netanyahou venait de donner l’ordre de geler les offres de construction de nouveaux logements dans les colonies afin d’éviter de bloquer les efforts des Etats-Unis pour relancer les discussions de paix. Mais une réponse immédiate de Hagit Ofran, de la Paix Maintenant, a dévoilé la supercherie :
“Ceci n’est pas un gel de la colonisation, puisque les constructions continuent dans les colonies, mais on peut dire qu’il s’agit de retenue manifestée par Netanyahou qui ne veut pas être accusé par les Américains d’avoir causé l’échec de leurs efforts pour relancer les négociations avec les Palestiniens.”