Contexte
Le Centre communautaire d’Al-Bustan est une initiative volontaire, gérée par la communauté, qui offre un espace, des activités psychosociales, sportives, artistiques et culturelles à plus de 1000 enfants et femmes, ainsi qu’un espace pour accueillir des invités et des groupes de solidarité.
La cible du Centre communautaire d’Al-Bustan fait partie d’une vague de démolition qui touche le quartier d’Al-Bustan, comprenant près de 1000 maisons et 1500 personnes. Au cours des dernières semaines, plus de 20 maisons ont reçu des ordres de démolition à Al-Bustan, telles que celles de Abu Shasee, Odeh, Zeydani et Rweday. Quatre autres familles, Badran, Odeh, Baidoun et Rowady, comprenant 18 membres, ont également reçu des ordres de démolition.
Depuis le 7 octobre, trois maisons et une structure commerciale ont été démolies à Al-Bustan. Depuis cette date, la municipalité de Jérusalem a intensifié sa campagne de démolition en activant des ordres de démolition pour près de 20 familles dans le quartier d’Al-Bustan/Silwan. La municipalité a relancé des ordres de démolition qui étaient gelés depuis des années en raison de la réglementation de Cements. Cela fait partie de la campagne de la municipalité de Jérusalem pour forcer les habitants d’Al-Bustan à accepter le plan municipal de confiscation des terres et de construction d’un parc biblique.
La démolition massive d’Al-Bustan rendra plus de 100 familles, soit près de 1500 personnes, dont 360 enfants, sans abri.
Depuis le 7 octobre, le gouvernement israélien, la municipalité de Jérusalem et d’autres ministères exploitent la guerre à Gaza et intensifient leurs politiques d’expansion des colonies, de démolition de logements, d’isolement et de fermeture de Jérusalem, ainsi que des violations du droit à la liberté d’expression, des arrestations arbitraires et des détentions. Toutes ces actions résultent de la campagne militaire continue d’Israël contre Gaza. Collectivement, elles ont conduit à une grave détérioration des droits humains et des moyens de subsistance des Palestiniens vivant à Jérusalem-Est occupée, menaçant leurs libertés fondamentales et attaquant le tissu de leur vie quotidienne.
Le 21 juin 2010, le Comité local de planification et de construction de la municipalité de Jérusalem a annoncé l’approbation préliminaire d’un plan de développement qui, selon ses dires, nécessitera la démolition de 22 maisons dans le quartier d’Al-Bustan à Silwan.
Cependant, bien que l’annonce concerne la première phase du plan appelant à la démolition des maisons, il semble certain que plus de cinquante bâtiments supplémentaires seront démolis à Al-Bustan dans le cadre du développement en cours.
La décision de la municipalité confirme l’intention initiale de la municipalité de déplacer un segment supplémentaire de la population palestinienne de Jérusalem-Est pour faciliter le développement d’un parc national biblique, “le jardin du roi”.
Depuis 2004, les habitants du quartier de Silwan ont travaillé en étroite collaboration avec une équipe d’avocats, de planificateurs urbains et d’architectes qui ont présenté à la municipalité deux plans alternatifs, qui, s’ils étaient acceptés, ne nécessiteraient la destruction d’aucune maison.
La municipalité de Jérusalem a rejeté plusieurs fois les plans alternatifs et a insisté sur la démolition de l’ensemble du quartier. Le quartier de Silwan est situé au sud-est de la vieille ville de Jérusalem et est progressivement devenu le point focal d’efforts israéliens accrus pour s’implanter dans une zone abritant environ 55 000 habitants palestiniens.
Les habitants du quartier d’Al-Bustan à Silwan vivent dans un état d’incertitude depuis longtemps. En 1977, la municipalité de Jérusalem a approuvé un plan qui a qualifié une grande partie du quartier d’‘espace vert’. Depuis l’approbation de cette classification, la municipalité a systématiquement refusé les permis de construire ou d’aménagement dans le quartier.
Face à la croissance de la population et à la réalité de la rareté des terres causée par la politique israélienne de confiscation des terres, de nombreux Palestiniens n’ont eu d’autre choix que de se constricter dans cette zone en construisant de nouvelles maisons sur le terrain ou en ajoutant des extensions à des maisons existantes.
Alors que la « construction illégale » s’intensifiait dans les années 1990, les autorités israéliennes ont commencé à engager des actions juridiques contre plusieurs maisons. Une directive émise par la municipalité de Jérusalem en 2004 appelait à la destruction de 88 maisons à Al-Bustan pour permettre le développement et l’expansion d’un parc biblique et archéologique.
L’année suivante, la municipalité a commencé à mettre en œuvre la directive, en notifiant les résidents d’ordres de démolition et en les accusant de construction illégale. Plus tard dans l’année, deux maisons ont été démolies. Cependant, cédant à la pression locale et internationale, le maire de Jérusalem de l’époque, Uri Lupoliansky, a retiré la directive, permettant à la fois à la municipalité et aux résidents d’Al-Bustan de soumettre des plans d’aménagement alternatifs.
Le schéma de planification de la ville prévoit la saisie de 70 % des terres à Al-Bustan, dont la majorité sera utilisée pour faciliter le développement du “Parc national de la ville de David”, financé et géré par l’organisation coloniale El Ad. Le plan alternatif présenté par les résidents d’Al-Bustan était conçu autour de leurs maisons et garantissait qu’ils reçoivent les services nécessaires. En 2008, le plan des résidents a été rejeté par la municipalité, qui a indiqué son intention de continuer avec le développement d’un parc national.
L’ancien maire de Jérusalem, Nir Barkat, a cherché à revitaliser le plan de la ville en 2009, mais a de nouveau été confronté à une pression locale et internationale croissante. En conséquence, il a accepté de consulter la communauté locale, qui a à nouveau présenté un schéma de planification alternatif.
Le deuxième plan présenté par la communauté était dirigé par le Dr. Yosef Jamboree en consultation avec les résidents d’Al-Bustan, pour le développement et le Comité d’Al-Bustan. Il visait à prévenir la démolition des maisons dans le quartier tout en préservant celui-ci pour un développement futur.
Le plan présenté à la municipalité visait à garantir la ‘légalisation’ de tous les bâtiments à Al-Bustan, dont plusieurs avaient été construits avant 1967. De plus, il cherchait à promouvoir le développement économique, à fournir un espace vert adéquat et à préserver les atouts et caractéristiques naturelles du quartier. Le plan comprend des dispositions pour créer des bâtiments publics, des espaces ouverts, des logements, un soutien au tourisme, une infrastructure commerciale et touristique, ainsi que des routes adéquates et des espaces de stationnement.
Le plan de la municipalité de Jérusalem étend le quartier d’Al-Bustan à l’est de la route Ras Al Bustan. Le plan crée une séparation claire entre l’est et l’ouest du quartier. Le secteur ouest se rapporte à la première phase du plan de la municipalité annoncé plus tôt dans la semaine et est destiné à permettre la création du parc touristique. Le parc sera ensuite lié à “Ir David”, le parc archéologique existant. L’annonce de la municipalité selon laquelle 22 maisons devront être démolies pour faciliter ce plan ne correspond pas à la réalité géographique.
Analyse Juridique Internationale
En plus des questions humanitaires liées à la démolition du logement d’une famille, des questions juridiques significatives se posent. Selon le droit international, Jérusalem-Est est considérée comme un territoire occupé et la communauté internationale n’a jamais reconnu l’annexion de cette zone par Israël. Par conséquent, Israël ne dispose que de pouvoirs temporaires d’administration et ne peut pas imposer le droit israélien domestique.
Dans un territoire occupé, les résidents palestiniens de Jérusalem-Est sont des Personnes Protégées, comme défini dans l’article 4 de la Quatrième Convention de Genève. La responsabilité globale d’une puissance occupante vis-à-vis des Personnes Protégées est énoncée dans l’article 29 de la Quatrième Convention de Genève. Le droit international humanitaire impose d’importantes obligations à Israël à l’égard des Personnes Protégées, y compris des dispositions garantissant, entre autres, le respect du droit à la vie, à l’honneur familial, à la propriété privée, ainsi que des convictions, pratiques et coutumes religieuses, ce qui constitue une violation grave de la Quatrième Convention de Genève.
Transfert Forcé de la Population Occupée
Silwan illustre comment les autorités municipales ont utilisé l’outil de la planification urbaine pour déplacer systématiquement les résidents palestiniens de Jérusalem-Est. Le droit international humanitaire conventionnel et coutumier interdit la déportation ou le transfert forcé de Personnes Protégées depuis ou au sein d’un territoire occupé. L’article 49(1) de la Quatrième Convention de Genève établit cette interdiction indépendamment du motif du transfert.
La véracité du régime de planification israélien et sa carence aiguë en logements ont créé des conditions de vie exceptionnellement difficiles pour les résidents palestiniens de Jérusalem-Est. Face à cette réalité sévère, les résidents palestiniens se trouvent avec peu d’options pour répondre aux besoins en logement de leurs familles croissantes. En tenant compte des divers facteurs influençant cette décision, y compris les coûts associés et les délais excessifs, il n’existe que deux options "viables" pour les résidents palestiniens : quitter les limites municipales pour des zones où plus de terres sont disponibles pour la construction palestinienne, ou construire une maison supplémentaire sur leur propriété ou ajouter une extension à leur maison existante sans le permis de construire obligatoire.
À la lumière de ce qui précède, la Coalition Civique appelle la communauté internationale à veiller à ce qu’Israël respecte ses obligations légales en tant que puissance occupante :
- À engager leurs obligations légales en tant que puissance occupante et à annuler la mise en œuvre de tout ordre de démolition concernant le quartier d’Est Jérusalem de Silwan ;
- À cesser immédiatement la destruction de biens palestiniens à Jérusalem-Est et la déportation ou le transfert de tout Palestinien de la Cisjordanie ou à l’intérieur de la Cisjordanie, comme l’exigent les articles 53 et 49(1) de la Quatrième Convention de Genève ;
- À reconnaître sa compétence législative et administrative comme défini dans l’article 43 des Règlements de La Haye de 1907 et l’article 64 de la Quatrième Convention de Genève.
Aux Nations Unies et à la Communauté Internationale :
En tant que Parties Haute Contractantes à la Convention de Genève de 1949, à remplir leurs obligations en vertu de l’Article commun 1, à respecter et à garantir le respect des dispositions des Conventions dans toutes les circonstances en prenant des mesures appropriées pour contraindre Israël à respecter ses obligations en vertu du droit international humanitaire.
À l’Union Européenne :
- Pour que les États membres utilisent efficacement les lignes directrices de l’Union Européenne sur la promotion du respect du droit international humanitaire (2005/C327/04) afin de garantir qu’Israël respecte les normes pertinentes du droit humanitaire selon le paragraphe 16(b), (c) et (d).
- Pour prendre des mesures sérieuses, telles que des sanctions.
Civic Coalition for Palestinian Rights in Jerusalem
Photo : Démolition dans le quartier d’Al Bustan © Sources locales