Photo : Les tanks israéliens envahissent Jénine pour la première fois depuis 2000, le 23 février 2025 © Quds News Network
Plusieurs ONG, dont l’Association France Palestine Solidarité (AFPS), ont lancé la pétition « Fin de l’occupation du territoire palestinien : la France doit agir ! », qui demande à Paris de se conformer à la résolution votée à l’Assemblée générale des Nations unies en septembre dernier. Ce texte réaffirme le droit à l’autodétermination du peuple palestinien.
Comment analysez-vous ce qui est en train de se passer en Palestine, à Gaza et en Cisjordanie ?
Après avoir violé la trêve et continué le génocide à bas bruit en bloquant l’aide humanitaire, en coupant l’énergie, en assassinant chaque jour des Palestiniens dans toute la Palestine occupée, Israël vient de reprendre les massacres à grande échelle.
La responsabilité de la France et de l’Union européenne (UE) est immense. Par leur inaction, elles se rendent complices des crimes d’Israël. Ce n’est que la continuité de ce qui se passe depuis malheureusement trop longtemps. Israël a perpétré un génocide à Gaza pendant quinze mois et poursuit son action en Cisjordanie dans un silence absolu de la communauté internationale. Tel-Aviv s’est même vanté d’avoir déplacé de force 40 000 réfugiés des camps de Jénine et de Tulkarem sans que ça ne suscite la moindre réaction de nos États, que ce soit la France ou ceux de l’Union européenne.
Ils avaient pourtant la possibilité de marquer leur opposition à ces violations du droit, le 24 février, lors de la réunion du Conseil d’association qui lie l’Union européenne à Israël. Pis, la conclusion de cette réunion du Conseil d’association est que rien ne change. Les accords commerciaux entre Israël et l’UE sortent renforcés. Pourtant, l’article 2 conditionne cet accord au respect du droit international et des droits humains. Il aurait dû être appliqué. Cet accord aurait dû être suspendu.
On voit beaucoup Emmanuel Macron s’agiter sur la scène internationale en ce moment pour parler de l’Ukraine. Il doit coprésider, en juin, avec l’Arabie saoudite, une conférence internationale à l’ONU pour l’application du droit et des résolutions en ce qui concerne la Palestine. Mais il n’a pas un mot sur la Palestine, alors que le droit y est violé tous les jours et que le peuple palestinien est livré à lui-même.
Quel est le sens de la campagne lancée pour demander à la France d’appliquer les résolutions de l’ONU ?
L’AFPS, avec la plateforme des ONG françaises pour la Palestine ainsi que la Fédération internationale des droits humains (FIDH) et la Ligue des droits de l’homme (LDH), a interpellé la France et particulièrement son premier ministre, auquel nous avons écrit il y a un mois pour lui demander d’appliquer la résolution que la France a votée, ainsi que 123 autres pays, le 18 septembre 2024. Cette résolution s’appuie sur un avis demandé par le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, en décembre 2022. Cet avis portait sur le statut et les conséquences de l’occupation prolongée du territoire palestinien depuis 1967.
La Cour internationale de justice (CIJ) avait conclu que l’occupation du territoire palestinien est illégale et qu’Israël doit y mettre fin dans les plus brefs délais et donc que la colonisation doit cesser, les colonies être démantelées et les colons évacués. La CIJ avait également rappelé le droit à l’autodétermination du peuple palestinien sur ce territoire.
L’Assemblée générale des Nations unies, le 18 septembre dernier, a donc traduit dans une résolution l’avis de la CIJ. Et elle l’a précisé, notamment, en fixant un délai de douze mois à partir du vote de la résolution ; 124 pays ont voté pour qu’Israël mette fin à l’occupation du territoire palestinien le 18 septembre 2025.
Que fait la France ?
Cela fait maintenant six mois que la France a voté cette résolution. Elle n’a absolument rien fait. Entre autres obligations, les États doivent tout faire pour empêcher que les institutions publiques, privées ou les entreprises ne permettent la prolongation de l’occupation du territoire palestinien par Israël.
Il reste six mois à la France, mais également aux autres États, pour tout mettre en œuvre afin qu’Israël se retire du territoire palestinien occupé au plus tard le 18 septembre 2025. Voilà pourquoi nous avons tenu à interpeller le premier ministre. Matignon nous a fait savoir que le ministre des Affaires étrangères devait nous répondre. Nous attendons. Mais nous avons malheureusement des doutes sur l’application et l’implication réelle de la France.
Nous avons l’habitude de prises de position qui ne vont jamais très loin, jamais jusqu’à la condamnation d’Israël. Voilà pourquoi nous avons décidé d’agir, de nous adresser également aux élus pour qu’ils interpellent le gouvernement, et de commencer une mobilisation citoyenne pour l’application de cette résolution.