Photo : M. Riyad Mansour, ministre, représentant permanent de l’État de Palestine auprès de l’Organisation des Nations Unies, 28 avril 2025 © UN Photo/ICJ-CIJ/Frank van Beek
La Cour internationale de justice (CIJ) a ouvert des audiences pour évaluer la responsabilité d’Israël dans la crise humanitaire qui a englouti Gaza pendant sa guerre contre le Hamas.
Ces audiences, qui ont débuté lundi à La Haye et se poursuivront tout au long de la semaine, font suite à une requête déposée l’année dernière par l’Assemblée générale des Nations unies demandant à la Cour d’évaluer la responsabilité d’Israël dans l’approvisionnement de la bande de Gaza en produits de première nécessité.
Depuis le début de la guerre, il y a 18 mois, Israël a bloqué l’aide, laissant les Palestiniens confrontés à de graves pénuries de nourriture, d’eau, de carburant et de médicaments.
Au cours des cinq prochains jours, 38 pays, dont les États-Unis, la Chine, la France, la Russie et l’Arabie saoudite, s’adresseront au panel de 15 juges pour examiner la conformité des actions d’Israël avec le droit international.
La Ligue des États arabes, l’Organisation de la coopération islamique et l’Union africaine présenteront également leurs arguments concernant les obligations d’Israël de veiller à ce que l’aide parvienne à Gaza.
Une arme de guerre
Ammar Hijazi, haut responsable palestinien, a déclaré aux juges qu’Israël bloquait l’aide pour l’utiliser comme une « arme de guerre ».
Les 2,3 millions d’habitants de la bande de Gaza n’ont reçu ni nourriture ni médicaments depuis le 2 mars, date à laquelle Israël a imposé ce qui est devenu le plus long blocus de l’histoire du territoire. Ce blocus a été suivi, deux semaines plus tard, par l’effondrement d’un cessez-le-feu de deux mois.
« Tels sont les faits. La famine est là. L’aide humanitaire est utilisée comme une arme de guerre », a déclaré M. Hijazi.
La CIJ a été chargée par les Nations unies de fournir un avis consultatif « à titre prioritaire et de toute urgence ».
Bien qu’aucune décision ne soit attendue dans l’immédiat, l’avis consultatif de la Cour façonnera probablement les futures approches juridiques internationales.
Toutefois, il n’est pas contraignant, ce qui signifie que son impact dépend de la décision des États de l’appliquer ou de l’ignorer.
La décision « sera probablement ignorée par Israël, comme il l’a fait avec d’autres jugements de la CIJ, de la Cour pénale internationale et d’autres organes juridiques internationaux », a déclaré Rory Challands, d’Al Jazeera, en direct de La Haye.
Il a toutefois ajouté que « la pression monte » sur Israël, car de plus en plus de tribunaux internationaux se sont prononcés contre ses actions.
Ce que disent les Nations unies, note M. Challands, c’est qu’"Israël a fondamentalement une double obligation en vertu du droit international. Il a une obligation en tant que puissance occupante dans les territoires palestiniens... Cela inclut l’éducation des enfants et les systèmes de protection sociale, les installations médicales, y compris les hôpitaux établis par les Nations unies, et les opérations de secours humanitaire. Si elle ne le fait pas, elle contrevient aux obligations qui lui incombent en vertu du droit international ».
« Elle a également une obligation en tant que signataire de la Charte des Nations unies, car celle-ci prévoit des immunités et des exemptions qui la distinguent d’autres institutions et d’autres organisations multilatérales », a poursuivi M. Challands.
Persécution systématique
La CIJ prendra en compte les positions des acteurs étatiques et des organisations internationales dans ses délibérations.
Toutefois, elle n’entendra pas directement les représentants israéliens. Tel Aviv a en effet soumis des avis et des objections par écrit.
Le ministre israélien des affaires étrangères, Gideon Saar, a réagi à l’ouverture des audiences en les qualifiant de « partie intégrante d’une persécution et d’une délégitimation systématiques d’Israël », dans des commentaires adressés à des journalistes à Jérusalem.
« Ce n’est pas Israël qui devrait être jugé. C’est l’ONU et l’UNRWA », a-t-il insisté, faisant référence à l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, qu’Israël empêche de fournir de l’aide à Gaza.
Traduction : AFPS