Le mur avance, parachevant l’enfermement des Palestiniens dans des bantoustans. Destruction de l’environnement, impossibilité pour les agriculteurs d’atteindre leurs champs, maisons dynamitées parce que trop proches du mur ou bien isolées de l’autre côté du mur, sans eau ni électricité, coupées des villages. Des tragédies quotidiennes… Des situations de vie inextricables… De plus en plus de familles pauvres, sans revenus , dans la misère.
Le plus dangereux peut-être, est cette espèce de « normalisation » de l’occupation. On gère le normal en institutionnalisant « l’anormal ». L’armée israélienne contrôle tous les aspects de la vie des Palestiniens – la circulation, l’économie, la vie sociale, le marché- avec un minimum de déploiement. En apparence, on circule mieux. Mais à tout moment, tout peut être bloqué entretenant les Palestiniens dans une incertitude permanente. Du harcèlement moral à l’échelle d’un peuple. Le mur, les colonies, les routes sont les outils de la colonisation pour casser la continuité territoriale de la Palestine. La politique brutale de Sharon n’est plus nécessaire… Maintenant, on rejoue Oslo en créant des îlots… En témoignent les panneaux installés récemment à l’entrée des villages palestiniens : « vous entrez dans une zone palestinienne… » L’objectif est spatial : comment israéliser le maximum de terrain et assurer la continuité de la présence juive de la mer au Jourdain…
Selon Michel Warshawski : « les Israéliens savent que le déséquilibre démographique ira en s’aggravant. Ils savent (exceptés quelques farfelus qui rêvent encore de transfert) que les Palestiniens sont là et ne partiront pas. »
Rassurante en effet, la permanence des Palestiniens. Dans cette situation ingérable, ils tiennent bon. Avec cette patience admirable, ils vont au travail ; ils se déplacent ; ils ne plient pas. Ils sont là, tout simplement, construisant partout où c’est possible des solutions de survie, gérant la pénurie, maintenant la cohésion familiale et sociale d’une société menacée de désintégration.
Dans les villages, des îlots de résistance se mettent en place. Les femmes, les agriculteurs s’organisent. Le programme de développement des coopératives d’huile d’olive prend de l’ampleur et rassemble toujours plus d’oléiculteurs motivés. Des solidarités se poursuivent contre le mur. A Qaffin, dans la région de Tulkarem, il a une quinzaine de jours, les anti-colonialiste israéliens sont venus aider les villageois à replanter 1500 oliviers de l’autre côté du mur. Bil’in est un modèle de résistance locale réussie qui n’arrive pas à impulser une mobilisation nationale.
Le problème est que ces mouvements de résistance sont éclatés. La société palestinienne est plus atomisée que jamais. Pire : il existe une cassure entre le mouvement national palestinien en crise et les mouvements de résistance. Jusqu’à la disparition d’Arafat, il existait une continuité entre la lutte de libération nationale, l’OLP la direction politique assurant les liens historiques et politiques avec le peuple. Aujourd’hui, le mouvement national palestinien est dans le flou.
Cette absence de perspectives du mouvement national palestinien rejaillit en boomerang sur le mouvement pour la paix en Israël et sur les mouvements de solidarité dans le monde. Il est difficile de construire un mouvement de solidarité de masse sans s’appuyer sur une Résistance palestinienne unie. Même si cette crise est surtout, le résultat du lâchage de l’Europe contribuant, en se ralliant au boycott israélien et américain, à l’affaiblissement de l’OLP et de Mahmoud Abbas et à la mort du processus d’Oslo.
En Palestine, tout le monde sait que la stratégie israélienne conduit à une impasse qu’il n’y a aucune chance de parvenir à une solution après les déclarations d’Annapolis, que l’approche américaine de négociation unilatérale ne mènera à rien, que la seule chance d’aboutir à la solution de deux Etats est de poser les « questions clefs », encore une fois repoussées pour une Nième « déclaration de principe » avant fin 2008.
Alors que l’urgence de la situation exige de donner à Israël un avertissement clair en le sanctionnant s’il continue à violer les décisions de l’ONU et les Conventions de Genève, au contraire Israël n’a jamais eu autant de soutien international.
Nous savons que seule une intervention forte de la Communauté internationale,particulièrement de l’Union européenne et de la France, pourrait mettre fin à l’occupation israélienne. Comme nous disent nos amis palestiniens : « Assez de bla-bla-bla, des actes ! »
D’où l’importance de la campagne des 60 ans « Paix comme Palestine » et l’urgence de renforcer et de construire un large mouvement national de solidarité pour peser sur la scène politique et donner une visibilité à notre revendication de la Paix par le droit.
Monique ETIENNE- 25 /02/08