Le Gouvernement fédéral se garde bien de réagir à cette révélation. Les livraisons d’armes à Israël sont un domaine particulièrement sensible. Le ministère de l’économie qui a la charge de l’exportation des armes renvoie les choses à la chancellerie. Le porte parole du gouvernement a déclaré au SPIEGEL : « le gouvernement fédéral, en livrant des sous-marins à Israël, se trouve dans la continuité des gouvernements précédents. La livraison se fait sans armes. Pour ce qui est des spéculations sur un armement qui aurait lieu plus tard, le gouvernement n’y participe pas ». La chancelière, comme ses prédécesseurs, s’est exprimée pl usieurs fois sur la responsabilité particulière de l’Allemagne en ce qui concerne la sécurité d’Israël. « Il est tout à fait fondamental, que le droit d’Israël à vivre en sécurité est l’un des fondements de la politique proche-orientale de l’Allemagne », a déclaré le porte parole du ministre allemand des Affaires étrangères .
Précisément après la visite du Président allemand en Israël, Joachim Gauck, le ministre des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a insisté sur le fait que la sécurité d’Israël fait partie de la raison d’Etat en Allemagne, expression créée de toute pièce par la chancelière, mais que le Président allemand n’a pas repris lors de sa visite.
Pour ce qui est des livraisons d’armes à Israël, le gouvernement allemand réagit de façon extrêmement prudente depuis des années. A vrai dire, elles sont assujetties à des restrictions particulières dans des régions de crise, mais cela ne s’applique pas à Israël. L’Allemagne, d’où sont partis les assassinats de 6 millions de Juifs allemands et européens pendant la Seconde guerre mondiale, est, depuis la fin des années cinquante, plus ou moins discrète sur ses livraisons d’armes à Israël. Elle ont commencé en 1957 sous le chancelier Adenauer. Depuis, l’Allemagne contribue indirectement à la sécurité d’Israël, qui, depuis sa création, s’est livré à plusieurs guerres avec ses voisins arabes. Mais le Gouvernement allemand peut -il livrer des armes à Israël, dotées de l’arme nucléaire et qui peuvent être utiliser contre l’Iran, à qui on reproche un programme d’armes nucléaires ?
Au sujet du rapport du SPIEGEL, selon qui les sous-marins construits à Kiel sont solidement intégrés dans la dissuasion nucléaire d’Israël, personne à Berlin ne veut le commenter en détail. Mais Philipp Missfelder, un expert en politique étrangère du parti chrétien-démocrate, le parti d’Angela Merkel, qui se tait sur le rapport, fait part de ses préoccupations sur la situation : « Israël est particulièrement en danger. Des adversaires agressifs dans la région font que nos amis doivent se protéger. L’Allemagne a raison d’apporter son aide, parce qu’Israël est une composante de notre communauté de valeurs et nous voulons soutenir la seule et unique démocratie au Proche-orient ».
Jusqu’à ce jour, le Gouvernement a toujours fait comme s’il ne savait rien de l’armement atomique. Mais d’anciens fonctionnaires du ministère de la défense comme l’ancien secrétaire d’Etat Lothar Rühl ou l’ancien chef d’Etat major, Hans Rühle, ont déclaré au SPIEGEL qu’ils sont toujours partis du fait qu’Israël déploierait des armes nucléaires sur les sous-marins. Rühl en a discuté avec des militaires à Tel Aviv. Israël n’en parle pas officiellement. Il ressort des documents du ministère des Affaires étrangères, que le gouvernement est informé depuis 1961 du programme d’armes nucléaires. Il est prouvé que l’ancien chancelier Helmut Schmidt en a parlé en 1977 avec l’ancien ministre israélien des Affaires étrangères, Moshe Dayan.
Les sous-marins sont construits par la Howaldtswerke-Deutsche Werft, les chantiers navals de Kiel. Trois ont déjà été livrés, trois autres le seront en 2017. De plus, Israêl envisage d’en commander encore trois autres à l’Allemagne. Récemment, le Gouvernement a signé le contrat de livraison du sixième sous-marin.
Selon le SPIEGEL, Angela Merkel a fait de grandes concessions aux Israéliens. Non seulement Berlin prend en charge avec 135 millions d’Euros, un tiers des coûts, mais diffère la part israélienne jusqu’en 2015.
Le SPD, le parti social-démocrate, critique la politique de la chancelière : « les Sociaux-Démocrates veulent savoir, ce qui se passe avec les sous-marins construits en Allemagne ». L’un des responsables de la politique étrangère au sein du SPD, Rolf Mützenik a déclaré : « jusque là, les livraisons d’armes étaient justifiées, à partir du moment où les sous-marins étaient équipés de systèmes de dissuasion conventionnelle. Aussi, le Gouvernement donner enfin informer, s’il est vrai que les sous-marins livrés par l’Allemagne peuvent être équipés de missiles de croisière dotés d’ogives nucléaires ».
Les relations d’Angela Merkel avec le gouvernement israélien sont perçues comme difficiles. L’an dernier, elle avait critiqué Benyamin Natanyahou pour sa politique de construction de colonies à Jérusalem-Est. Il a même été question d’une crise de confiance. Pour Rolf Müzenich : « La chancelière n’a malheureusment pas réussi à convaincre le gouvernement de changer d’attitude en utilisant une coopération conditionnée. Cela concerne la colonisation, la coopération avec le gouvernement palestinien et la liberté de mouvement de la population palestinienne dans les zones occupées et dans la Bande de Gaza".
Traduction, Françoise Diehlmann - AFPS