Dorénavant, les soldats et les officiers de l’armée israélienne feraient mieux d’y réfléchir à deux fois avant d’obéir aux ordres de détruire des maisons palestiniennes.
Les juges de la Cour Pénale Internationale de la Haye ont statué sans équivoque que la cour a pleine autorité pour entendre et statuer sur les plaintes palestiniennes contre les violations du droit international par l’État d’Israël et son armée. Ainsi, les règles du jeu ont fondamentalement changé.
Jusqu’à ce jour, la seule autorité judiciaire habilitée à entendre des cas relatifs aux actes de l’armée israélienne dans les Territoires Occupés était la Cour Suprême à Jérusalem. En dépit des provocations sauvages et prolongées des milieux de droite israéliens contre la Cour suprême et ses juges, dans la pratique la Cour Suprême a été et demeure extrêmement indulgente envers l’armée d’occupation, rejetant la grande majorité des recours introduits par les Palestiniens.
En ce qui concerne les juges de la Cour Pénale Internationale de La Haye, c’est une toute autre affaire. La Cour de la Haye est liée par les dispositions du Droit International, particulièrement par la Quatrième Convention de Genève de 1949 qui stipule en détail ce qu’un état occupant est autorisé à faire - et ce qui lui est interdit - dans un territoire sous le régime militaire de son armée. De nombreux actes que les FDI (Forces de défense israéliennes) effectuent couramment dans les territoires sous leur domination peuvent s’avérer constitutifs de graves violations du droit international.
Par exemple : il y a juste quelques jours, au matin du lundi 1er février, un grand nombre de soldats sont arrivés dans le petit village de Hamsa al-Fouka dans le Nord de la Vallée du Jourdain. Les soldats ont détruit des dizaines de constructions habitées et de bergeries, en laissant 85 habitants palestiniens - 45 d’entre eux étant des enfants - sans abri et exposés aux intempéries. Les soldats ont exigé aussi que les habitants quittent totalement Hamsa al-Fouka et déménagent vers un autre endroit que l’armée leur affecterait, en les menaçant d’être transférés de force par l’armée s’ils ne partaient pas volontairement.
Cette action de destruction et de dévastation perpétrée par l’armée - et ce n’est pas la première de la sorte - est passée pratiquement inaperçue de l’opinion publique et de l’appareil politique d’Israël. Les députés de la Knesset qui ont l’habitude de s’engager dans des débats bruyants et véhéments n’ont pas abordé cette question. Mais ne vous y trompez pas : hors des frontières de l’État d’Israël, il y a ceux qui surveillent de près en permanence et enregistrent ce type d’actes.
Devant la Cour Internationale, des accusations peuvent assurément être déposées contre des officiers des FDI et des colons ainsi que contre des fonctionnaires et des ministres du gouvernement d’Israël. Entre autres choses, les actions de destruction – perpétrées surtout à l’encontre de petits villages palestiniens hautement vulnérables de la Vallée du Jourdain et des Collines au Sud de Hébron - peuvent incontestablement conduire à la mise en accusation de toutes les personnes impliquées.
Dorénavant, les officiers des FDI devraient y réfléchir à deux fois avant d’obéir à un ordre de participer à de tels actes de destruction et de s’exposer à de graves conséquences. Les officiers qui néanmoins décident de continuer à participer à ces actions de destruction ont intérêt à faire un effort pour garder secrète leur identité, à porter un masque en permanence indépendamment de la situation de la Covid-19, et de façon générale, à commencer à agir comme des délinquants qui se soustraient à l’application de la loi - parce que c’est exactement ce que leur statut juridique est sur le point de devenir.
Les gouvernants de l’État d’Israël étaient bien conscients ces dernières semaines que la décision des juges de La Haye était imminente, et que le Président Trump - qui a essayé d’intimider la Cour Internationale par toute une série de menaces flagrantes - n’est plus à la Maison Blanche. Il est surprenant que dans une telle situation les gouvernants aient continué à ordonner aux soldats et aux officiers de poursuivre les détructions d’habitations palestiniennes, en sachant que ceux qui exécutent de tels ordres pourraient avoir à payer un prix élevé.
Le Ministre de la Défense Gantz devrait lever les yeux de ses affrontements avec le Premier ministre et de la situation électorale précaire de son parti, et penser aux conséquences de l’arrêt des juges de la Haye – les conséquences pour lui personnellement, relatives à la fois à son ancienne fonction de Chef d’État Major de l’Armée et à son actuelle fonction de Ministre de la Défense ainsi que du changement de situation juridique des soldats et des officiers dont il est responsable en étant aux commandes de l’appareil militaire israélien.
Traduit de l’original par Yves Jardin, membre du Groupe de Travail de l’AFPS sur les prisonniers politiques palestiniens
Photo : crédit Cour pénale internationale