Note de l’éditeur : Vous trouverez ci-dessous une lettre ouverte adressée aux auteurs d’une étude archéologique du village de Burayr, victime d’un nettoyage ethnique, publiée par le Bulletin of American Schools of Oriental Research (BASOR). La lettre ouverte est écrite par le célèbre chercheur palestinien Dr. Salman Abu Sitta, qui fustige les auteurs de l’article pour avoir clairement effacé l’histoire des Palestiniens indigènes de Burayr, ainsi que le massacre sioniste qui a conduit au nettoyage ethnique et au dépeuplement du village.
Aux auteurs de "An Archaeological Survey of the Arab Village of Bureir : Perspectives sur la période ottomane tardive et le mandat britannique dans le sud d’Israël" :
Votre article décrit votre travail comme une "enquête archéologique", ce qui implique qu’il s’agit d’une recherche sur l’histoire obscure et ancienne de Burayr. C’est une fraude. Burayr possède une histoire et une géographie très actuelles.
Burayr est le lieu d’un terrible massacre, au cours duquel environ 125 fermiers et leurs familles ont été tués par des grenades à main lancées sur eux dans leurs maisons par la milice sioniste (la Haganah). Le village a été incendié et est parti en flammes. Les corps brûlés sont éparpillés dans les rues. Le massacre a commencé le 13 mai 1948 et s’est poursuivi par la suite.
Avant que leur sang ne sèche, David Ben Gourion, dans l’après-midi du 14 mai, proclame l’État d’Israël des colons. Il a la témérité d’appeler les Palestiniens, le peuple du pays de Palestine, à recourir à des moyens pacifiques et à la coexistence avec les colons.
Votre journal n’a jamais mentionné cela. Vous n’avez jamais appelé les habitants de Burayr des Palestiniens, bien qu’ils soient et que leur pays soit en Palestine. Le fait que des hordes de Russes, de Polonais, de Hongrois et de Bulgares aient débarqué en Palestine depuis l’Europe de l’Est pour les tuer et s’emparer de leur pays est un crime de guerre actuel, pas un projet de recherche archéologique. La prétention des colons à être les premiers Palestiniens (et non le peuple de Burayr) est aussi grotesque que celle des Nigérians à se prétendre Norvégiens.
Les habitants de Burayr sont aujourd’hui réfugiés dans le camp de concentration de la bande de Gaza, à quelques kilomètres à l’ouest, et souffrent toujours des crimes de guerre israéliens, comme il y a quelques semaines, lorsque l’opération israélienne "Breaking Dawn" a tué 49 personnes, dont 17 enfants.
Si vous souhaitez étendre vos recherches à la vérité, veuillez consulter "Anatomie d’un massacre - Burayr - District de Gaza", ainsi que "Les massacres comme arme de nettoyage ethnique".
Les informations sur la Palestine sous le tristement célèbre mandat britannique, qui s’est terminé par la Nakba (ou "catastrophe") palestinienne en 1948, sont facilement disponibles, par exemple dans l’Atlas de la Palestine de 1917 à 1966.
Vous faites référence aux "Bédouins" comme source d’information. Qui sont ces "Bédouins" ?
Ce sont les restes (dix pour cent) de la population du district de Beer Sheba qui ont été autorisés à rester après l’expulsion israélienne de la population du district entre octobre et décembre 1948. Comme Burayr et 43 autres villages, ils ont été attaqués, dépeuplés et transformés en réfugiés. Leur dépeuplement a été favorisé par un certain nombre de massacres, dont le plus sauvage a eu lieu à Al-Dawayima, au cours duquel 500 (certains rapports parlent de 1000) agriculteurs ont été tués.
Pourtant, ces "Bédouins" sont des Palestiniens, nominalement citoyens israéliens, qui ont été spoliés de leurs terres et déplacés vers une "réserve" à 15 km à l’est, pour vivre dans des villages "non reconnus". Vous les avez croisés parce qu’ils n’ont pas été autorisés à rentrer chez eux, alors qu’ils étaient voisins de Burayr.
Vous feriez bien d’étendre vos lectures pour consulter les nombreux rapports récents des organisations internationales des droits de l’homme qui déclarent Israël coupable du crime d’apartheid, comme le rapport historique de Human Rights Watch, "Un seuil franchi", ou celui d’Amnesty International, "L’apartheid d’Israël contre les Palestiniens".
Ou mieux encore, roulez un peu plus au sud et rencontrez les authentiques Burayr dans le camp de réfugiés. Ils vous expliqueront mieux vos "fouilles", le matériel de leur vie terminée. Ils vous donneront plus de détails et vous montreront une douzaine de livres qu’ils ont écrits sur leur village. Nous pouvons vous envoyer des vidéos d’au moins une demi-douzaine de témoignages.
On peut écrire beaucoup plus sur ce sujet.
La valeur intrinsèque de la recherche est l’honnêteté.
Un travail incomplet, partial, tordu ou motivé politiquement n’est pas de la recherche. C’est un tract de propagande.
Ce principe est très bien connu du rédacteur en chef de BASOR. On ne sait pas comment le document a pu échapper à son examen minutieux.
Espérons une rétractation ou une correction.
Dr. Salman Abu Sitta
Palestine Land Society, Royaume-Uni
Traduction et mise en page : AFPS / DD