Le gouvernement allemand est en train d’examiner s’il faut accepter une résolution de son parlement qui définit le mouvement (de BDS) de boycott, de désinvestissement et de sanctions votée comme antisémite et qui en interdit l’usage par les établissements publics – et en quoi une telle décision affecterait le financement par l’Allemagne des associations qui soutiennent le mouvement.
Haaretz a appris qu’Israël et diverses associations de diplomatie ouverte font pression sur l’Allemagne pour qu’elle accepte la résolution, en suscitant des désaccords importants entre les différents ministères gouvernementaux. Le cabinet de la Chancelière Angela Merkel doit cependant se mettre d’accord sur une position officielle.
Des sources allemandes ont déclaré à Haaretz que le Ministère de l’Intérieur du pays, poussé par le commissaire à la lutte contre l’antisémitisme, Felix Klein, soutient dans l’ensemble la résolution, alors que le Ministère des Affaires étrangère s’y oppose. Les responsables du Ministère des Affaires étrangères ont récemment déclaré aux journalistes qu’ils étaient opposés à un boycott d’Israël, mais que le mouvement de BDS comprend un large éventail d’opinions et que chaque cas ou chaque mouvement doit être considéré individuellement pour déterminer s’il est antisémite.
La résolution du mois dernier de la Diète fédérale a représenté la première fois où un parlement européen a officiellement défini le mouvement de BDS comme antisémite. La résolution, qui est un appel au gouvernement et qui n’est pas juridiquement contraignante, a recueilli un large soutien de plusieurs partis, de la part de l’Union Chrétienne-Démocrate de Merkel, des Sociaux-Démocrates et du Parti Libéral-Démocrate. Certains membres du Parti des Verts ont aussi soutenu la résolution, bien que d’autres se soient abstenus à la dernière minute. La motion a déclaré que les autocollants « N’achetez pas » du mouvement du BDS mis sur les produits israéliens évoquent le slogan nazi “N’achetez pas aux Juifs ».
La semaine dernière, 240 intellectuels juifs ont publié une pétition contre la résolution de la Diète fédérale, disant que « les boycotts sont un outil légitime et non-violent de résistance. » Les signataires, parmi lesquels Avraham Burg [1] et Eva Illouz [2], ont appelé le gouvernement allemand à ne pas accepter la résolution pour protéger la liberté d’expression et pour continuer à financer les organisations israéliennes et palestiniennes « qui, pacifiquement, contestent l’occupation israélienne, révèlent les graves violations du droit international et renforcent la société civile. Ces organisations défendent les principes et les valeurs qui sont au coeur de la démocratie libérale et du règne du droit, en Allemagne et ailleurs. Plus que jamais, elles ont besoin de soutien financier et d’appui politique. »
Le Musée Juif de Berlin a participé sur Twitter à la pétition, en provoquant un tollé sur Internet. L’Ambassadeur israélien en Allemagne, Jeremy Issacharoff, a qualifié la participation du musée à la pétition de « honteuse. »
L’année dernière, il a été rapporté que le Premier Ministre israélien, Benjamin Netanyahu avait exigé de Merkel que l’Allemagne cesse de subventionner le musée parce qu’il avait organisé une exposition sur Jérusalem, « qui présentait un point de vue islamo-palestinien. » Il a été demandé également à Merkel d’arrêter de subventionner d’autres organisations, aux motifs qu’elles étaient anti-israéliennes, parmi lesquelles le Festival International du Film de Berlin, des organisations chrétiennes pro-palestiniennes, et le site Internet d’information israélien +972, qui reçoit des financements de la Fondation Heinrich Böll.
Shameful - @jmberlin tells its followers they must read an article endorsing BDS. The Jewish Museum is supposed to be a cultural body but is highly political when supporting the boycotting of Israel and in effect criticizing the Bundestag for condemning antisemitism ! https://t.co/Una8VAbCxE
— Jeremy Issacharoff (@JIssacharoff) 8 juin 2019
Netanyahu n’a pas infirmé le reportage et son bureau a confirmé qu’il avait soulevé « avec divers dirigeants la question du financement d’associations palestiniennes et israéliennes et d’organisations à but non lucratif qui décrivent les Forces de Défense Israéliennes comme des criminels de guerre, soutiennent le terrorisme palestinien et demandent de boycotter l’Etat d’Israël. »
Traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT prisonniers de l’AFPS