Une association de surveillance des colonies a déclaré dimanche qu’Israël va de l’avant avec la construction nouvelle de centaines de logements dans une colonie stratégique à Jérusalem-Est qui menace de faire une coupure avec des parties de la ville revendiquées par les Palestiniens de Cisjordanie.
L’association, la Paix Maintenant, a déclaré que l’Autorité Foncière d’Israël a annoncé dimanche sur son site Internet qu’elle avait lancé les appels d’offre pour plus de 1.200 nouveaux logements dans la colonie à la situation-clé de Givat Hamatos à Jérusalem-Est.
L’initiative peut mettre à l’épreuve les liens avec l’administration entrante du Président élu Joe Biden, qui devrait adopter une approche plus ferme contre l’expansion des colonies israéliennes après quatre années de politique plus clémente sous la direction du Président Donald Trump, qui a énormément fermé les yeux sur la construction de colonies.
L’approbation des 1.200 logements est un revers supplémentaire pour les espoirs s’amenuisant d’un accord de partition soutenu par la communauté internationale qui permettrait la création d’un État palestinien aux côtés d’Israël.
Les Palestiniens ainsi que les opposants à la politique coloniale d’Israël déclarent que les constructions dans la colonie de Givat Hamatos interdirait l’accès à la ville palestinienne de Bethléem et au Sud de la Cisjordanie en venant de Jérusalem-Est, en coupant davantage l’accès des Palestiniens à cette partie de la ville.
« Ceci est la continuation de la politique de l’actuel gouvernement israélien de destruction de la solution à deux états », a déclaré Nabil Abu Rdeneh, porte-parole du Président palestinien Mahmoud Abbas.
L’évolution annoncée dimanche intervient alors que le Secrétaire d’Etat, Mike Pompeo, est sur le point de faire cette semaine un voyage dans la région, pendant lequel il devrait visiter une colonie israélienne en Cisjordanie — arrêt que les précédents secrétaires d’état des USA ont évité de faire. Les responsables palestiniens, qui ont coupé les liens avec l’administration Trump à cause de ses politiques en faveur d’Israël, ont dénoncé le projet de visite de Pompeo. Le Premier Ministre palestinien, Mohammad Shtayyeh, a tweeté vendredi que ceci était un « dangereux précédent » qui légalise les colonies.
Brian Reeves, porte-parole de la Paix Maintenant, a déclaré que l’initiative de dimanche permet aux entrepreneurs de commencer à soumissionner aux appels d’offres, un processus qui se conclura seulement quelques jours avant l’entrée en fonction de Biden. Les constructions pourraient alors commencer dans quelques mois.
« Ceci est un coup mortel aux perspectives de paix », a déclaré dans un communiqué la Paix Maintenant, en ajoutant qu’Israël « tirait avantage des dernières semaines de l’administration Trump afin d’établir des faits sur le terrain qui seront extrêmement difficiles à défaire pour parvenir à la paix ».
Les Palestiniens veulent la Cisjordanie, ainsi que la bande de Gaza et Jérusalem-Est, — régions dont Israël s’est emparé lors de la guerre de 1967 au Proche-Orient — pour former leur futur état. Avec près de 500.000 colons habitant en Cisjordanie et plus 220.000 en plus à Jérusalem-Est, les Palestiniens disent que les chances de créer leur état vont rapidement en s’amenuisant.
Israël considère toute la ville de Jérusalem comme sa capitale éternelle et indivisible.
Une bonne partie de Jérusalem est déjà séparée de la Cisjordanie par une série de points de contrôle et de barrières de séparation. Israël auparavant a fait avancer des projets de construction dans E1, une autre zone sensible à l’Est de Jérusalem dont les opposants disent que, avec Givat Hamatos, elle séparerait entièrement Jérusalem-Est de la Cisjordanie.
Après quatre années d’administration Trump, dont les politiques ont été considérablement favorables à Israël et qui a haussé les épaules devant la construction de colonies, Israël fait face à une nouvelle réalité avec l’administration Biden, qui vraisemblablement reviendra à la position antérieure des USA qui considérait les colonies comme illégitimes et comme un obstacle à la paix avec les Palestiniens.
Du temps des administrations précédentes, Israël s’abstenait d’établir des projets dans les zones les plus sensibles, dont Givat Hamatos, dans un contexte d’opposition à la fois de Washington et de la communauté internationale, qui considéraient que de tels projets anéantissaient les espoirs de créer un état palestinien contigu.
Mais Israël a été encouragé du temps de l’administration Trump, approuvant pendant son mandat des milliers de nouveaux logements dans les colonies, y compris dans les zones fortement contestées. Beaucoup de ces projets devraient démarrer après le début de présidence de Biden.
Alors que l’administration Trump est dans ses dernières semaines de fonctionnement, Israël peut avoir pour but de faire avancer les projets controversés avant que le mandat de Biden ne commence, démarche qui pourrait le placer en mauvaise posture avec le nouveau président.
Traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT prisonniers de l’AFPS