Madame la Ministre,
Depuis le vendredi 5 août l’État d’Israël bombarde la Bande de Gaza. Le bilan est déjà terrible, 44 morts dont 15 enfants, 360 blessés dont 150 enfants, d’innombrables destructions. Aucune attaque, aucun tir de roquette, ne permettait de justifier cette nouvelle agression israélienne. Malgré les affirmations israéliennes, les civils en sont les premières victimes, et le concept de « guerre préventive » ne traduit qu’une agression caractérisée avec d’évidentes intentions électoralistes. C’est ce que nous avons souligné dès le 6 août dans notre communiqué.
Dans cette situation, nous tenons à vous faire part de notre indignation à la lecture du communiqué publié sur le site du Quai d’Orsay samedi dernier 6 août. La France « déplore » les victimes palestiniennes et « condamne » les tirs de roquettes, alors qu’aucun tir n’avait eu lieu avant l’agression israélienne. La France omet de condamner les bombardements israéliens qui ont fait toutes ces victimes, terrorisent la population, traumatisent les enfants palestiniens d’une manière souvent irréparable.
Et surtout, dans une telle situation d’agression, la France « réitère son attachement inconditionnel à la sécurité d’Israël ». Madame la Ministre, permettez-nous de vous le dire, cette phrase, écrite dans ces circonstances, est un véritable permis de tuer. Croyez-vous vraiment que la sécurité d’Israël sera assurée par ces agressions ? N’est-il pas temps, grand temps, de dire fermement à Israël, d’abord par des expressions claires et fortes, puis par des sanctions, que ces violations du droit international sont inacceptables, et que sa sécurité ne sera assurée que par la reconnaissance des droits du peuple palestinien ?
Pensez-vous vraiment que vous pouvez, au sein du Conseil européen statuant à l’unanimité, vous prononcer pour la reprise du Conseil d’association pour un hypothétique soutien à un Premier ministre par intérim bien rapidement qualifié de « centriste » ? Alors même que la colonisation s’intensifie, que la population de Masafer Yatta est déportée, que les provocations israéliennes sont continues sur Jérusalem, et maintenant l’agression contre Gaza ?
Rien ne changera dans la politique israélienne tant que la population israélienne ne comprendra pas que cette politique est condamnée, et sanctionnée, par la communauté internationale.
La France, membre du Conseil de Sécurité de l’ONU, Haute Partie contractante des conventions de Genève, qui a su par le passé s’exprimer d’une voix forte sur la situation au Proche-Orient, a une responsabilité particulière. Elle ne peut pas, elle ne doit pas, en rester à la déclaration publiée le 6 août. Nous attendons de vous-même, et du président de la République à qui nous adressons une copie de ce courrier, une réponse à la hauteur de la situation : une condamnation claire et nette des bombardements israéliens sur la Bande de Gaza, la demande de report sine die de toute réunion du Conseil d’Association, et des gestes forts, notamment la suspension de toute coopération militaire, tant que l’État d’Israël poursuivra sa politique d’agression contre le peuple palestinien et refusera de se conformer au droit international. Et ce sont bien sûr des sanctions, et notamment la suspension de l’accord d’association, qu’il faudra mettre à l’ordre du jour du Conseil européen dans une telle situation de crimes de guerre et de violation du droit.
Au-delà de cet échange par courrier, nous vous demandons de bien vouloir nous recevoir pour que nous puissions vous faire part de notre analyse et de nos attentes.
Nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre très haute considération.
Bertrand Heilbronn,
Président de l’Association France Palestine Solidarité,
Le 8 août 2022