Photo : Distribution d’aide alimentaire à Gaza, le 17 juin 2025 © Anas Al-Sharif
Un nouveau rapport publié ce mois-ci via Harvard Dataverse révèle qu’au moins 377 000 personnes à Gaza ont « disparu » depuis octobre 2023 à la suite d’opérations militaires israéliennes, dont la moitié seraient des enfants.
Ce rapport, rédigé par le professeur israélien Yaakov Garb, utilise une analyse basée sur des données et une cartographie spatiale pour examiner comment les attaques israéliennes contre les civils et l’obstruction de l’aide humanitaire ont entraîné une baisse spectaculaire de la population de l’enclave.
Selon les conclusions de Garb, le nombre réel de personnes tuées pourrait être bien supérieur au bilan officiel, qui s’élève actuellement à environ 61 000 morts.
Les cartes figurant dans le rapport, basées sur les estimations de l’armée israélienne, indiquent que la population restante dans la ville de Gaza est d’environ un million de personnes, dont 500 000 à Mawasi et 350 000 dans le centre de Gaza, soit un total d’environ 1,85 million.
Avant la guerre, la population de Gaza était estimée à 2,227 millions d’habitants. Cet écart indique qu’au moins 377 000 personnes sont désormais portées disparues.
Si certaines peuvent avoir été déplacées ou être portées disparues, l’ampleur de cet écart a conduit les analystes à conclure qu’un nombre important d’entre elles sont probablement mortes, ce qui suggère que le nombre réel de victimes pourrait être plusieurs fois supérieur.
Accès, obstruction et conception des sites d’aide
Le rapport évalue également de manière critique le rôle de la Gaza Humanitarian Foundation (GHF), soutenue par les États-Unis, en affirmant que sa structure semble avoir été davantage façonnée par la stratégie militaire israélienne que par les besoins humanitaires.
À l’aide de données de localisation et d’analyses spatiales, Garb constate que la plupart de la population de Gaza n’a pas pu atteindre les sites d’aide de la GHF.
Ces sites étaient en grande partie inaccessibles, coupés des zones sud de Gaza par le corridor de Netzarim contrôlé par Israël. Leur emplacement à l’intérieur de « zones tampons » déclarées signifiait que les civils en quête d’aide devaient pénétrer dans des zones qui leur étaient officiellement interdites par l’armée israélienne.
Selon le rapport, la médiocrité des infrastructures, l’absence de transports motorisés et la quasi-inexistence de voies de passage sûres rendaient l’accès encore plus difficile.
Garb écrit que la conception et le fonctionnement des centres d’aide « semblent être une source de frictions et d’incidents continus », soulignant que le modèle d’allocation, qui prévoyait des rations pour exactement 5,5 personnes pendant 3,5 jours, obligeait en fait les civils à effectuer des traversées répétées et dangereuses dans des zones militarisées.
« Le fait que quatre des cinq camps se trouvent au sud du corridor de Morag – que les responsables israéliens ont maintes fois désigné comme la destination prévue pour concentrer les Palestiniens qui seront déplacés du reste de Gaza lors d’une intensification imminente des attaques militaires – n’est pas rassurant », prévient le rapport.
Pas de dignité, pas de protection
Le rapport souligne que peu ou pas de mesures ont été prises pour protéger la dignité ou la sécurité des civils en quête d’aide. Les sites manquaient d’installations de base telles que des abris, de l’eau, des toilettes, des postes de premiers secours ou des accès réservés aux groupes vulnérables. Il n’y avait généralement qu’un seul point d’entrée et de sortie, aucune gestion des foules, et les scènes de chaos étaient courantes.
Le rapport soutient que l’architecture même de ces complexes d’aide a été conçue de manière à risquer des flambées répétées de désordre, conditions alors utilisées pour justifier la violence contre les civils.
« Dans l’ensemble, ces complexes d’aide semblent refléter une logique de contrôle plutôt que d’assistance, et il serait erroné de les qualifier de « centres de distribution d’aide humanitaire ». Ils ne respectent pas les principes humanitaires, et une grande partie de leur conception et de leur fonctionnement est guidée par d’autres objectifs, qui vont à l’encontre de leur objectif déclaré », conclut le rapport.
Ce rapport intervient alors que le ministère de la Santé de Gaza a confirmé mardi qu’au moins 450 personnes ont été tuées et environ 3 500 blessées depuis fin mai alors qu’elles tentaient d’accéder à l’aide humanitaire.
Selon le ministère, la plupart des personnes tuées ont été touchées à proximité ou sur le chemin des sites de distribution du GHF soutenus par les États-Unis.
Traduction : AFPS