Je n’irai pas me coucher ce soir, comme la plupart des habitants de Gaza. J’ai préparé mon sac d’urgence, il est près de la porte. Les hôpitaux ont décrété l’état d’urgence extrême, le personnel médical est épuisé et limité à cause des sanctions.
Mercredi 28 juin, 1h 30 du matin.
Les opérations contre Gaza se poursuivent. Le pont de Gaza a été détruit. Les chasseurs à réaction continuent de viser leurs cibles. Le bâtiment du gouvernement de Gaza a été touché par au moins 7 missiles. Depuis ma fenêtre, je vois un énorme feu et j’entends les sirènes des ambulances. Ils tirent aussi depuis les bateaux. J’habite près de la plage.
Mercredi 28 juin, 7h du matin.
Hier soir, c’était très dangereux d’atteindre un ordinateur. En plus, le courant était coupé. Je suis restée assise par terre avec mon fils et ma fille. Comme tous les habitants de la Bande de Gaza, nous n’avons pas dormi de la nuit. Nous n’y sommes pas arrivés, à cause du bruit des bombes, énorme et terrifiant, et ils continuent leurs attaques. J’ai contacté l’hôpital plusieurs fois : pas encore de victimes. L’opération se déroule sur différentes parties de la Bande de Gaza, mais elle cible le sud : Rafah. Là, je ne sais pas s’il y a des victimes.
Nous sommes vraiment entourés par la mort et nous l’attendons à n’importe quel moment. Le désengagement de l’armée israélienne, en septembre dernier, a laissé la population de Gaza seule face à son destin, avec le contrôle total de ses frontières extérieures par l’armée israélienne. Le désengagement et la construction du mur en Cisjordanie n’ont pas apporté la paix aux Israéliens.
Nous avons l’expérience de toutes sortes d’agressions israéliennes au cours des derniers mois, et tout au long de l’Intifada. Depuis qu’Ehud Olmert est arrivé au gouvernement il y a 4 mois, 85 Palestiniens ont été tués, des sanctions économiques et politiques ont été imposées et les gens, ici à Gaza, n’ont plus rien à perdre. Ils n’ont à perdre que leurs chaînes ; ils sont frustrés et n’envisagent aucun avenir.
J’espère qu’Israël ne va pas poursuivre ses opérations sur Gaza, les résultats pourraient être horribles, le mouvement de résistance se prépare lui aussi, mais le déséquilibre des forces est évident, et de toutes façons Israël nous attaque en permanence, qu’il y ait ou non une résistance palestinienne. Mais cette fois, ce sera différent et dans ce processus, beaucoup de civils vont mourir. J’écoute la radio locale. Il semble que les opérations ont commencé à Khan Yunis, l’artillerie a commencé à tirer, sous couverture des hélicoptères Apaches et des chasseurs à réaction. Maintenant je peux écrire mais je ne sais pas ce qui va se passer, l’électricité peut être coupée.
Il y a quelques heures, Mohammed et Sondos (mes fils chéris, je prie pour la sécurité de tous les enfants du monde, y compris les enfants israéliens) ont fait un petit détour en rentrant à la maison ; une voiture a explosé à 150 mètres de la maison, près de celle du Président. Une personne a été tuée et 4 blessés, je ne peux pas m’empêcher d’être angoissée. Après tout, je suis une mère. Je resterai forte.
Demain j’irai au bureau du Croissant Rouge. Nous devons recevoir quelques médicaments qui avaient été stoppés aux frontières proches et qui seront utilisés au service des urgences de l’hôpital Alawda.
J’espère y arriver, avec l’aide de l’OMS. Je ne suis pas sûre que nous les recevions à temps, mais je vais quand même essayer. L’hôpital Alawda est à l’intérieur du camp de réfugiés de Jabalia. Il y a deux semaines, l’hôpital a reçu les enfants de la famille Galia qui ont perdu leurs parents lors du bombardement de la plage. Les réserves en médicament de l’hôpital sont suffisantes pour une semaine de travail normal. Si l’opération israélienne continue et si le nombre des victimes augmente, il s’en suivra un désastre humanitaire.
C’est juste une remarque parce que je suis médecin.
Le bruit des avions est de plus en plus fort. Je continuerai à écrire, cela me fait du bien.