Il n’était pas arrivé que nous, la génération d’Oslo, ressentions vraiment le sens de la dignité et de la fierté. Il n’était pas arrivé que nous ayons assisté à la victoire dans l’un des combats de cette lutte existentielle sur le terrain, il n’était pas arrivé que nous ayons vu Jaffa se soulevant, il n’était pas arrivé que nous ayons vu toutes les villes palestiniennes se soulever en même temps. Nous n’avions jamais vécu un moment qui ressemble à ce qui s’est passé pour nous au mois de mai de cette année. La Palestine n’est pas encore libérée, mais ce qui s’est passé est un grand moment de notre histoire ; qui donne un espoir à la jeune génération. Qui conforte l’idée d’une victoire inéluctable, et nous assure que nous sommes toujours capables de nous sacrifier pour la liberté. Que même si la lutte sera longue, elle est toujours vivante, qu’elle se construit et continue.
Avant mai, et plus précisément avant d’annoncer le report des élections palestiniennes au 30 avril 2021, on parlait d’élections partielles, non représentatives, qui n’incluaient que la Cisjordanie, à l’exclusion de Jérusalem et de la bande de Gaza. En mai, nous avons décidé d’une grève globale et large, couvrant tout le territoire national et incluant tous les Palestiniens, ainsi que dans la diaspora. Un moment pour réaffirmer la fin des accords d’Oslo et de ses solutions impossibles pour nous, et pour montrer que le choix des Palestiniens, c’est toujours la résistance. Le succès massif de la grève du 18 mai exprime l’unité de destin et de volonté de tous les Palestiniens, en particulier dans la manière dont elle a été suivie, et l’adhésion à la fois des syndicats et des institutions publiques et privées en Cisjordanie, à sa reprise et à l’écho qu’elle a eu aussi bien dans les camps de la diaspora que dans le Golan syrien occupé, malgré la recherche de moyens pour la faire reculer de l’intérieur (occupé en 1948). Ce qui s’est passé confirme que toutes les tentatives et les plans systématiques du colonialisme pour soumettre notre peuple et le briser n’ont pas réussi. Au contraire, ils ont soulevé un mouvement plus puissant et une volonté plus forte. De la riposte de la bande de Gaza assiégée avec la fabrication de missiles de moindres capacités, mais qui s’est manifesté par les capacités militaires avancées ; au défi et à la résistance des habitants de Jérusalem avec la proclamation de leur slogan : « Nous n’acceptons pas une nouvelle Nakba, nous ne partirons pas ! ».
Ce qui s’est passé a fait reculer de nombreux plans et projets sionistes, allant des déplacements forcés, aux démolitions de maisons et aux assassinats, mais suscitant aussi des tentatives continues de l’occupation d’empêcher, ou de casser l’unité de la cause palestinienne, qui se manifestent dans le développement des outils de l’oppression israélienne dans l’objectif d’éliminer toute tentative d’organisation collective – la transformant en situations individuelles, en préoccupations fragmentées et à l’abandon de la dimension collective… La torture systématique qui a été utilisée en 2019 contre les camarades du Front populaire de libération de la Palestine, en est un bon exemple.
Outre le projet de plan d’annexion qui s’inscrit dans le cadre de l’accord du siècle annoncé en janvier 2020, le projet concerne la région du Triangle de l’intérieur, occupé [1], historiquement marginalisée et victime des tentatives répétées pour effacer la culture et transformer l’histoire palestinienne.
Il s’agit de normaliser la présence coloniale dans les esprits, là où vivaient un grand nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays en 1948, et qui refusent d’être à nouveau déplacées, que ce soit à Jérusalem ou à l’intérieur des territoires palestiniens. Le territoire du Triangle en Israël, qui a été présenté dans de nombreuses négociations et propositions d’échange de terres entre l’Autorité palestinienne et la puissance occupante, prouve qu’elle ne diffère pas en termes de confrontation, d’unité identitaire et de lutte palestinienne du reste des villes et villages occupés à l’intérieur.
Enfin, malgré toutes les tentatives de l’ennemi pour blanchir et normaliser son image à l’international, le soutien mondial à la cause palestinienne augmente, et plus encore, on assiste à un changement et à une radicalisation du discours de solidarité et de cohésion des peuples dans leurs luttes, la meilleure preuve en est qu’au milieu des événements en Colombie, qui ont commencé en avril avec le rejet d’un projet gouvernemental de modification de l’impôt et le rejet de politiques sociales injustes, alors que des milliers de Colombiens envahissaient les rues, certains d’entre eux sont venus portant le drapeau palestinien, expression de l’unité des peuples et de leurs luttes.
*« Je ne suis jamais déçu ! Du fond des ténèbres tu cries, je ne suis jamais déçu » Ghassan Kanafani, Tout ce qui vous est resté (1966).
Ghassan Kanafani, né le 8 avril 1936, était un écrivain palestinien et membre important du Front populaire pour la libération de la Palestine. Le 8 juillet 1972, il a été assassiné par le Mossad