Le 5 juillet 2019, les forces de sécurité égyptiennes ont arrêté Ramy Shaath et l’ont transféré dans un lieu tenu secret, sans révéler ce qu’il était advenu de lui pendant environ 36 heures. Par la suite, il a comparu devant un procureur du parquet de la Sûreté de l’État, au Nouveau Caire, et a été accusé d’« assistance à un groupe terroriste ». Sa détention a une nouvelle fois été prolongée de 15 jours, le 15 septembre 2019. Amnesty International considère Ramy Shaath comme un prisonnier d’opinion, car il est détenu uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression et à la participation aux affaires publiques.
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Procureur général Nabil Sadek
Office of the Public Prosecutor
Madinat al-Rehab
Cairo, Égypte
Fax : +202 2577 4716Monsieur le Procureur général,
Le 5 juillet 2019, vers 0 h 45, au moins une douzaine de policiers lourdement armés ont pris d’assaut le domicile cairote du militant politique Ramy Shaath, sans s’identifier ni présenter de mandat d’arrêt. Les policiers ont fouillé les lieux et ont saisi des ordinateurs, des disques durs et des téléphones portables. Ils ont arrêté Ramy Shaath et son épouse, Céline Lebrun Shaath, professeure d’histoire et responsable associative, qui a été expulsée illégalement vers la France plus tard dans la journée, alors qu’elle résidait légalement en Égypte depuis mars 2012.
Les forces de sécurité ont transféré Ramy Shaath dans un lieu tenu secret, sans révéler ce qu’il était advenu de lui pendant environ 36 heures. Les agents du poste de police de Qasr el Nil, dans le centre-ville du Caire, ont affirmé à sa famille et ses avocats qu’il n’était pas entre leurs mains. Par la suite, un avocat a informé la famille que Ramy Shaath avait comparu devant un procureur du parquet de la Sûreté de l’État, au Nouveau Caire. Il n’a pas été autorisé à appeler sa famille ni ses avocats, et a été représenté pendant son interrogatoire par un avocat qui se trouvait sur place.
Selon la famille, le procureur a informé Ramy Shaath qu’il était accusé d’« assistance à un groupe terroriste ». Il ne l’a toutefois interrogé que sur la nature de ses activités politiques en Égypte et n’a fourni aucune preuve à son encontre. Il a fondé ses accusations sur un dossier secret de l’Agence nationale d’investigation (NSA), malgré un arrêt rendu en 2015 par l’une des plus hautes juridictions égyptiennes, la Cour de cassation, qui a statué que les enquêtes de l’agence ne constituaient pas des preuves à elles seules. En outre, le procureur n’a autorisé ni Ramy Shaath ni ses avocats à examiner les éléments d’enquête de la NSA.
À la lumière de ces éléments, je vous demande de libérer immédiatement et sans condition Ramy Shaath, car il s’agit d’un prisonnier d’opinion, détenu uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression et à la participation aux affaires publiques. Je vous prie également de veiller à ce que, dans l’attente de sa libération, il soit autorisé à consulter ses avocats et traité dans le respect de l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus. J’appelle enfin les autorités égyptiennes à enquêter sur le refus d’assistance consulaire qui a été opposé à l’épouse de Ramy Shaath, Céline Lebrun Shaath, ressortissante française, ainsi que sur l’expulsion illégale d’Égypte dont celle-ci a ensuite fait l’objet, et à lui offrir des voies de recours efficaces.
Veuillez agréer, Monsieur le Procureur général, l’expression de ma haute considération.
Complément d’information
Ramy Shaath est actuellement incarcéré dans la prison de Tora (sud du Caire), dans l’attente des conclusions d’une enquête menée dans le cadre de l’affaire dite du « Plan Espoir », qui concerne au moins 105 personnes, dont beaucoup sont également en détention.
Selon les autorités, cette enquête porte sur un « complot orchestré par des militants de la société civile en collaboration avec les Frères musulmans pour porter atteinte à l’État ». L’affaire concerne des personnes d’horizons politiques extrêmement variés, qui n’ont pas de liens entre elles. Parmi elles figurent au moins 15 responsables politiques, étudiants, journalistes et défenseurs des droits des travailleurs, qui sont détenus arbitrairement sur la base de charges sans fondement, liées à leurs activités politiques légitimes, à leurs activités de défense des droits humains et à l’expression pacifique de leurs opinions.
Le 6 juillet, le procureur a ordonné le placement en détention de Ramy Shaath pour 15 jours, dans l’attente des résultats de l’enquête ; depuis lors, il renouvelle sa détention tous les 15 jours lors d’audiences de renouvellement automatique. En vertu du Code de procédure pénale égyptien et de la Loi de 2015 relative à la lutte contre le terrorisme, les procureurs peuvent ordonner la détention provisoire de personnes poursuivies dans des affaires « liées au terrorisme » pour une période pouvant aller jusqu’à 150 jours, sans les déférer à un juge.
Ramy Shaath est un militant politique, qui a contribué à la fondation de divers mouvements politiques laïques en Égypte, dont le parti politique El Dostour, créé en 2012 par Mohammed El Baradei. Il a également cofondé le mouvement BDS (Boycott, désinvestissement et sanctions) en Égypte, et en est le coordonnateur dans ce pays depuis 2015. Le mouvement BDS fait campagne pour amener Israël
à rendre des comptes pour les violations des droits humains et autres violations du droit international, en usant de moyens non violents pour y parvenir. Dans le cadre de ses activités militantes, Ramy Shaath sensibilise le public aux droits des Palestiniens et dénonce dans les médias l’occupation israéliennes des territoires palestiniens. Avant son arrestation, il avait participé à des événements publics et donné à la presse des interviews dans lesquelles il exprimait sa vive opposition au plan américain visant à résoudre le conflit israélopalestinien, baptisé « deal du siècle », et à la participation de l’Égypte à la conférence de Manama les 25 et 26 juin 2019, consacrée à des discussions sur ce plan.
Les autorités égyptiennes harcèlent Ramy Shaath depuis de nombreuses années en raison de son militantisme politique. En avril 2012, le ministère de l’Intérieur a refusé de renouveler son passeport égyptien, tentant de le priver de la nationalité égyptienne. Bien que Ramy Shaath ait obtenu gain de cause en 2013 devant le tribunal administratif du Caire, le ministère de l’Intérieur a fait appel de la
décision en 2018 ; l’appel est toujours pendant.
Langues à prévilégier pour la rédaction de vos appels : arabe et anglais
Vous pouvez également écrire dans votre propre langue.
Merci d’agir dans les plus brefs délais et avant le : 29 octobre 2019
Au-delà de cette date, vérifiez auprès de votre section s’il faut encore intervenir.
Prénom, nom et pronom à utiliser : Ramy Shaath (il)