Ramallah - La Commission chargée des Affaires de prisonniers a publié un rapport où elle accuse les médecins de l’administration pénitentiaire israélienne et les médecins israéliens travaillant pour le compte des services de sécurité et des camps militaires, d’assistance et de participation à des actes de torture, de pressions psychologiques et de négligence médicale à l’encontre des prisonniers palestiniens, les laissant ainsi en proie à diverses blessures et maladies qui rongent leur corps, et cela en contravention avec l’éthique médicale et les conventions internationales et humanitaires à cet égard.
Dans son rapport la Commission indique que la plupart des témoignages recueillis parlent de connivences entre les médecins et les enquêteurs. Ces médecins admettent le marchandage macabre opéré par les enquêteurs pour obtenir des détenus, torturés et blessés, des aveux contre des soins, sans le dénoncer, de plus ils assistent et participent en fournissant de faux rapports sur l’état de santé des prévenus, entre deux interrogatoires, prolongeant ainsi leur souffrance physique et psychologique, sans leur apporter assistance ni soin.
Des prisonniers malades doivent attendre parfois plusieurs années avant de bénéficier d’un examen médical ou d’un transfert dans un hôpital malgré l’urgence de leurs situations. C’est un crime commis par des médecins, travaillant dans les prisons israéliennes, où plusieurs prisonniers sont morts après de longues et éprouvantes maladies, sans aucun dépistage préalable pour détecter ces maladies et les soigner correctement.
Ces médecins israéliens ont failli à leur devoir de médecin, ils n’examinent pas périodiquement les prisonniers, ne s’opposent pas aux moyens de transports utilisés par la direction des prisons pour transporter des prisonniers malades vers les hôpitaux, dans des véhicules inadaptés à leur état et qui leur infligent des souffrances énormes, aussi ils ne font jamais état de leurs conditions de détention dans ces cellules humides et sales.
C’est ce silence et cette complicité qui les rend coupables d’enfreindre les principes du droit humanitaire et l’éthique de leur profession de médecin, en cachant la torture, les mauvais traitements, l’humiliation, les coups et les pressions de tout genre dont sont victimes les prisonniers palestiniens, ils vont jusqu’à cacher les résultats des autopsies faites sur les prisonniers morts en prison, ils ne les communiquent pas aux Palestiniens, aussi ils s’obstinent à cacher des informations sur les erreurs médicales et les essais médicaux réalisés sur les prisonniers pendant leurs traitements.
Le rapport de la Commission souligne que les médecins dans les services des prisons sont en accord avec la position politique du gouvernement israélien et les services de sécurité en Israël, dans de nombreux cas, comme la fourniture de rapports refusant la libération anticipée des détenus gravement malades en les déclarant en bonne santé, ou en faisant obstacle à l’entrée de médecins privés pour ausculter les prisonniers.
La commission rappelle dans son rapport un ensemble de points qui confirment à la fois la complicité, la responsabilité et le manquement des médecins des prisons et des centres d’interrogatoire à leur devoir et obligations de porter assistance et soins aux prisonniers malades :
• Plusieurs prisonniers sont morts dans les prisons israéliennes, atteints de nombreuses maladies, faute de suivi médical pendant leur détention, comme Meysara Abu-Hamdiya, Fadi Derby, Zuhair Loubada, Yasser Hamdouna, Mohammed Al-Jallad, Ashraf Abu-Dheria et Zakaria Issa et bien d’autres.
• Le silence complet des médecins au vu des cas pathologiques ayant une maladie mentale et neurologique, qui sont jetés dans des cellules d’isolement sans aucun suivi médical.
• Des erreurs médicales commises au vu et au su des médecins qui passent sous silence les contaminations nombreuses et variées, préméditées dont ont été victimes plusieurs prisonniers dont Sami Abu Diak lors d’une opération pour l’ablation d’une tumeur à l’estomac à l’hôpital Soroka le 03/09/2015 et qui est resté dans le coma, Thaer Halahleh qui a souffert d’une inflammation du foie (hépatite) après une consultation chez le dentiste, dans la clinique de la prison d’Ashkelon, le 16/04/2013 avec des instruments médicaux sales et contaminés, ou encore Othman Abu-Kharaj, qui a souffert lui aussi d’une hépatite suite à l’administration d’un médicament soi disant par erreur, dans la prison Shatta en 2007.
• Le silence de ces médecins face à la souffrance d’une vingtaine de prisonniers handicapés par des blessures et des maladies graves, et maintenues en détention dans la clinique de la prison de Ramleh, appelée le "mouroir de Ramleh" par les prisonniers, qui est une structure inadaptée, qui manque cruellement du minimum nécessaire pour accueillir des personnes malades et surtout handicapées.
• Le silence de ces médecins face à une loi qui autorise l’alimentation forcée des prisonniers en grève de la faim, ce qui est considéré comme une atteinte à la dignité et aux droits du prisonnier en grève et qui représente de surcroît un danger pour sa vie.
• Le silence de ces médecins envers une politique qui tend à faire payer aux prisonniers les frais de traitements et d’opérations chirurgicales, y compris pour les implantations de membres artificiels pour les prisonniers handicapés.
• Le silence de ces médecins face à la torture, et aux menaces infligées aux enfants mineurs pour extorquer des aveux et la non dénonciation de ces procédés qui exposent les enfants prisonniers à un traitement cruel, inhumain et dégradant pendant les interrogatoires et la détention.
Ces médecins violent la Convention de Genève de 1949 et les recommandations adoptées au premier Congrès des Nations Unies en 1955 pour le traitement des détenus et qui se rapportent à l’hébergement, la nourriture, l’hygiène et les soins médicaux fournis aux détenus, comme ils violent les directives de l’Association Médicale Mondiale votées en 1956, qui ont confirmé que la tâche essentielle de la profession médicale est de préserver la santé et de sauvegarder la vie.
De même ces médecins violent la Déclaration de Tokyo de 1975, qui prévoit que le rôle fondamental du médecin est de soulager les souffrances de ses semblables et aucun motif d’ordre personnel collectif ou politique ne pourra prévaloir contre ce noble objectif.
Traduction : Moncef Chahed
Groupe de Travail Prisonniers