Photo : Exercice de la Brigade Nahal de l’armée israélienne, 2021 © Armée israélienne
Il existe un risque évident que les armes et les équipements militaires que le Danemark exporte directement et indirectement vers Israël soient utilisés pour commettre des crimes graves contre les civils à Gaza. Ce faisant, le Danemark viole les règles internationales sur le commerce des armes et risque de se rendre complice de violations du droit humanitaire international - y compris de crimes de guerre - et d’un génocide plausible.
C’est ce qu’estiment quatre organisations de premier plan qui engagent maintenant une action en justice pour faire cesser les exportations danoises d’armes et d’équipements militaires à destination d’Israël. Par cette action, les organisations souhaitent que les tribunaux évaluent si les exportations violent les règles sur le commerce des armes que le Danemark s’est engagé à respecter.
"Depuis cinq mois, nous parlons d’un génocide potentiel à Gaza, mais nous n’avons pas vu les politiques agir. Le Danemark ne devrait pas envoyer d’armes à Israël alors qu’il y a une suspicion raisonnable qu’il commet des crimes de guerre à Gaza. Il nous faut obtenir l’avis du tribunal sur la responsabilité du Danemark", déclare Tim Whyte, secrétaire général de Mellemfolkeligt Samvirke, l’une des organisations à l’origine de l’action en justice.
Le Danemark a adhéré au traité des Nations unies sur le commerce des armes ainsi qu’aux règles communes de l’Union européenne en matière d’exportation d’armements, qui l’obligent à s’assurer de ce que les exportations d’armes et d’équipements militaires par des entreprises danoises ne risquent pas de contribuer à des violations du droit international.
"Nous avons recueilli des informations sur plusieurs bombardements israéliens à Gaza qui ne font pas de distinction entre les cibles civiles et militaires et qui éliminent des familles entières. Ces attaques sont disproportionnées et violent les règles de la guerre. Le Danemark ne doit en aucune manière contribuer à rendre ces attaques illégales contre des civils possibles . En conséquence, nous voulons maintenant que la Cour évalue si le Danemark remplit ses obligations", déclare Vibe Klarup, secrétaire général d’Amnesty International Danemark.
Selon les organisations, le risque que des équipements militaires soient uliisés en violation des règles de la guerre devrait à lui seul inciter l’État danois à mettre un terme aux exportations, conformément au droit international.
"La population de Gaza est affamée, des centaines de milliers de personnes ne trouvent pas d’eau, de nourriture, de médicaments ou d’abris, et 70 % des infrastructures ont été détruites à Gaza. Le Danemark ne doit pas fournir d’armes pour bombarder des civils. Avec ce procès, nous allons vérifier si le Danemark respecte le droit international et les valeurs que nous professons. Nous ne pouvons pas ignorer les violations évidentes du droit humanitaire, les crimes de guerre et l’avertissement d’un génocide potentiel", déclare Lars Koch, secrétaire général d’Oxfam Danemark.
En janvier, la Cour internationale de justice des Nations unies (CIJ) a jugé qu’il était plausible qu’Israël commette un génocide potentiel à Gaza. Et récemment, une cour d’appel des Pays-Bas, à la suite d’une requête d’Oxfam Novib, entre autres, a ordonné à l’État néerlandais de cesser d’exporter des pièces d’avions de chasse F-35 vers Israël. La documentation d’Amnesty a été utilisée comme base dans ces affaires.
Des experts de l’ONU ont également averti récemment que toute vente et fourniture à Israël d’armes qui risquent d’être utilisées à Gaza violerait le droit humanitaire international et doit être stoppée immédiatement.
Outre les trois organisations danoises, l’organisation palestinienne de défense des droits de l’homme Al-Haq est également impliquée dans le procès intenté à l’État danois. La documentation de cette organisation a également été utilisée dans des procès similaires.
« Ce sont des attaques très graves et intensives qui ont lieu à Gaza, où plus de 30 000 personnes ont été tuées et 70 000 blessées. Israël refuse de permettre à la population d’accéder aux besoins fondamentaux tels que la nourriture, l’eau, le carburant et les fournitures médicales. Nous voyons des souffrances indescriptibles pour les civils et les enfants, des amputations sans anesthésie et des évacuations massives vers des lieux horribles. En conséquence, Al-Haq demande instamment au Danemark de cesser d’armer les atrocités qui ont lieu et de mettre fin au génocide du peuple palestinien", déclare Maha Abdallah, membre du conseil d’administration d’Al-Haq.
Les organisations affirment en outre qu’en dépit d’une documentation massive sur les crimes commis par Israël contre les civils palestiniens à Gaza, des avertissements d’experts internationalement reconnus, du procès de la CIJ et de la procédure judiciaire aux Pays-Bas, les exportations d’armes à destination d’Israël se poursuivent sans relâche. C’est pourquoi maintenant, nous saisissons toutes les occasions possibles dans un État démocratique régi par des règles de droit pour faire respecter le droit international, le droit humanitaire et nos obligations.
En tant qu’organisations de la société civile, nous défendons le droit international et les règles et lois internationales qui protègent les civils et leurs droits. Nous invitons les Danois à soutenir financièrement l’action en justice et nous lançons aujourd’hui une campagne de financement participatif.
L’affaire est menée au Danemark par Kontra Advokater.
Pour plus d’informations, veuillez nous contacter :
Heidi Joy Madsen, attachée de presse, Oxfam Danemark, tél. 2019 4430
Malene Haakansson, attachée de presse, Amnesty International Danemark, tél. 2565 2075
Ole Damkjær, chef de presse, Mellemfolkeligt Samvirke, tél. n° 2086 0302
Contexte :
– Pendant plusieurs années, les autorités danoises ont autorisé des entreprises danoises à exporter des composants pour les avions de combat F-35 dans le cadre d’une coopération en matière de défense dirigée par les États-Unis, sans procéder à des évaluations spécifiques du risque de contribuer à des crimes de guerre. Les États-Unis vendent les avions de combat finis à Israël.
– Israël est le premier pays - outre les États-Unis - à déployer les avions de combat.
– Information et Danwatch ont découvert comment les avions de combat israéliens F-35, comprenant des composants danois, ont été utilisés dans les bombardements à Gaza.
– Lors d’une consultation au sein de la commission des affaires étrangères du Parlement danois le 16 janvier 2024, le ministre des affaires étrangères Lars Løkke Rasmussen (M) a annoncé qu’un total de 15 entreprises danoises fournissaient des composants pour les avions de combat F-35.
– La Cour internationale de justice (CIJ) a jugé plausible qu’Israël commette un génocide et a pris des mesures provisoires pour l’empêcher.
– D’éminents experts en droit international estiment que les modalités du processus danois d’autorisation des licences d’exportation d’armes est contraire aux règles internationales sur le commerce des armes, auxquelles le Danemark est tenu de se conformer.
– Le 12 février 2024, une cour d’appel des Pays-Bas a décidé d’ordonner au gouvernement néerlandais d’arrêter les exportations d’armes vers Israël dans le cadre du programme F-35, à la suite d’une action en justice intentée par Oxfam Novib et d’autres. La cour a estimé que la poursuite des exportations constituait une violation des règles communes de l’UE en matière d’exportation d’armes et du traité des Nations unies sur le commerce des armes, dont les Pays-Bas et le Danemark sont tous deux signataires.
– Des experts de l’ONU ont récemment appelé les pays à cesser leurs exportations d’armes s’il existe un risque que ces armes soient utilisées à Gaza.
Traduction : AFPS