Cette semaine, l’Icahd (comité israélien contre les démolitions de maisons) et 12 autres organisations israéliennes relevant des droits de l’homme et de l’action humanitaire ont fait parvenir une déclaration à la Cour de Justice de La Haye, ajoutant par là leur voix à toutes celles qui se sont opposées aux graves violations des droits humains et du droit international humanitaire du fait de la construction du Mur, à l’égard de la population civile palestinienne.
En raison du fait que seule une entité gouvernementale est habilitée à fournir des éléments à la Cour de Justice, nous avons demandé au gouvernement israélien de transmettre notre lettre au nom des organisations israéliennes signataires.
Nous insistons sur le fait qu’il existe différentes opinions sur cette affaire en Israël, et que beaucoup sinon la plupart des Israéliens (y compris le Ministre de la Justice au sein du gouvernement Sharon) s’opposent à la construction du Mur, profondément à l’intérieur des territoires palestiniens, qui ne peut être justifiée pour des raisons de « sécurité ».
Même si Israël argue d’une « nécessité d’ordre militaire » en construisant la « barrière de sécurité », il a pour obligation au titre de la 4ème Convention de Genève d’assurer le bien-être des populations civiles sous son contrôle, ce qui n’est clairement pas le cas ici, puisque des centaines de milliers de civils innocents seront déplacés, enfermés dans des enclaves, et économiquement ruinés (sans compter les implications politiques posées par le Mur).
Ci-après, vous trouverez :
la lettre que nous avons envoyée à la Cour de Justice par l’intermédiaire du gouvernement israélien,
notre lettre de couverture adressée au Premier ministre Sharon et au Ministre des affaires étrangères Sylvan Shalom,
et notre communiqué de presse.
lettre à la cour de justice internationale
25 janvier 2004
Déclaration émanant d’organisations israéliennes pour la paix et les droits humains au sujet de la construction du Mur au sein des territoires palestiniens occupés.
Nous soussigné, les organisations israéliennes pour la paix et les droits humains souhaitons faire entendre nos positions auprès de la Cour de Justice au sujet du Mur actuellement en cours de construction dans les territoires palestiniens occupés, par l’intermédiaire du gouvernement israélien.
En notre qualité de citoyens israéliens, nous sommes préoccupés par le fait que la position du gouvernement israélien au sujet du Mur ne reflète pas notre propre position, non plus qu’elle ne reflète également la position du public israélien. Nous représentons une partie non négligeable de la population qui, en Israël, s’oppose à la construction de ce Mur, et nous en appelons à la Cour pour demander sa destruction, pour les raisons qui suivent.
La construction et la localisation du Mur constituent une infraction grave au droit international humanitaire tel que inter alia établi par la 4ème Convention de Genève. Le Mur est en réalité un système complexe de murs et de barrières électroniques qui entourent et isolent des dizaines de milliers de Palestiniens qui n’ont commis aucune infraction. Alors qu’Israël a clairement la responsabilité d’assurer la défense de ses citoyens contre le terrorisme et toute autre attaque, nous prétendons que le Mur, quoique présenté au public comme une mesure de sécurité, constitue en réalité une frontière de nature politique qui détermine un état de type Bantoustan, qu’Israël prévoit pour les Palestiniens de Cisjordanie.
Ceci découle du tracé même du Mur qui, en enveloppant les zones A et B, crée des « cantons » (comme le Premier ministre Sharon les a lui-même dénommés), dans lesquels les Palestiniens seront confinés.
De fait, le Mur s’enfonce profondément au sein des territoires palestiniens de façon à envelopper les « blocs de colonies », permettant par là l’extension de la présence israélienne, tant civile que militaire, loin à l’intérieur des territoires palestiniens. Ce tracé révèle clairement que le Mur est destiné à servir des objectifs politiques, et non de sécurité. Il permettra de déterminer, de façon unilatérale, une frontière qui assure le contrôle à Israël de toute la région entre la Méditerranée et le Jourdain.
Israël argue d’une « nécessité d’ordre militaire » pour justifier le Mur. Le droit international humanitaire, toutefois, impose le respect d’un dosage entre la nécessité militaire d’une part et le bien-être de populations civiles sous occupation d’autre part. La 4ème Convention de Genève contraint la puissance occupante à respecter et à assurer les droits fondamentaux des populations civiles quant à la sécurité, à la dignité, aux moyens d’existence, à la liberté de mouvement, et au droit de propriété, comme à l’éducation et aux soins médicaux, droits qui sont dans leur ensemble et irrémédiablement mis en péril du fait du tracé du mur et du fait de sa structure, en sus de la limitation des mouvements qu’il entraîne.
En dépit des sérieuses répercussions liées à sa construction, aucune étude n’a été lancée par le gouvernement israélien pour en mesurer les conséquences sur la population civile palestinienne.
Egalement, la 4ème Convention de Genève interdit à une puissance occupante de donner un caractère permanent à cette occupation. La construction d’un système d’importantes barrières, murs, barrières électroniques, routes de sécurité, barrages, check-points et installations militaires coûtant entre 2 et 3 Milliards de Dollars, rend justement possible la permanence, notamment lorsque l’on prend en compte la modification de fond de l’usage des terres, la démographie, le transfert de populations en découlant, et autres changements irréversibles quant à la vie même des Palestiniens du fait de la présence de ce Mur.
Nous les soussigné avons pris contact avec le Ministre des affaires étrangères en vue de lui demander d’ajouter cette déclaration aux documents qui seront présentés à la Cour. Nous soutenons que, sur la base de preuves irréfutables, le Mur selon son tracé actuel constitue une grave violation des droits humains fondamentaux, qu’il se fonde sur des motifs politiques plus que sécuritaires, et qu’il érige un obstacle majeur à une paix juste et durable entre les peuples palestinien et israélien.
Nous déclarons à la fois au gouvernement israélien et à la Cour : Pas en notre nom. La justice exige non seulement que le Mur soit condamné, mais aussi qu’il soit immédiatement démantelé.
Pour une Paix Juste :
The Aternative Information Center (A joint Israeli-Palestinian organization) - Centre Alternatif d’Information
Bat Shalom - Les femmes de la paix
The Coalition of Women for a Just Peace - La coalition des femmes pour une paix juste
The Fifth Mother - La cinquième mère
Gush Shalom - Le bloc de la paix
The Israeli Committee Against House Demolitions (ICAHD) - Le comité israélien contre les demolitions de maisons
MachsomWatch - Contrôle des check-points
New Profile - Nouveau profil
Noga
Rabbis for Human Rights - Les Rabbins pour les droits humains
Tandi
Women in Black - Les femmes en noir
Yesh Gvul - Il y a une limite
lettre de couverture au gouvernement israélien
25 janvier 2004
A : Premier ministre Ariel Sharon ; Ministre des affaires étrangères Sylvan Shalom
ASSURER LA DEFENSE DU MUR AUPRES DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE :
PAS EN NOTRE NOM !
Fin février, la Cour Internationale de Justice de La Haye entamera les débats au sujet du « Mur de séparation » que notre gouvernement construit très à l’intérieur des zones palestiniennes en Cisjordanie, et à un rythme accéléré. Selon les médias israéliens, vous avez l’intention de défendre votre politique aux motifs que le Mur relève du domaine de la sécurité, ayant pour objectif de prévenir d’attaques terroristes.
Il semble adéquat, en vertu des principes démocratiques, que vous informiez également la Cour que vos représentants, au niveau des arguments qu’ils vont présenter, ne s’expriment pas au nom de la totalité du public israélien.
En construisant ainsi le Mur, et tout particulièrement compte tenu du fait qu’il constitue un « fait » politique plus qu’une vraie barrière de sécurité et que vous défiez le droit international comme l’opinion publique, votre gouvernement et ses avocats ne s’expriment pas en notre nom.
Nous soussigné, citoyens d’Israël, à qui le Mur est supposé apporter la sécurité, rejetons complètement votre argumentation. Si vous cherchiez sincèrement à prévenir l’entrée de kamikazes en Israël, vous auriez pu construire ce Mur le long de la Ligne Verte, la frontière de facto reconnue de l’état d’Israël, comme vous l’ont suggéré la plupart de vos généraux en vue, et à un coût bien moindre.
Le Mur que vous construisez aboutit à voler la terre et les moyens d’existence de centaines de milliers de Palestiniens, mais également élimine des ressources cruciales de votre propre société de plus en plus appauvrie et désespérée.
Si votre gouvernement souhaitait sincèrement mettre fin au terrorisme et assurer la sécurité de notre peuple, il aurait activement engagé un processus politique et se serait empêché d’agir unilatéralement en construisant un Mur qui ne fait que perpétuer l’Occupation et le conflit. De cette façon, vous auriez mis fin à la misère, à la haine et à la répression qui motivent les attaques et mettent nos vies en danger. Ceci nous aurait préservés à tout le moins de la simple pensée que nous avions besoin d’un tel Mur.
Il n’y a d’autre conclusion que celle de savoir que votre objectif réel en construisant ce Mur, selon son tracé actuel intrusif et indéfendable, est de nature politique plutôt que fondé sur de simples préoccupations sécuritaires. L’objectif est de se saisir de plus en plus de terres palestiniennes, d’annexer de grands ensembles de colonies et in fine de rendre impossible la création d’un état palestinien viable. Nous refusons de faire partie de l’une quelconque de ces tentatives, auxquelles nous nous opposons complètement. Vos représentants par devant la Cour de Justice ne s’expriment pas en notre nom, non plus qu’au nom de millions d’Israéliens qui désirent avant tout la fin du conflit.
Nous exigeons que vous transmettiez la lettre ci-jointe dans laquelle nous exprimons notre opposition au Mur, en raison du fait qu’il constitue une grave violation des droits humains des Palestiniens, du droit international humanitaire et du souhait de nos deux peuples quant à une paix juste et durable.
Dans l’attente de votre réponse,
(signé : les 13 organisations)
COMMUNIQUE DE PRESSE - 27 janvier 2004
Les organisations israéliennes pour la paix, au premiet ministre Sharon :
PAS EN NOTRE NOM !
Ne justifiez pas le mur à la cour de justice internationale
Le « Mur de séparation » viole le droit international, qui rend la puissance occupante responsable du bien-être des populations civiles placées sous son contrôle.
Les organisations israéliennes pour la paix et les droits humains demandent que le gouvernement ajoute leur opposition au Mur dans le dossier préparé par Israël et adressé à la Cour internationale de La Haye.
Nous déclarons à la fois au gouvernement israélien et à la Cour : ce n’est « pas en notre nom » que vous justifierez du Mur en l’état actuel de son tracé qui crée une réalité politique sur le terrain, dont les conséquences sont une occupation permanente, la répression des droits humains fondamentaux des Palestiniens et la perpétuation du conflit.
Hier, le 26 janvier, une douzaine d’organisations israéliennes pour la paix et les droits humains ont remis au Premier ministre Ariel Sharon et au Ministre des affaires étrangères Sylvan Shalom une déclaration selon laquelle le Mur de séparation constitue une grave violation de la 4ème Convention de Genève, qui impose un juste dosage entre les préoccupations sécuritaires de la puissance occupante d’une part et le bien-être de la population civile placée sous son contrôle d’autre part.
Les organisations israéliennes pour la paix et les droits humains se sont adressées au gouvernement israélien en demandant qu’il ajoute aux documents qui seront remis à la Cour de Justice de La Haye leur opposition au Mur, opposition fondée sur des arguments précis relevant de droit international humanitaire.
La lettre indique : « Nous déclarons à la fois au gouvernement israélien et à la Cour : Pas en notre nom. La justice exige non seulement que le Mur soit condamné, mais aussi qu’il soit immédiatement démantelé ».
En notre qualité de citoyens israéliens, nous sommes préoccupés par le fait que la position du gouvernement israélien au sujet du Mur ne reflète pas notre propre position, non plus qu’elle ne reflète également la position du public israélien.
Nous représentons une partie non négligeable de la population qui, en Israël, s’oppose à la construction de ce Mur, et nous en appelons à la Cour pour demander sa destruction
signé : les 13 organisations