En août, les autorités israéliennes ont perquisitionné les bureaux de sept organisations de la société civile palestinienne et ont ordonné leur fermeture dans le but de mettre un terme à leur travail et de réduire davantage les Palestiniens au silence. En réponse à cette escalade alarmante dans la répression de nos partenaires palestiniens, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), Amnesty International et Human Rights Watch (HRW) se sont réunis en délégation dans les Territoires palestiniens occupés (TPO) pour exprimer leur soutien à la société civile palestinienne et lutter contre l’occupation abusive et prolongée, l’annexion, l’impunité et l’apartheid.
(Ramallah) - Dans la foulée de la dernière série d’hostilités à Gaza, les autorités israéliennes ont intensifié leur assaut contre les défenseurs des droits humains et les organisations de la société civile palestiniennes en Cisjordanie occupée. En août, les forces armées israéliennes ont effectué des descentes dans sept importantes organisations de la société civile palestinienne, dont six ont été arbitrairement mises hors la loi et qualifiées de " groupes terroristes " en octobre 2021.
Ces raids menés par les autorités israéliennes pour faire taire les groupes palestiniens visent à entraver le travail de documentation sur les droits humains et à punir ceux qui critiquent les violations des droits humains et du droit international commises par les autorités israéliennes et demandent des comptes, notamment pour l’apartheid et la persécution de millions de Palestiniens. L’apartheid et la persécution sont punissables en tant que crimes contre l’humanité et relèvent de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI). Le procureur de la CPI mène une enquête ouverte sur les crimes graves commis en Palestine, ce qui offre la possibilité de s’attaquer à l’impunité d’Israël qui a alimenté des violations des droits de l’Homme et des crimes de droit international répétés et de longue date.
Une réaction à une attaque sans précédent contre la société civile en Palestine et en Israël
"Dans une période de tension globale et de dégradation des droits de l’Homme à travers le monde, dans laquelle Israël joue son rôle de longue date, le gouvernement israélien sous la direction de Naftali Bennet et de Yair Lapid, ne se gêne pas pour renforcer la répression du peuple palestinien et supprimer toute tentative d’opposition", a déclaré la présidente d’honneur de la FIDH, Souhayr Belhassen, avant d’ajouter : "Si la FIDH affirme sa solidarité indéfectible avec les droits des Palestiniens à l’autodétermination, nous appelons la communauté internationale à faire preuve de la même fermeté face aux actions d’Israël qui ne peuvent être qualifiées que d’État voyou."
Alexis Deswaef, vice-président de la FIDH et avocat spécialisé dans les droits de l’Homme a également commenté : "Le brouillage des pistes dans tous les aspects de la politique intérieure, l’étiquetage abusif d’"organisation terroriste" couplé au détournement de la législation antiterroriste s’inscrit dans un processus cohérent d’étranglement de la société civile en Palestine et en Israël."
Shawan Jabarin, directeur général d’Al-Haq, et secrétaire général de la FIDH a affirmé : "Loin de laisser le champ libre pour que les prochaines élections législatives se déroulent sans encombre en Israël, ces raids ont montré le peu de sens de la démocratie lorsque son antithèse est appliquée ailleurs sur un peuple opprimé. Le peuple palestinien mérite de vivre dans la liberté et la dignité et pour cela, notre travail pour demander des comptes à Israël est vital. Malgré les attaques dont nous faisons l’objet, nous continuerons à nous acquitter de notre devoir de protection de l’État de droit et des droits humains du peuple palestinien, notamment de son droit collectif à l’autodétermination et du droit au retour des réfugiés, et nous continuerons à protéger le droit international et les droits humains dans le monde entier."
Nathalie Godard, directrice des campagnes d’Amnesty International en France, a déclaré : "La répression de l’espace civique palestinien fait partie du système d’apartheid. Non seulement les Palestiniens sont sous occupation militaire israélienne, menée avec de multiples violations du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits humains, mais les organisations et les défenseurs des droits humains qui cherchent à aider les personnes dans le besoin sont également fermés. Amnesty demande à Israël d’annuler la qualification de " terrorisme " des six organisations et d’annuler les ordres militaires de fermeture des bureaux de ces organisations. Le personnel et les directeurs de ces ONG doivent être autorisés à mener leurs activités de défense des droits humains, d’aide sociale et de recherche sans être harcelés. Salah Hammouri devrait être immédiatement libéré, à moins qu’il ne soit accusé d’un crime internationalement reconnu, et la menace de son expulsion de Jérusalem devrait être levée."
Sari Bashi, directrice des programmes de Human Rights Watch, a déclaré : "Human Rights Watch est honoré de travailler avec nos partenaires palestiniens, qui représentent le meilleur de la société civile mondiale : défendre les enfants dans les tribunaux militaires, plaider pour la justice internationale, aider les agriculteurs à rester sur leurs terres et soutenir les femmes dans la gestion de leurs entreprises. Le service communautaire et l’activisme pacifique ne sont pas du terrorisme."
Les États doivent imposer des conséquences significatives aux actions d’Israël
L’escalade d’août dernier intervient après les dénigrements sans fondement qui ont entravé le financement et la représentation juridique des organisations palestiniennes de défense des droits humains, le piratage téléphonique, d’autres formes de surveillance, des arrestations arbitraires et des interdictions de voyager contre les membres du personnel. Mais malgré le harcèlement continu contre ces organisations, elles ont poursuivi leur travail vital en fournissant une assistance humanitaire essentielle et des services d’aide sociale aux communautés palestiniennes, en menant des recherches, en documentant les violations des droits en Palestine, et en luttant contre l’impunité.
Les États devraient appeler le gouvernement israélien à annuler les désignations de ces groupes palestiniens de défense des droits et à leur permettre de poursuivre leur travail essentiel sans entrave. Avec la récente reprise du Conseil d’association UE-Israël, principal organe diplomatique de l’Union européenne chargé de promouvoir les relations intergouvernementales, les gouvernements européens doivent montrer qu’ils ne sont pas disposés à transiger sur leurs valeurs déclarées, placer les droits humains au centre de leur politique à l’égard d’Israël et de la Palestine, et mettre fin à toutes les activités qui contribuent à l’apartheid et à la poursuite de la répression du peuple palestinien. Dans l’ensemble, tous les États devraient indiquer clairement qu’ils imposeront des conséquences significatives au gouvernement israélien si celui-ci ne change pas de cap.
Déclaration conjointe d’Amnesty International, de la Fédération Internationale des Droits Humains et de Human Rights Watch
Photo : Maxime Duriez / FIDH
Traduction et mise en page : AFPS / DD