[Hier], les organisations palestiniennes de défense des droits de l’homme Al-Haq, Al Mezan et le Centre palestinien pour les droits de l’homme (PCHR) ont soumis au Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) une description et une analyse détaillées des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis lors de l’offensive militaire israélienne de mai 2021 contre les civils palestiniens de la bande de Gaza.
"L’attaque du 20 mai 2021 contre Gaza n’est que l’exemple le plus récent d’une série d’opérations militaires hautement destructrices visant à causer des dégâts et des préjudices disproportionnés à la population civile de la bande de Gaza, qui est soumise à un blocus illégal depuis 15 ans", a déclaré Raji Sourani, le directeur de la PCHR.
L’opération, dont le nom de code est "Opération Gardien des Murs", s’est déroulée dans le contexte d’une vague de répression exceptionnellement violente de la part des autorités israéliennes dans toute la Palestine occupée : les tensions sont montées d’un cran après que des tribunaux israéliens aient ordonné l’expulsion de familles palestiniennes de leurs maisons dans le quartier de Sheikh Jarrah, à Jérusalem-Est occupée, et le transfert de ces terres à des colons israéliens. Ces événements ont entraîné des protestations dans tout le territoire palestinien, auxquelles Israël a répondu par une intensification de la répression et le recours à la force militaire et à la violence. À Jérusalem et à l’intérieur de la ligne verte, cela s’est traduit par des vagues d’arrestations arbitraires, des violences policières et des lynchages de Palestiniens par des foules d’extrémistes israéliens, tout en bénéficiant de la protection et du soutien des autorités.
La bande de Gaza, quant à elle, a été écrasée par un assaut militaire de grande envergure, consistant en 11 jours de bombardements intensifs qui ont fait 240 morts et 1968 blessés parmi les Palestiniens.
Bien que ces événements constituent le contexte dans lequel les faits doivent être examinés, l’analyse fournie dans le dossier se concentre spécifiquement sur les crimes internationaux commis à Gaza, dans la continuité des précédentes attaques militaires contre la bande de Gaza et de son blocus illégal, qui est sur le point de franchir le cap des 15 ans.
Le rapport conclut que des crimes graves relevant de la compétence de la Cour ont été commis à grande échelle par les autorités israéliennes contre les civils palestiniens et les infrastructures civiles de Gaza, notamment des crimes d’homicide volontaire, d’atteinte volontaire à l’intégrité physique ou à la santé, de destruction massive de biens, d’attaques intentionnelles contre des biens civils et d’usage disproportionné de la force, dans le cadre d’une occupation militaire, donc dans le contexte d’un conflit armé international et en relation avec celui-ci.
"La commission de ces crimes doit être considérée dans le contexte de l’occupation militaire prolongée par Israël de l’ensemble du territoire palestinien, et de la commission généralisée de crimes systémiques contre l’humanité, y compris l’apartheid, et de graves crimes de guerre", affirme Shawan Jabareen, directeur d’Al-Haq.
Comme cela a déjà été décrit en détail dans un autre document présenté par les organisations non signataires à la Cour en novembre 2017, et souligné par divers rapports indépendants de haut niveau (y compris par des comités de l’ONU), la structure du système d’enquête israélien empêche la réalisation d’enquêtes indépendantes et impartiales efficaces, puisque 79% des plaintes pénales présentées à l’Avocat général de l’armée israélienne n’ont reçu aucune réponse substantielle.
"Les victimes ont déjà attendu trop longtemps. Combien de temps encore les Palestiniens de Gaza devront-ils attendre avant que la CPI ne demande des comptes aux responsables israéliens ?", a déclaré Issam Younis, directeur général d’Al Mezan.
La soumission conclut que seule une enquête rapide, concrète et complète et l’ouverture par la CPI d’affaires spécifiques à l’encontre d’accusés israéliens individuels peuvent mettre fin à l’impunité dont jouissent depuis des décennies les crimes commis contre les Palestiniens, entraver éventuellement leur perpétration continue et actuelle et contribuer à la prévention de nouveaux crimes. Le droit international a été violé sans relâche et de manière flagrante par les forces israéliennes depuis l’occupation de la Palestine, en violation de la plupart des dispositions du droit international traditionnel et coutumier, compromettant et annihilant toute perspective d’un "processus de paix" conduisant à une résolution juste. Des poursuites efficaces sont donc absolument nécessaires, car elles constituent la dernière ressource pour restaurer le respect et l’application de la justice internationale.
Raji Sourani, Directeur, PCHR
Shawan Jabarin, Directeur, Al Haq
Issam Younis, Directeur, Al Mezan
Traduction : AFPS