Photo : une ambulance bloquée par l’armée israélienne le 26 juillet 2023 à Naplouse. Crédit : Quds News Network.
Le dernier raid israélien sur le camp de réfugiés de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie occupée, le mois dernier, a été qualifié de "massacre" par les responsables locaux et les habitants et condamné par les Nations unies, mais il est loin d’être unique en termes d’ampleur et de brutalité.
Dans un communiqué publié samedi à l’occasion de la Journée mondiale de l’humanitaire, Lynn Hastings, coordinatrice humanitaire des Nations unies, a déclaré que 77 professionnels de la santé avaient été blessés et 30 ambulances endommagées en tentant d’aider les habitants du territoire occupé jusqu’à présent en 2023, que ce soit lors de raids ou de manifestations ou simplement lors de journées normales.
Les premiers secours - organisations non gouvernementales travaillant avec des bénévoles, des médecins, des infirmières, des employés municipaux et autres - mettent souvent leur vie en danger lorsqu’ils apportent leur aide, a déclaré madame Hastings.
Ils sont entravés "par l’occupation israélienne, les restrictions de mouvement, les divisions politiques, les conflits récurrents et même les efforts visant à dénigrer leur travail" a déclaré madame Hastings.
D’innombrables témoignages de secouristes sur le terrain au fil des ans ont mis en évidence les pratiques délibérées d’Israël en matière de ciblage des secouristes qui ne semble pas prêt d’y mettre un terme.
Le personnel médical pris pour cible
Omar Azzam, coordinateur droit international humanitaire à la Société du Croissant-Rouge palestinien, a déclaré à Al Jazeera que les forces israéliennes avaient commis 193 violations à l’encontre de son personnel médical en Cisjordanie occupée à ce jour en 2023.
Il s’agit notamment d’attaques directes sur le terrain, d’attaques contre des ambulances, de refus et d’obstruction de l’accès, et de ciblage des blessés et des malades.
"Rien qu’en juillet, dix attaques directes ont été enregistrées contre le personnel médical, par gaz et tirs réels, la dernière ayant touché un volontaire dans le camp d’Askar alors qu’il prodiguait des soins" a déclaré monsieur Azzam. "Il portait un badge, mais il a reçu une balle dans le pied, ce qui signifie que c’était intentionnel."
À Jérusalem, l’équipe de monsieur Azzam a recensé 314 cas dans lesquels des secouristes ont été empêchés de se rendre à un endroit ou ont été contraints de changer de véhicule sans tenir compte de la sécurité des patients jusqu’à la fin du mois de juin.
Ils ont également signalé 80 cas dans lesquels les ambulanciers se sont vu refuser l’accès complet aux blessés par les forces israéliennes et 41 cas où ils ont été retardés ou entravés.
De plus, neuf patients ont été kidnappés alors qu’ils recevaient un traitement médical, ce qui arrive même à l’intérieur des ambulances.
Azzam a déclaré que lors du dernier raid à Jénine, "un patient, dans un état critique, a été interrogé à l’intérieur de l’ambulance, puis arrêté et transféré à une patrouille militaire. Les ambulanciers ont aussi été agressés."
"J’ai rampé sur le sol"
Hamza Abu Hajar, bénévole à la Société du secours médical palestinien de Naplouse, a payé un lourd tribut au cours des six années pendant lesquelles il a apporté son aide.
Ce jeune homme de 27 ans a expliqué à Al Jazeera qu’il avait reçu une balle dans la poitrine lors d’un raid israélien à Naplouse en décembre dernier et qu’il a lutté pour sa vie en soins intensifs pendant plusieurs jours.
"Huit mois après la blessure, je souffre toujours de complications dues aux balles qui ont pénétré dans ma poitrine et sont ressorties par mon dos" a-t-il déclaré.
"Au fil des ans, j’ai subi de nombreuses attaques de la part des forces d’occupation, notamment lorsqu’elles tirent des balles, des gaz lacrymogènes et des bombes assourdissantes pour m’empêcher d’atteindre les blessés, ou même lorsque des patrouilles de l’occupation m’attaquent directement."
Amir Ahmad Amir, bénévole au Croissant-Rouge de Naplouse, s’est fait tiré dessus par les forces israéliennes le mois dernier.
Ce jeune homme de 25 ans, qui est devenu père il y a trois mois, se trouvait dans le camp de réfugiés d’Askar à Naplouse et tentait d’apporter une assistance médicale à un enfant lorsqu’il a été touché à trois reprises aux deux jambes par des tireurs d’élite israéliens.
"J’ai rampé sur le sol pour essayer d’atteindre un mur, mais les balles me visaient, directement et délibérément. Certaines d’entre elles ont traversé les chaussures que je portais" a-t-il déclaré à Al Jazeera depuis un hôpital où il doit subir une opération pour soigner des dommages sur ses nerfs.
Après l’opération de juillet à Jénine, Israël a déclaré "veiller à ce que l’aide humanitaire soit fournie et n’appliquer aucune restriction à l’accès du personnel médical, sauf dans les endroits où la vie du personnel médical est menacée en raison d’échanges de tirs."
Traduction : AFPS