Photo : vue sur le camp de Balata à Naplouse en 1950. Source : Palestine remember.
Les attaques contre les camps de réfugiés sont devenues monnaie courante à Gaza depuis le début de la dernière vague de violence, le 7 octobre.
Lundi, au moins 151 Palestiniens ont été tués et 313 blessés lors d’une attaque israélienne contre le camp de réfugiés de Jabalia. Beaucoup des victimes sont encore sous les décombres.
Par ailleurs, les forces israéliennes ont abattu quatre Palestiniens, dont deux enfants, lors d’un raid militaire dans le camp de réfugiés d’al-Faria, dans la ville de Tubas, en Cisjordanie occupée.
Alors que la plupart des camps de réfugiés sont mis en place à titre temporaire à la suite de conflits ou de catastrophes naturelles, les camps de réfugiés dans les territoires palestiniens occupés sont une réalité depuis 1948.
Plutôt qu’un simple ensemble de tentes arborant les logos des Nations unies, les camps se sont transformés en quartiers construits, avec des écoles, des mosquées, des magasins et d’autres commodités, ce qui a conduit certains à se demander s’il s’agissait encore de camps de réfugiés.
1948 : La Nakba
En 1948, la guerre d’indépendance israélienne - connue sous le nom de Nakba ou "catastrophe" en arabe - a vu plus de 700 000 Palestiniens expulsés de chez eux par les milices sionistes.
Beaucoup ont fui dans les États arabes voisins, d’autres dans différentes parties de la Palestine historique, où ils ont été contraints de s’installer dans des camps de réfugiés montés à la hâte.
En réaction, les Nations unies récemment constituées ont créé l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), qui gère depuis lors les camps et une grande partie de la vie quotidienne des réfugiés palestiniens.
Selon l’UNRWA, environ 5,9 millions de réfugiés palestiniens peuvent bénéficier de ses services dans 58 camps établis au Liban, en Jordanie, en Syrie, en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et dans la bande de Gaza.
En vertu du droit international, les réfugiés de 1948 et leurs descendants sont considérés comme des réfugiés jusqu’à ce qu’une "solution durable" soit trouvée.
"Les situations de réfugiés prolongées sont le résultat de l’incapacité à trouver des solutions politiques aux crises politiques sous-jacentes", explique l’Unrwa sur son site web.
Gaza, qui compte environ 2,1 millions d’habitants, dont 1,7 million de réfugiés, compte huit camps :
– le camp de Rafah
– le camp de Jabalia
– le camp de Khan Younis
– le camp d’Al-Shati
– le camp de Nuseirat
– le camp de Bureij
– le camp de Maghazi
– le camp de Deir al-Balah
Les camps de Gaza ont plus souffert que la majeure partie du territoire depuis qu’Israël a imposé un blocus en 2007.
Selon l’UNRWA, les camps - qui comptent parmi les zones les plus densément peuplées de la planète - souffrent depuis longtemps de graves problèmes liés aux soins de santé, à l’accès à l’eau, à l’approvisionnement en nourriture, à l’électricité, à l’assainissement et à d’autres questions, même avant les bombardements israéliens incessants qui ont débuté en octobre.
Le taux de chômage dans les camps s’élevait à 48,1 % au troisième trimestre 2022, tandis qu’environ 95 % de la population des camps n’a pas d’accès régulier à l’eau potable.
Selon les chiffres d’avant-guerre, les camps de Gaza comptent 620 000 personnes entassées sur moins de 6,5 kilomètres carrés.
Une source de résistance
Depuis 1948, les camps ont été une source cruciale de recrutement pour le mouvement de libération palestinien. De nombreux groupes palestiniens armés et des organisations de la société civile y ont vu le jour et s’y sont développés.
Ahmed Yassin, le fondateur le plus important du mouvement Hamas, s’est retrouvé dans le camp d’al-Shati avec le reste de sa famille après que les milices sionistes ont détruit leur village dans ce qui est aujourd’hui Israël.
Fathi Shaqaqi, cofondateur du mouvement du Jihad islamique, est né dans le camp de Rafah.
C’est à Jabalia qu’a débuté la première Intifada, un soulèvement contre la domination israélienne en Palestine, en 1987, à la suite des funérailles de trois résidents du camp tués après qu’un camion-citerne de l’armée israélienne a percuté une rangée de voitures.
Israël considère depuis longtemps les camps comme un terrain propice au "terrorisme" et les a régulièrement visés par des frappes aériennes au fil des décennies, affirmant qu’ils sont peuplés de tunnels, d’armes et de centres de commandement contrôlés par le Hamas et d’autres groupes armés.
Depuis le 7 octobre
L’attaque de lundi sur le camp de Jabalia n’est que la dernière des attaques répétées sur les camps de Gaza depuis le 7 octobre, date à laquelle le Hamas a attaqué le sud d’Israël, tuant environ 1 200 Israéliens et capturant 240 personnes.
Tous les camps ont été attaqués par les forces israéliennes depuis la reprise des hostilités, Jabalia étant le plus touché, réduit à l’état de ruines et comptant des centaines de morts.
En deux jours d’attaques fin octobre, le ministère de la santé de Gaza a déclaré que 195 personnes avaient été tuées. L’armée israélienne a déclaré dans un communiqué qu’elle avait réussi à tuer le chef de l’unité du Hamas contre les missiles de combat, Mohammed Asar, au cours de l’opération.
Le Bureau des droits de l’Homme des Nations unies a averti que "compte tenu du nombre élevé de victimes civiles et de l’ampleur des destructions à la suite des frappes aériennes israéliennes sur le camp de réfugiés de Jabalia, nous craignons sérieusement qu’il s’agisse d’attaques disproportionnées qui pourraient être assimilées à des crimes de guerre".
Plus de 80 % de la population de Gaza a été déplacée depuis le début de la guerre. La majorité d’entre eux sont les descendants immédiats de ceux qui avaient déjà été expulsés de leurs maisons lors de la création d’Israël, une triste ironie que beaucoup relèvent.
Alex Mac Donald, militant anti-guerre états-unien.
Traduction : AFPS