Thomas Pellas a depuis été maintenu en détention au sein d’une colonie (Ariel) avec sept autres internationaux puis expulsé tout aussi illégalement le 18 juillet.
Ces pratiques illégales israéliennes s’inscrivent dans une stratégie qui vise à empêcher la présence de tout témoin international des pratiques de l’armée d’occupation en Palestine.
Expulsions, menaces et même assassinats, sont devenus partie prenante de cette stratégie israélienne qui vise à mener la guerre coloniale à huis-clos.
Parallèlement, Israël s’emploie à déployer une campagne de propagande pour criminaliser toute organisation de solidarité internationale pour la protection du peuple palestinien, à commencer par ISM.
L’AFPS, qui soutient l’ensemble des actions juridiques entreprises par Thomas Pellas, exige du gouvernement français :
Une protestation officielle et publique contre ces pratiques israéliennes illégales d’arrestation, de détention (dans des colonies) et d’expulsion de volontaires internationaux accompagnée de mesures de rétorsion.
Une réelle intervention en faveur de l’envoi d’une force de protection internationale.
Des pressions sérieuses sur Israël.
Paris, le 22 juillet 2003
Annexe :
Témoignage de Thomas Pellas
ARRESTATION, DETENTION ET EXPULSION DE PACIFISTES INTERNATIONAUX EN ISRAEL-PALESTINE
Je suis entré en Israël le 30 juin dernier pour participer à un projet d’assistance civile dans le cadre de l’association France-Palestine Solidarité (je suis membre du bureau du groupe local Paris Sud). Ce projet consistait à suivre l’aménagement d’une aire de jeux, financée par l’association, pour l’école primaire des Bédouins Jahalin (déportés par Israël de leur Néguev ancestral en 1950, et vivant depuis dans un bidonville de la banlieue de Jérusalem-Est, au pied de la grande colonie israélienne de Maalé Adumim), et à y animer des ateliers pour les enfants (anglais, mathématiques, activités artistiques et sportives).
En contact avec des membres d’ISM (International Solidarity Mouvment, dédié à la protection et défense des intérêts des Palestiniens sous occupation israélienne) afin d’obtenir notamment leur aide pour l’acheminement des équipements pour l’aire de jeux (balançoires, toboggans), je me suis joint à l’une de leurs initiatives, qui sont toutes strictement pacifistes et non-violentes, le 10 juillet au sud de Naplouse, en Palestine occupée.
En concertation avec des responsables palestiniens des villages de Til et d’Iraq Bourin, une vingtaine de pacifistes internationaux, dont je faisais partie, ont aidé un bulldozer palestinien qui tentait d’ouvrir la route reliant ces deux villages à la ville de Naplouse, bloquée par trois barrages mis en place par Israël et constitués de sable et de grosses pierres. Les blocages des routes sont destinés à empêcher toute liberté de circulation à l’intérieur des Territoires occupés. Alors que le bulldozer travaillait à réduire le dernier barrage, quatre fantassins et deux jeeps de l’armée israélienne d’occupation sont arrivés. Après des tirs de grenades lacrymogènes, des coups de feu en l’air, puis des menaces d’abattre le conducteur palestinien effectués par l’armée israélienne - et donc la création par les militaires d’une situation générale d’extrême violence - des négociations menées avec les militaires israéliens nous ont permis d’aboutir à ce qu’aucune arrestation ne soit opérée, en échange de la remise en état des barrages. La remise en état exécutée, l’armée a annoncé qu’elle allait finalement saisir le bulldozer et arrêter son conducteur palestinien. Les pacifistes se sont alors interposés de manière non-violente . Nous sommes six, dont deux pacifistes Israéliens, à avoir alors été mis en état d’arrestation.
La veille, le 9 juillet, quatre autres internationaux avaient été violemment interpellés près de Jénine (tête plaquée contre le sol, coups de pieds dans les côtes, soulevés du sol par les menottes), alors qu’ils manifestaient pacifiquement, sous une tente, contre la confiscation de terres palestiniennes destinées à la construction du Mur d’annexion et de séparation (dit « de sécurité » par l’état d’Israël).
Le 11 juillet, moins de 24 heures après notre arrestation, les deux Israéliens qui étaient avec nous ont été libérés, sans qu’aucune charge n’ait été émise à leur encontre. La discrimination dont ont été victimes les Internationaux (non Israéliens) est patente. Noter que le Ministère des Affaires Etrangères français a vivement protesté auprès de l’ambassadeur d’Israël à Paris sur de telles pratiques discriminatoires (ainsi que sur les conditions de notre détention).
Nous avons tous été incarcérés dans le centre de police de la colonie d’Ariel située au sud de Naplouse (illégale, comme toutes les colonies israéliennes, au regard du droit international), où nous avons subi interrogatoires et intimidations. Les conditions pénibles de détention, ainsi que plusieurs violations des droits de l’homme sont à souligner :
. à notre arrivée, nos affaires personnelles ont été confisquées (en particulier, l’un d’entre nous, sujet à des crises d’asthme, est resté cinq jours privé de la Ventoline dont il était porteur) ;
. nous étions huit, entassés dans une cellule exiguë (environ 13m2), sans fenêtre, la lumière électrique allumée en permanence ;
. pendant toute la durée de notre détention ( 8 jours en ce qui me concerne) nous avons été privés de promenade quotidienne ;
. les possibilités de joindre nos avocats, ainsi que nos familles, ont été extrêmement réduites ;
. l’accès à la « cantine » nous était interdit, nous ne pouvions donc acheter cartes de téléphone, cigarettes, biscuits, café, sucre etc ?
. l’un d’entre nous, un Canado-Palestinien, a subi des violences graves (coups et clés de bras musclées) alors que des gardiens l’emmenaient pour un énième interrogatoire. Ceci constitue également une pratique scandaleusement discriminatoire.
Nous avons été présentés une première fois devant un juge du Tribunal de Tel-Aviv le dimanche 13 juillet : celui-ci a alors renvoyé les parties estimant que les charges portées contre nous par l’armée israélienne étaient insuffisantes, mais refusant néanmoins notre mise en liberté sous caution, au motif
que nous représentions « un grave danger pour l’ordre public ».
Le 17 juillet le tribunal a ordonné notre expulsion dans les plus brefs délais, sans que la preuve de l’illégalité de nos activités (pacisfistes) n’ait été à aucun moment établie par le procureur Israélien . Les quatre pacifistes arrêtés à Jénine ont fait appel (notamment en raison des violences physiques subies) devant la Haute Cour de justice, et deux d’entre eux (un Palestino-Canadien et un Suédois) se trouvent encore en détention à Ariel jusqu’à la date de l’audience.
J’ai été expulsé le 18 juillet sur un vol de la compagnie israélienne El Al, de l’aéroport Ben-Gourion, à destination de Paris. Je n’ai pas été autorisé à récupérer mes affaires qui se trouvaient à Jérusalem.
Il convient de noter que, au niveau de ces activités de soutien et de protection du peuple palestinien que mènent des centaines d’Internationaux, aucun trouble à l’ordre public n’est opéré en Israël même (ni a fortiori en Palestine), et que par ailleurs on ne peut rejoindre les Territoires occupés palestiniens qu’en passant par une frontière israélienne.
Je me réserve la possibilité de poursuivre le gouvernement israélien, notamment en raison de l’illégalité de mon arrestation puis de mon expulsion, ainsi que du défaut du respect du droit international quant aux conditions de ma détention.
Paris le 21 juillet 2003,
Thomas Pellas
Tel : 01 43 72 15 79