C’est le 29 décembre qu’a été investi le nouveau gouvernement israélien, qui donne une large place et des pouvoirs étendus à des ministres ouvertement fascistes, condamnés pour leur racisme anti-arabe, prônant ouvertement l’expulsion ou le massacre des Palestiniens.
L’année 2022 avait déjà été terrible pour les Palestiniens, l’année 2023 voit se multiplier les raids meurtriers de l’armée israélienne contre les camps de réfugiés et les villes de Cisjordanie, notamment Jénine et Naplouse, ainsi qu’à Jérusalem-Est. L’expédition des colons armés contre la ville palestinienne de Huwwara, qualifiée de pogrom par de nombreux Israéliens, a été un choc pour l’opinion dans le monde entier. Une partie de l’opinion israélienne est en train de se rendre compte, mais un peu tard, qu’elle a donné les clés du pouvoir aux suprémacistes religieux et aux colons, et que la coalition au pouvoir entend abolir les contre-pouvoirs de la justice pour avoir les mains libres et assurer l’impunité de ses dirigeants. Les manifestations massives concernent avant tout aujourd’hui la vie démocratique des Israéliens juifs, même si l’on observe des expressions de solidarité avec le peuple palestinien et des volontés de construction d’un avenir commun. Nous ne pouvons qu’espérer voir cette prise de
conscience se développer.
Aujourd’hui, ce sont les ministres les plus ouvertement fascistes qui régissent la vie des Palestiniens : à Smotrich, un poste taillé sur mesure de gouverneur colonial. À Ben-Gvir, la « sécurité nationale » incluant les forces de répression contre les Palestiniens et le sort des prisonniers politiques palestiniens.
Aujourd’hui, malgré des gestes symboliques comme la visite des consuls européens à Huwwara, les réponses des États européens restent creuses, très loin de l’enjeu majeur que constitue la protection du peuple palestinien. Agir en France pour les droits du peuple palestinien, c’est rappeler tous les jours que l’impunité d’Israël est le moteur de tous les crimes, réclamer des sanctions, imposer une protection du peuple palestinien, rappeler que la réalisation de ses droits passe par le démantèlement du régime d’apartheid qu’ils subissent dans toutes leurs composantes, donner la parole à sa jeunesse. C’est rappeler l’histoire, les 75 ans de la Nakba que l’on commémore cette année avec la ferme volonté que soit enfin mis un coup d’arrêt au processus de dépossession qu’elle a initié.
Mais du fait de l’ingérence de l’État d’Israël et de ses relais inconditionnels, ce combat pour les droits du peuple palestinien rejoint aussi le combat pour nos propres libertés.
Nous venons de vivre une séquence d’une violence inédite, au cours de laquelle des député·es, notamment de la majorité présidentielle, n’ont pas hésité à reprendre le narratif israélien pour attaquer notre compatriote et ami
Salah Hamouri, tenter de lui interdire de prendre la parole en France, s’en prendre aux député·es qui défendent les droits du peuple palestinien. Le ministre de l’Intérieur lui-même n’a pas hésité à reprendre le même narratif et à demander aux préfets d’interdire les réunions avec Salah Hamouri.
À travers les cas de Versailles, Lyon, Poitiers, les menaces devenaient fortes et coordonnées : elles ont culminé à Nancy par un arrêté d’interdiction d’une réunion avec Salah Hamouri. Dans la plus grande unité avec nos partenaires, et dans une belle articulation entre l’action locale et l’action nationale, nous avons mené le com
bat et remporté à Nancy une belle victoire : le préfet a été déjugé par le tribunal administratif, l’arrêté d’interdiction a été suspendu, et Salah Hamouri a pu s’exprimer publiquement.
Cette bataille est loin d’être terminée. Il va falloir comprendre comment des député·es de la République, y compris la présidente du principal groupe de la majorité présidentielle, peuvent se faire le relais de ce gouvernement israélien fasciste et de ses organisations de colons. Il va falloir comprendre comment le ministre de l’Intérieur s’est lui-même senti autorisé à relayer ce discours. Il va falloir dénoncer ces ingérences inadmissibles.
Fiers des valeurs de solidarité et d’amitié que nous portons au peuple palestinien, fiers de notre attachement au droit, nous ne lâcherons rien. Il est temps, il est grand temps, que soit fermement rappelé à l’État d’Israël et à ses soutiens qu’ils ne doivent pas toucher à nos libertés, que la critique de l’État d’Israël et de sa politique doit s’exercer librement, et que leurs manœuvres d’intimidation doivent cesser.
Bertrand Heilbronn, 17 mars 2023