LES OBJECTIFS DE L’ATELIER :
Il est apparu en début de réunion que ceux-ci étaient assez flous pour nombre de participants : s’agissait-il de traiter des projets en général, qu’ils soient associatifs et/ou institutionnels, ou seulement des projets gérés dans le cadre institutionnel ou des projets à mener en collaboration entre groupes locaux, sans passer par la structure nationale, voire des projets avec d’autres pays, dans ou hors de la communauté européenne (par exemple le Maroc) ? S’agissait-il d’un atelier permettant de faire le point sur l’existant (comme le CN l’avait demandé) et/ou d’établir des priorités pour l’avenir ou simplement d’un atelier permettant de lister les moyens techniques et administratifs à mettre en oeuvre pour impulser la coopération décentralisée avec la Palestine ?
Autant d’interrogations mettant en évidence l’étendue des questionnements des adhérents autour de cette problématique, la diversité des expériences vécues et la nécessité de formation.
Finalement, la discussion s’est plutôt orientée vers les projets de coopération décentralisée puisqu’il apparaissait que c’était un champ relativement nouveau pour l’AFPS, qu’il y avait un grand besoin d’information et que certains comités présents bénéficiaient d’une expérience qui pouvait être fort enrichissante.
DES PROJETS POURQUOI ET COMMENT ?
Avant de rentrer dans les aspects techniques, un petit rappel a été fait sur les objectifs des projets en général : comme les différentes AG et CN l’ont réaffirmé à plusieurs reprises, il ne s’agit pas d’une aide humanitaire mais bien de la concrétisation de l’affirmation d’une solidarité politique dont l’ancrage doit se faire dans la durée, voire dans l’espace. Les projets doivent être en lien avec nos priorités et il nous appartient d’en vérifier la crédibilité : cela passe par une bonne connaissance du terrain en Palestine et par la vérification de l’adéquation entre les objectifs affirmés par nos partenaires, qu’ils soient français ou palestiniens (par exemple en ce qui concerne l’aspect social mis en avant), et leur mise en oeuvre. Il en va de notre influence et de notre efficacité politique ici. Il faut être conscients également que nos projets en Palestine s’inscrivent dans un champ social et politique existant et que toute action de notre part a forcément des répercussions sur place dont il convient de mesurer l’impact.
Cela devient d’autant plus important quand ces projets passent dans le domaine de la coopération décentralisée, du fait de la taille des projets (par exemple, c’est bien supérieur, sur le plan financier, à ce que nous pourrions espérer faire seuls, en tant qu’AFPS !) mais aussi du fait de la démultiplication des impacts (puisque, avec la coopération décentralisée, des franges nouvelles d’institutions, d’associations, bref de la population peuvent être mise en contact avec la réalité palestinienne).
De manière générale, on peut constater, au fil du temps, un travail plus réfléchi et plus collectif des groupes AFPS, avec la volonté de fédérer les projets y compris dans l’espace : manière de mutualiser nos outils, nos acquis, nos forces. Ainsi est apparu le souhait d’aller vers plus de coopérations régionales : une région de Palestine / une région de France, avec peut-être, à terme, une sorte de « maillage solidaire » sur toute la Palestine ? Des exemples existent déjà avec Cergy, les villes voisines et les villages le long du mur ; le partenariat et les jumelages entre la Bretagne et la région d’Al Hul autour des missions civiles et un projet de coopérative paysanne... Pour poursuivre dans ce sens, il faudrait que chaque collectif ait une connaissance précise des projets menés par les groupes du « voisinage » : il sera important d’utiliser le premier recensement fait auprès des groupes.
LA COOPERATION DECENTRALISEE :
? Aspects légaux et mise en oeuvre : la loi de 92 définit précisément le cadre de la coopération décentralisée. Il s’agit en gros d’actions de partenariat (qui peuvent aller jusqu’au jumelage) entre des institutions françaises et étrangères (communes, conseils généraux, régionaux, etc). Pour cela, ces institutions peuvent agir directement ou, plus souvent, passer par des ONG spécialisées qui peuvent les conseiller, les rassurer et également leur apporter des facilités pour la gestion de la coopération. Ces ONG ont une grande expérience et travaillent en lien avec le Quai d’Orsay, il s’agit de fait d’ONG privées, semi-professionnelles à professionnelles qui sont plus ou moins para-institutionnelles (par exemple, pour certaines d’entre elles, leur CA est constitué d’une majorité d’élus). Il existe plusieurs associations de ce type : le GRET, TECHDEV, ... , la plus connue étant sûrement Cités Unies France (CUF) avec son réseau de coopération décentralisée sur la Palestine. Pour CUF et son RCDP, les villes doivent payer une cotisation calculée sur la base du nombre d’habitants, elles peuvent ensuite bénéficier d’une aide : facilitation de mise en relations, étude de faisabilité des projets, etc (ça peut parfois être fort utile, comme dans la période actuelle, où il est beaucoup plus facile par exemple d’obtenir des visas pour des Palestiniens si cela passe par une invitation officielle)
? Initialisation par l’AFPS : de fait, dans la plupart des cas, ce sont des comités AFPS (ou Palestine) qui sont à l’origine des partenariats (ils ont à la fois la volonté politique et la connaissance du terrain) mais, dès lors qu’une commune par exemple a accepté d’envisager l’éventualité d’une coopération quelconque avec la Palestine, il peut être intéressant, si elle ne l’est pas déjà, de l’informer de l’existence de ces structures, non pas pour décharger notre propre responsabilité sur elles mais d’une part pour rassurer ces municipalités et, d’autre part, afin de bien séparer les rôles dans un but d’efficacité : nous avons une compétence politique, d’autres ont une compétence technique, à chacun son créneau. Ceci étant clarifié, il n’en demeure pas moins un certain nombre de questions : comment inscrire l’AFPS dans des priorités affichées par des institutions ? Comment continuer à servir d’aiguillon quand les projets deviennent vraiment les projets des villes et ... nous échappent un peu ? Comment et jusqu’où articuler notre activité propre avec la coopération décentralisée ?
? Objectifs, rythme et durée : c’est un travail très lourd et très lent, avec souvent des à coups (ainsi le travail des élus est souvent fonction de leur calendrier politique, voire de leurs ambitions personnelles, alors que le nôtre est plus régulier) mais qui permet de pousser nos élus à prendre publiquement position sur le plan politique au sujet de la Palestine, qui les engage dans la durée, permet d’augmenter quantitativement la solidarité et d’ouvrir des portes en termes de contacts nouveaux et de facilités. Il est très important de pousser les élus à dépasser le stade des échanges pour s’inscrire dans de véritables projets : un projet est un investissement technique, financier, sur la durée, qu’il est beaucoup plus difficile d’interrompre brutalement au gré d’un événement quelconque.
? Parité entre Israël et la Palestine : il arrive parfois que des conditions au partenariat soient posées en amont : par exemple, un jumelage avec une ville palestinienne si un jumelage avec une ville israélienne. Il s’agit là d’un grave problème, à la fois éthique et politique car ça consiste à mettre sur un plan d’égalité, en terme de responsabilité de la situation, Palestiniens et Israéliens. Il faut absolument intervenir dès le début et ne pas laisser les choses s’installer sur de mauvaises bases : si nous sentons que les municipalités ont besoin d’être rassurées ou d’y voir plus clair, mieux vaut faire intervenir très vite des associations juives progressistes d’ici ou de là-bas (UJFP, Taayush, ...) qui nous aideront efficacement à poser clairement les choses (de plus, dans ce cas-là, les élus ont l’impression d’avoir acquis une sorte de « couverture morale » auprès de la population). De toute manière, quand les municipalités mettent en place ces espèces de « triangulaires » dans le but hypothétique d’oeuvrer au rapprochement entre Palestiniens et Israéliens, ça ne marche pas : on voit même des extrêmes, comme à Montreuil, où la ville est jumelée avec un village palestinien et ... la colonie qui est en train de le bouffer ! Les seules perspectives gérables dans ce domaine se situeraient peut-être avec des villes israéliennes arabes.
? Poursuivre le travail du groupe local en parallèle : s’il est très important de faire partie du groupe de pilotage, il faut absolument que le groupe local AFPS poursuive ses activités propres : essayer de garder une cohérence avec le partenariat municipal sur le terrain géographique par exemple, ne signifie pas s’auto-censurer, certaines activités sont de notre responsabilité (ex : à Cergy, le comité fait une campagne sur les 8 prisonniers du village jumelé). A plus fort raison dans la situation actuelle où nous avons des campagnes urgentes à mener sur la suspension de l’aide économique, sur la tram, Jérusalem. Concernant le partenariat, nous devons veiller à ce que les Palestiniens ne se fassent pas « avoir » par nos politiques, nous devons aussi les aider à mieux cerner les carences politiques de nos élus (bref : à les former !). A l’inverse, nous devons être vigilants sur la crédibilité, l’efficacité et la faisabilité des projets présentés. Cela n’est pas sans poser le problème de notre place : avons-nous à avoir des exigences par rapport à nos amis palestiniens, si oui, lesquelles et dans quelles limites ?
PERSPECTIVES :
? Il faut, dès maintenant, faire une première analyse des renseignements déjà collectés au sujet des projets menés par les groupes locaux et il faut la publier sur le site.
? Pour affiner les choses, il faudra refaire un questionnaire plus « cadré » aux groupes locaux, de manière à ce qu’il soit plus facilement exploitable et publiable : quel projet ? Où ? Avec quels partenaires français, palestiniens ? Depuis quand ? Pour quel montant ? Avec quels justificatifs ? Quels aléas ? Quelles perspectives ? Quelles demandes d’aides ? Etc. Laisser une place pour les remarques ouvertes.
? Envisager la publication d’un document sur la coopération décentralisée (procédures, interlocuteurs, structures, expériences) et peut-être de stages de formation.
Pour l’atelier, Joëlle Couillandre.
Atelier Projets et Coopération décentralisée
Conférence des groupes locaux