Photo : Destruction totale à Khan Younis, les gens ont tout perdu, 13 avril 2024 © UNRWA
Un jour après le début du génocide à Gaza, le 7 octobre de l’année dernière, le premier front arabe de solidarité visant à mettre fin au génocide a été formé au Liban, et le Hezbollah a annoncé qu’il combattrait Israël depuis le nord jusqu’à la fin de la guerre contre Gaza. Pendant une année entière, la résistance libanaise n’a jamais cessé de maintenir son « front de soutien », comme l’a appelé son secrétaire général Hasan Nasrallah.
La réaction des Palestiniens de Gaza à l’intention du Hezbollah de continuer à se battre aux côtés des Palestiniens était pleine d’espoir. Ils pensaient qu’une pression militaire accrue sur Israël depuis le nord forcerait ce dernier à diviser ses forces et à réduire la pression sur Gaza. Mais contrairement à cette croyance, l’extension de la guerre au Liban s’est accompagnée d’une accélération du rythme des massacres à Gaza.
La conduite d’Israël au Liban reproduit aujourd’hui un schéma que tous les habitants de Gaza reconnaissent. L’armée israélienne a intensifié ses frappes militaires dans le sud du Liban et dans certaines parties de Beyrouth, envoyant des ordres d’évacuation aux résidents libanais du sud, alors que près de 500 personnes ont été tuées en une seule journée.
Les parallèles avec les horreurs de l’année dernière n’ont pas échappé aux Palestiniens de Gaza qui ont observé les ordres d’évacuation. Sur les réseaux sociaux, les habitants de Gaza ont écrit que le Liban et Gaza étaient désormais confrontés au même ennemi et saignaient du même sang.
« Ce qui se passe au Liban, c’est ce qui se passe à Gaza », déclare Khaled Salama, 33 ans, depuis un campement de tentes à Khan Younis. « Un génocide et des déplacements forcés ont lieu à Gaza et au Liban. Les sionistes veulent anéantir tous les Palestiniens, ainsi que ceux qui se tiennent à leurs côtés et les soutiennent. »
Extension du génocide
De nombreux habitants de Gaza sont désormais convaincus qu’Israël veut élargir le cercle du génocide aux non-Palestiniens. Depuis que les nouvelles ont commencé à arriver du Liban, accompagnées des scènes familières de bombardements, de déplacements et d’un grand nombre de personnes martyrisées en une seule journée, les Gazaouis ont confirmé ce qu’ils savaient déjà : Israël ne veut rien d’autre que la destruction, la mort et le génocide pour tous ceux qui l’entourent.
« Nous avons vu comment des ambulances ont été bombardées au Liban, comment des familles entières ont été tuées en un seul raid, et nous avons vu les cris provenant des décombres. Nous avons vécu tout cela avant que cela n’arrive au Liban, et nous sommes donc ceux qui savent le mieux ce que le Liban vit aujourd’hui », explique Khaled à Mondoweiss.
« L’excuse d’Israël pour détruire la bande de Gaza était l’attaque du 7 octobre », poursuit Khaled. « Quelle est l’excuse d’Israël pour détruire le Liban aujourd’hui ? Israël est plus que jamais certain que personne ne lui demandera de rendre des comptes, si bien que le rythme de ses crimes s’accélère de jour en jour ».
Si les images de destruction et de mort sont les mêmes, les habitants de Gaza s’attendent à ce que la résistance libanaise ne soit pas un adversaire facile pour Israël.
« La résistance au Liban n’est pas comme la résistance à Gaza », explique Khaled. « Israël paiera un lourd tribut pour avoir étendu ses opérations au Liban.
La bande de Gaza présente un terrain côtier plat et simple, difficile à défendre, tandis que le Liban est une région montagneuse plus propice aux combats et aux tactiques de guérilla. La bande de Gaza est entièrement assiégée depuis près de vingt ans, alors que le Liban a des frontières ouvertes avec les pays voisins et des lignes d’approvisionnement actives. Cela donne de l’espoir aux Palestiniens de Gaza, qui voient que la résistance au Liban possède des moyens, des défenses et des armes lourdes que la résistance à Gaza n’a pas.
« Israël sera confronté à une résistance féroce au Liban, et les résultats ne ressembleront pas à ce qui s’est passé dans la bande de Gaza », déclare Alaa Rabah, 44 ans, depuis un camp de déplacés à al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza. « Le Hezbollah possède des armes capables de causer de grandes destructions et pertes à Israël ; je ne pense pas qu’Israël sera en mesure d’affronter la résistance à Gaza et au Liban en même temps.
Mais malgré cet optimisme, un espoir a déjà été déçu pour les habitants de Gaza : celui qu’une escalade du front libanais changerait la situation pour la population de Gaza. La réalité est beaucoup moins simple.
La conviction de la population de la bande de Gaza que l’extension de la guerre au Liban entraînerait un relâchement de la pression sur Gaza s’est révélée jusqu’à présent déplacée. La gravité des massacres, des bombardements et des destructions à Gaza n’a fait qu’augmenter depuis l’intensification des bombardements israéliens au Liban. En fait, Israël a profité de la préoccupation des médias pour ce qui se passait au Liban pour intensifier son génocide, ciblant plusieurs campements de tentes et abris scolaires et rasant des immeubles résidentiels avant de tirer sur les premiers intervenants qui tentaient de secourir les survivants.
Abdul Karim Aliwa, 22 ans, admet que la guerre contre le Liban n’atténuera pas les souffrances de Gaza.
« Israël dispose de stocks d’armes américaines et nous savons qu’il ne se bat pas seul », explique-t-il à Mondoweiss. « L’Occident tout entier est complice des massacres perpétrés contre les Palestiniens et les Libanais en soutenant Israël et en lui fournissant les armes nécessaires pour tuer des enfants.
Mais le revers de cette affirmation est également vrai ; si la guerre contre Gaza ne prend pas fin, elle créera un précédent inquiétant pour le reste du monde et pour l’ensemble de l’ordre international fondé sur des règles. Le génocide deviendra une méthode acceptable pour mener une guerre asymétrique.
Les habitants de Gaza le sentent déjà. « Qu’est-ce qui fera qu’Israël atténuera la gravité de la guerre à Gaza ? s’interroge Abdul Karim, partageant l’idée que si personne n’arrête Israël dans son élan, il continuera sur la voie du génocide.
« Aujourd’hui, c’est à Gaza et au Liban », dit-il. « Mais cela ne s’arrêtera pas là. »
Traduction : AFPS