Le dernier souhait de Yasser Arafat d’être enterré à Jérusalem n’aura pas été exaucé, pas plus que celui d’autres Palestiniens considérés comme d’éternels réfugiés et interdits de sépultures sur « leur terre » : une situation dénoncée dans le film « Quand on est sans pays », du Palestinien Nasri Hajjaj.
Ce cinéaste et écrivain a choisi de rendre hommage, dans son film qui sera dans les salles début 2007, à ses compatriotes morts à l’étranger et où ils reposent, la loi israélienne interdisant aux non-juifs nés à l’étranger d’être inhumés sur leur terre, y compris à Jérusalem. « Le Palestinien restera un réfugié, même après sa mort, tant que la loi israélienne lui interdira d’être enterré dans sa patrie », déclare à l’AFP le réalisateur, qui réside à Tunis.
Hajjaj, né lui-même dans un camp de réfugiés du Liban il y a 55 ans, a tourné en Tunisie et au Proche-Orient , mais aussi en Europe, aux États-Unis et au Vietnam. « Dans chacun de ces pays, dit-il, est enterrée une personnalité palestinienne importante, avec une histoire particulière. »
L’idée du film lui est venue lorsqu’il s’est rendu, en 1999, pour la première fois sur la terre de ses parents dans la région d’el-Khalil (Hébron) en Cisjordanie, qu’ils ont été contraints de quitter en 1948 pour passer le reste de leur vie dans le camp de réfugié de Aïn el-Héloué [1].
Le temps fort du film se déroule au moment des funérailles du président de l’Autorité palestinienne Yasser Arafat, en novembre 2004, et des images de sa sépulture « provisoire » dans l’enceinte de la Moukataa, son quartier général de Ramallah, en Cisjordanie.
La disparition de Arafat a constitué « l’événement majeur qui a fait plonger dans le vif du sujet en raison des nombreuses questions suscitées par sa mort et le lieu de son enterrement », estime le cinéaste palestinien.
Le tournage a démarré fin 2004 à Londres sur la tombe du caricaturiste Naji el-Ali, assassiné il y a près de 20 ans.
À Paris, des prises de vues ont été réalisées sur celle de Mahmoud al-Hamchari, représentant de l’OLP en France, assassiné par les services secrets israéliens dan la capitale française en 1973.
D’autres scènes ont été réalisées en Syrie sur la tombe de Khalil al-Wazir (Abou Jihad), numéro deux de l’OLP et initiateur de la première intifada dans les territoires occupés, assassiné par un commando israélien à Tunis en avril 1988.
Hajjaj s’est également rendu sur les sépultures du premier président de l’OLP, Ahmad al-Choukeiri, en Jordanie, et d’autres Palestiniens inhumés en Bulgarie, aux États-Unis et au Vietnam.
En Tunisie, il a aussi filmé des tombes d’exilés palestiniens tués lors d’un bombardement de l’aviation israélienne en octobre 1985 sur le quartier général de l’OLP à Hammam Chott, dans la banlieue sud de Tunis, et la tombe de Salah Khalef (Abou Iyad), bras droit et chef des services de renseignements de Yasser Arafat, assassiné en janvier 1991.
Le film montre également des images des cimetières des camps de réfugiés de Aïn el-Héloué au Liban, datant du premier conflit israélo-arabe en 1948. Des séquences ont été tournées au « cimetière de l’ennemi mort », en Israël, où reposent des combattants palestiniens tués entre 1948 et la deuxième Intifada.