Madame, Monsieur,
Le 12 décembre prochain, vous êtes invité(e) à participer à une cérémonie de commémoration du centième anniversaire du Technion et du soixantième anniversaire de l’association Technion France. Cette cérémonie est placée sous le thème de la santé, thème on ne peut plus noble. Et on comprend que vous ayez pu répondre positivement à une telle invitation.
Malheureusement, la mise en avant de ce thème n’est pas totalement innocente, dans la mesure où elle fait le silence sur un pan important de l’activité du Technion, la recherche militaire. En effet, une part importante des travaux qui se mènent au Technion constitue un soutien direct à l’occupation et à la colonisation des territoires palestiniens conquis en 1967, en contravention avec les règles les plus élémentaires du droit international, notamment les Conventions de Genève relatives à la protection des populations civiles en temps de guerre, et avec la quasi-totalité des résolutions de l’ONU relatives à cette question.
En appui à cette affirmation, vous trouverez ci-joint deux documents dont la totalité des informations a été vérifiée. Le premier est un rapport publié le 31 octobre 2010 par un groupe d’enseignants et d’étudiants des universités Mc Gill et Concordia de Montréal au Canada (voir http://www.aurdip.org/Technionfinal...). Le second est une lettre d’un groupe d’universitaires parisiens adressée au Collège de France à propos d’un partenariat avec le Technion (voir http://www.aurdip.fr/Lettre-a-l-Adm...).
Permettez-nous d’en citer quelques extraits qui donnent des exemples de ce soutien :
« La conception de véhicules blindés sans pilote (1), destinés à être utilisés en territoire palestinien dans des opérations contre des populations civiles, tels le célèbre bulldozer D9 (le plus puissant de la gamme Caterpillar), utilisé pour détruire les maisons et les cultures. Ils ont été utilisés systématiquement dans la bande de Gaza, notamment le long de la frontière avec l’Égypte où des centaines de maisons ont été rasées pour créer une bande de terre vierge, la fameuse “Philadelphi route”, et plus récemment lors de l’invasion de janvier 2009 (2), où des centaines de maisons ont été rasées et des installations agricoles détruites sans même le prétexte d’une résistance armée (3).
La conception de drones (4), dont chacun sait qu’ils sont utilisés pour tuer des militants présumés ou même des adversaires politiques, en dehors de toute procédure judiciaire, au mépris le plus absolu des droits de la population occupée. Ces exécutions sommaires s’accompagnent bien souvent de ce que l’on appelle par euphémisme des “dommages collatéraux”, c’est-à-dire de personnes dont le seul tort était d’être dans les parages au mauvais moment. Rangeons au nombre de ces dommages collatéraux l’effet à long terme sur une population civile d’être en permanence surveillée et menacée du ciel, surtout quand il lui est interdit de sortir d’un territoire de 360 km2.
Les liens très étroits avec la société Elbit. Celle ci, par l’intermédiaire de ses filiales, Elbit Electro-Optics (El- Op) and Elbit Security Systems (Ortek) a fourni les caméras de surveillance qui équipent le mur de séparation, construit pour une large part en territoire occupé et condamné en 2004 par la Cour Internationale de Justice, dans un jugement quasi-unanime. Il semblerait en outre que la même société construise un véhicule sans pilote destiné à patrouiller les abords du mur. Dans ce contexte, la création entre le Technion et Elbit (Visions Systems Research Institute) d’un centre de recherches commun (5) (6) (Vision Systems Research Initiative) conduit à s’interroger sur la finalité des recherches menées au Technion sur la vision. Par contre, en ce qui concerne la méthode développée au Technion pour localiser les tunnels en utilisant la fibre optique (7), le doute n’est pas permis : il s’agit explicitement de contribuer à l’emprisonnement de la population de Gaza en lui interdisant tout contact avec le monde extérieur. »
Évoquant sa mission, le Technion souligne lui-même le rôle très important qu’il joue dans le dispositif de répression militaire israélien. « Since its founding, the institute has educated three generations of men and women who have played a key role in laying the country’s infrastructure and establishing its crucial defense and high-tech industries ». Ceci tout comme les activités plus haut décrites est en contradiction flagrante avec les valeurs supposées être celles de l’institut. « La préservation de la vie est la motivation première de ses chercheurs et les retombées de ses recherches se font à l’échelle de l’humanité » affirme l’Association Technion France.
Il est donc clairement démontré que le Technion contribue de façon active et délibérée à l’occupation des territoires palestiniens et à la répression de la population qui y vit. Cette occupation est illégale au regard du droit international. D’un point de vue éthique, il n’est pas possible de ne regarder dans l’activité du Technion que ce qui est moralement acceptable et de fermer les yeux sur ce qui est condamnable.
Dans ces conditions, votre participation aboutirait à cautionner une cérémonie qui vise à faire l’apologie de cet institut. Je fais confiance à votre attachement aux valeurs universelles des droits de l’homme et des droits des peuples et je vous demande de renoncer à participer à une telle cérémonie.
Dans l’espoir d’être entendu, je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.
Jean-Claude Lefort
Président de l’Association France Palestine Solidarité
Notes :
(1) Communiqué de presse du 20/10/2003 (les citations ont été vérifiées à la date du 3/12/09)
(2) Article du Jerusalem Post.
(3) Rapport de la commission d’enquête de l’ONU.
(4) http://tasp.technion.ac.il/Centers/...
(5) http://www.focus.technion.ac.il/Nov...
(6) http://finance.themarker.com/textDo...
(7) Technologie BOTDR.