Comment commencer cette intervention sans évoquer, à mon tour, la mémoire de Bassem Abou Rahma assassiné froidement ici l’an dernier ? Comment ne pas parler de Bassem mais aussi des martyrs de Nil’in comme d’Iraq Burin et d’ailleurs qui nous ont quittés ? Mais leur combat continue. En ce sens ils sont présents parmi nous aujourd’hui.
Oui la lutte engagée continue alors que la force occupante n’a pas ménagé ses efforts pour l’empêcher et a multiplié les coups contre vous. Des dizaines d’arrestations ont été opérées de manière illégale. Je pense ici tout spécialement à Abdallah Abu Rahma, à Adib Abu Rahma ou bien encore à Ibrahim. Nous leur exprimons notre solidarité tout comme à la population de Bil’in, de Nil’in, d’Almassara, d’Iraq Burin, de Nabi Salah et aux autres Comités populaires.
En vérité une vérité stratégie a été mise en place contre les populations en lutte. On voulait les faire tomber dans un piège terrible : ou bien les amener à renoncer ou bien à les amener à recourir à la violence. Vous avez tenu le cap. Et en face voilà qu’ils ont peur !
Cela fait 5 ans que nous vous soutenons. Et je veux vous le dire : plus que jamais nous vous soutenons. Cela pour au moins deux raisons fondamentales.
La première découle du fait que si tout peuple occupé dispose du droit absolu de résister, ce droit, ici, vous l’exercez pleinement sous une forme appropriée que vous appelez « la résistance populaire et non-violente ».
Je sais bien qu’il existe des personnes qui expliquent que la résistance et la paix sont deux objectifs contraires. L’histoire les contredit. Elle a tranché : il n’y a jamais eu de paix sans résistance. Jamais une force occupante ne s’est retirée toute seule, d’elle-même.
On n’a jamais vu cela dans l’histoire et jamais on ne le verra.
La résistance est une condition pour obtenir la paix et la paix et un fruit de la résistance.
Naturellement la résistance populaire doit trouver un débouché politique pour s’accomplir pleinement.
Mais quand rien n’avance réellement sur place au plan politique, ou pire quand tout est bloqué, comme c’est véritablement le cas aujourd’hui, d’où peut venir le positif ? De la solidarité internationale !
Là encore il est un fait historique majeur et incontestable qui ne souffre, lui non plus, d’aucune exception : un peuple peut se trouver localement dans un rapport de forces très défavorable face à une puissance occupante surarmée et pour autant il peut gagner politiquement. A la condition d’avoir à son côté la solidarité internationale, de la rechercher et de la permettre !
Certes nous attachons la plus grande attention aux prises de positions des dirigeants de la planète. Nous avons apprécié la déclaration de l’Union européenne en décembre dernier, puis celle du Quartette ou bien encore les attitudes récentes du Président Obama et les déclarations d’un général américain très important, le général Petraeus.
Ce dernier vient de dire, à sa façon, ce que nous ne cessons de dire de puis des années et des années, à savoir que le conflit israélo-palestinien occupe une place centrale dans la stabilité régionale et plus globalement dans la stabilité internationale.
Mais autant nous prenons au sérieux les déclarations des dirigeants de la planète, autant nous constatons que les actes manquent qui donneraient toute leur force à ces déclarations.
Le cœur du problème est ici politique : il convient d’en finir avec l’impunité dont bénéficient les dirigeants israéliens depuis plus de 40 ans qu’ils bafouent le droit international. Israël est membre de l’ONU. Il est contraint par les engagements auxquels il a souscrit. C’est un Etat comme les autres quoi qu’en disent ses dirigeants.
C’est pourquoi, pour que les choses bougent, il faut compter sur la solidarité populaire internationale et non pas la considérer come seconde ou annexe.
Cette solidarité s’exprime chaque jour en Europe. Elle s’exprime en France.
C’est ainsi que, outre notre soutien à votre lutte ici, nous participons pleinement au Tribunal international Russel pour la Palestine ; que nous refusons l’entée illégale des produits des colonies sur le marché français ; que nous exigeons la levée du blocus inhumain et illégal de Gaza ; que nous demandons l’application de l’article 2 de l’Accord d’association UE-Israël ; que nous mettons en cause l’incroyable volonté de faire entrer Israël dans l’OCDE alors que ses paramètres économiques sont « tout simplement » faux. Bref, nous luttons, sujet par sujet, et pied à pied, pour mettre un terme à l’impunité d’Israël tant que les dirigeants de ce pays n’appliqueront pas le droit international.
C’est ainsi qu’ils entendront raison. Et ceux qui se prétendent les « amis » d’Israël rendent le plus mauvais des services à ce pays en ne s’engageant pas dans cette voie.
Voilà la seconde raison qui fonde notre engagement renouvelé auprès de vous : en combinant résistance populaire et solidarité populaire internationale il ne sera plus possible de repousser à l’infini l’imposition de la paix dans cette région du monde.
C’est pourquoi, quelles que soient les difficultés actuelles, qui sont sérieuses, nous avons confiance dans ce mouvement qui prend corps et qui combine la résistance populaire et la solidarité internationale.
Sénèque, un grand philosophe, pouvait écrire il y a longtemps : « Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles qu’on n‘ose pas. C’est parce que qu’on n‘ose pas que les choses sont difficiles ».
Ici vous avez osé ! En écho nous avons osé avec vous !
Alors c’est sûr, c’est certain : continuons plus que jamais sur ce chemin, main dans la main, avec détermination et enfin « Oui, la Palestine vivra ! »