Ce n’est qu’après l’annonce d’un cessez-le-feu unilatéral que l’Union européenne a tenté de peser de tout son poids dans cette guerre, pour dit-on « prendre acte de la trêve unilatérale israélienne et pousser les étapes suivantes du plan de paix égyptien ». Des chefs d’Etat ou de gouvernement d’Allemagne, d’Espagne, de France, du Royaume-Uni, d’Italie et de la République tchèque ont ainsi joint leurs homologues turc et jordanien à Charm Al-Cheikh pour un mini-sommet convoqué par le président Moubarak. Pendant 22 jours de bombardements qui ont sévi à Gaza, l’Europe n’a exercé aucune pression sur le gouvernement israélien voire n’a brandi aucune menace.
Avec la fin de l’Administration Bush, et l’arrivée au pouvoir du nouveau président espoir Barack Obama, les projecteurs se sont tournés vers l’Union Européenne (UE). Et voilà, un pas en avant précède souvent trois pas en arrière. Vivement critiqués par la presse israélienne, « les Européens sont venus la première fois, sans proposition concrète pour un cessez-le-feu à Gaza ». La visite du ministre des Affaires étrangères, Karel Schwarzenberg, à son homologue, Tzipi Livni, n’a été qu’un pavé dans la mare. Il y a fort à penser qu’Israël ira au bout de son plan, peu importe le nombre de phases et de victimes. L’incapacité des 27 à offrir un seul son de cloche rappelle des souvenirs peu glorieux. « On se croirait être revenu au temps de l’interminable crise en ex-Yougoslavie, lorsque l’Onu ne savait pas quoi faire, que la France soutenait les Serbes et l’Allemagne les Croates, que l’Italie naviguait entre les uns et les autres et que l’Union européenne, désunie, attendait les décisions américaines pour accorder ses violons discordants sur ceux, dominants, de Washington », selon Enzo Bettiza, éditorialiste de La Stampa. Ou encore lors de l’attaque israélienne au Liban en 2006.
On aurait pu penser que depuis, fort d’une présidence commune, le vieux continent parviendrait à l’unanimité. L’Espagne, la France et la Grèce parlent d’un conflit aux responsabilités partagées, quand la République tchèque, le Danemark, les Pays-Bas ou encore la Suède souhaitent un communiqué condamnant le Hamas. Nouveau à la tête de l’Union, le président tchèque Václav Klaus a qualifié de « défensive » et non d’« offensive » l’attaque israélienne. L’Allemagne s’aligne, de surcroît, en faveur d’Israël et de la légitime défense. La France condamne, en revanche, une « tragédie humanitaire », mais sans rien faire par la suite. L’Europe qui se vante d’être le berceau des droits de l’homme n’a pas brillé par un investissement diplomatique ou humanitaire.
Pour ne rien arranger, les visites françaises et européennes au Proche-Orient se chevauchaient la semaine dernière. La Commission a néanmoins annoncé le gel du processus de « rehaussement » de l’accord d’association existant entre l’Etat hébreu et l’Europe, qui doit lui permettre de participer à une série de programmes communautaires, même extrêmement sensibles (comme Galileo, le GPS européen), ainsi qu’à des rencontres politiques de haut niveau.
Une suspension après l’aval des deux parties pourtant. La Commission exigeait un cessez-le-feu immédiat, sans pression véritable. L’Onu, représentée par le secrétaire général Ban Ki-moon, a sillonné Egypte, Israël, Jordanie, Cisjordanie et Liban, une tournée consacrée à l’obtention d’un cessez-le-feu. Mais sans la puissance et l’appui des Etats-Unis, l’Onu ne peut pas grand-chose. Devant l’immobilité de l’Europe des 27, le manque de charisme de l’Onu, la situation est encore une fois aux mains de la police mondiale : les Etats-Unis, où l’on attendait l’entrée en fonction de Barack Obama. S’il reste encore discret sur ses intentions, il compte bien changer la donne dans la région. Il a clairement fait entendre son point de vue : il serait question de soutenir Israël, tout en s’opposant fermement à ce qu’on porte atteinte aux civils palestiniens. Une politique en rupture avec l’actuel gouvernement de la Maison Blanche. Selon des sources proches de l’équipe de transition, la priorité sera d’établir un contact, indirect peut-être, avec le Hamas. Une façon de mettre un terme à la politique d’ostracisme jusqu’alors contre-productive. L’Europe aurait pu saisir la perche qui lui était tendue, dans le contexte américain actuel que l’on pourrait qualifier de flottant, et prouver de quoi elle était capable. En définitive, elle est restée fidèle à elle-même : divisée. Les Etats-Unis apparaîtront à nouveau comme les sauveurs, si toutefois l’Administration Obama tient ses promesses [1].