La lutte pour la reconnaissance
Les résidants des villages non reconnus, soixante-dix mille personnes dans le Néguev et trente mille dans le Nord, se battent pour
survivre en tant que citoyens d’un État qui leurs dénie leurs droits
et besoins les plus fondamentaux. Il y a quarante-cinq villages non
reconnus dans le Néguev et neuf dans le Nord. Il y a aussi des
dizaines de quartiers tant dans le Nord que dans le Sud qui nécessiteraient d’être reliés à des villages déjà existants. La plupart de
ces communautés existaient avant 1948.
Grâce aux efforts du secteur arabe non gouvernemental, la reconnaissance a été officiellement obtenue pour les neuf villages antérieurement non reconnus dans le Nord. Ce « résultat », pourtant, n’a
été que formel - l’État n’a fourni ni l’infrastructure ni les services
qui sont la marque d’une reconnaissance réelle.
Fondement juridique de la discrimination
En 1965, la Knesset israélienne a adopté la Loi de planification
et de construction, un schéma directeur national pour le développement futur. Des dizaines de villages palestiniens n’ont pas obtenu la reconnaissance officielle prévue par cette loi et donc ont été
exclus des plans de développement. L’espace sur lequel les villages
se trouvent a été reclassifié comme terre agricole non résidentielle.
Du jour au lendemain, tous les immeubles dans les villages non
reconnus sont devenus rétroactivement « illégaux » et « non autorisés » et, par conséquent, ils risquent à tout moment d’être démolis.
En même temps, les autorités qui décident des plans d’urbanisme
peuvent programmer des projets à plus ou moins brève échéance
sur ces terres « non résidentielles » où étaient domiciliées tant de
personnes. Des colonies juives ont été installées sur ces mêmes
« terres agricoles », près de nombreux villages non reconnus : non seulement l’État n’a pas fait obstacle au développement de ces
colonies mais il l’a encouragé.
Il est de notoriété publique que le but de l’État est de dépeupler les villages non reconnus et de transférer les résidants de leurs
maisons vers des concentrations urbaines construites par le gouvernement, ce qui permet à celui-ci de confisquer leurs terres.
Que signifie vivre dans un village non reconnu ?
L’absence de services publics dans les villages non reconnus affecte presque tous les aspects de la vie. Parmi les défis auxquels doivent faire face les résidants :
– pas d’eau courante ;
– pas de système d’évacuation des eaux usées ;
– pas de services de santé ;
– pas de ramassage des ordures ;
– pas de connexion au réseau électrique ;
– pas de routes d’accès sûres reliant les villages souvent éloignés au réseau des transports en commun ;
– pas de services postaux ni de rattachement au réseau téléphonique ;
– pas d’établissements scolaires adéquats (dix écoles primaires
seulement existent pour tous les villages non reconnus ; les
élèves sont obligés de parcourir de longues distances pour se
rendre à l’école, facteur qui contribue à l’absentéisme des élèves
des villages non reconnus).
Étant donné que le gouvernement interdit tout développement
d’infrastructure matérielle dans les villages non reconnus, les résidants ne peuvent pas construire ni réparer maisons, routes, équipements scolaires et de santé, système d’égouts. Ceux qui construisent sur leur propre terre vivent dans la crainte constante de l’expulsion, redoutant que leur maison « illégale » soit démolie. Cette
crainte empêche de nombreux résidants des villages non reconnus
d’agrandir leurs logements ou d’en construire de nouveaux. Le
résultat inévitable en est une très forte densité de population ; sou-
vent plusieurs familles vivent dans un seul logement, entassées
dans des maisons comportant peu ou pas de confort moderne.