“Même avant ces épreuves actuelles, Gaza a souffert pendant une décennie d’un blocus et d’un enfermement imposés par Israël, entraînant l’effondrement de l’économie et des taux de pauvreté et de chômage montant en flèche (…). Maintenir la paralysie économique et l’isolement social de Gaza, ce sont la détresse humanitaire et un autre conflit assurés dans un avenir proche.” - Michael Lynk, Rapporteur Spécial de l’ONU sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967
A l’attention de :
La Haute Représentante de l’UE pour les Affaires Etrangères – Mme Federica Mogherini,
cc : les Ministres des Affaires Etrangères des Etats Membres de l’UE,
Nous vous écrivons avant la date de la réunion à venir du Conseil des Affaires Etrangères du 17 juillet.
Après 10 années de blocus par l’Etat d’Israël soutenu par l’Egypte, les conditions de vie de deux millions de Palestiniens emprisonnés dans la Bande de Gaza sont de l’avis général pires que jamais. La Bande de Gaza est le 3ème endroit le plus densément peuplé dans le monde avec 80 % de sa population dépendant de l’aide humanitaire et 45 % vivant au-dessous du seuil de pauvreté. La crise humanitaire à laquelle fait face aujourd’hui la population de Gaza est le résultat de décisions humaines.
Les coupures faites par Israël dans la fourniture d’électricité à la Bande de Gaza se produisent malgré les avertissements graves ces dernières semaines de la part du Comité International de la Croix-Rouge, de l’Organisation Mondiale de la Santé et des responsables de l’ONU, selon lesquels la pénurie d’électricité qui en découle entraîne une catastrophe humanitaire, étant donné que les installations indispensables de santé, d’eau et d’assainissement ne peuvent pas fonctionner. Le principal hôpital de la ville de Gaza a réduit d’un tiers ses activités chirurgicales, et à la suite du blocus, aggravé par le manque d’électricité, le territoire baigne dans les eaux usées.
Alors que nous condamnons l’attitude actuelle de l’Autorité Palestinienne, l’état d’Israël demeure toujours en fait la puissance occupante à Gaza. Lui seul a le pouvoir de mettre fin immédiatement aux souffrances et il a l’obligation de le faire selon la Quatrième Convention de Genève. Les puissances occupantes ont le devoir d’assurer la sécurité et le bien-être de la population civile dans les zones sous leur contrôle. Le blocus ininterrompu de la Bande de Gaza par Israël, une mesure qui continue à priver la population de celle-ci de nourriture, de carburant, et d’autres produits de première nécessité, constitue une forme de punition collective en violation de l’article 33 de la Quatrième Convention de Genève.
La position de l’UE sur le blocus est sans équivoque : l’UE demande l’ouverture immédiate, durable et inconditionnelle des points de passage pour permettre la circulation de l’aide humanitaire, des biens commerciaux et des personnes vers l’intérieur et vers l’extérieur de Gaza. L’UE estime que les changements sur le terrain qui ont suivi la décision de juin 2010 du gouvernement israélien d’atténuer l’enfermement ont été limités et insuffisants. [1]
Le Parlement Européen, après l’opération militaire israélienne contre la flottille humanitaire en 2010, a adopté une résolution sur le blocus de Gaza. Il exhorte “Israël à mettre fin immédiatement au blocus de Gaza, qui a entraîné un désastre humanitaire et qui augmente la radicalisation, qui devient un facteur d’insécurité pour Israël et pour la région dans son ensemble”. Il appelle aussi les “Haut Représentant/Vice-Présidents et les Etats membres de l’UE à prendre des mesures pour assurer l’ouverture durable de tous les points de passage vers et hors de Gaza, y compris du port de Gaza, avec un contrôle international adéquat de son utilisation, pour permettre la circulation sans entraves des biens commerciaux et à usage humanitaire nécessaires à la reconstruction et à une économie se suffisant à elle-même, ainsi que les flux de devises et le libre déplacement des personnes”.
L’ONU a, à plusieurs reprises, réaffirmé la nature “inacceptable, insupportable et contre-productive” du blocus de la Bande de Gaza. [2]
Les protestations ne suffisent plus, des exigences précises doivent être adressées par les Autorités et le Parlement Européens au gouvernement israélien, suivies de sanctions si elles ne sont pas remplies.
Par conséquent nous appelons le Conseil des Affaires Etrangères et la Haute Représentante pour les Affaires Etrangères à :
- faire pression sur le gouvernement israélien pour couvrir tous les besoins en électricité du territoir
- honorer tous les accords conclus antérieurement et à assurer la livraison de tous les matériaux de construction et médicaments nécessaires
- faire pression sur les gouvernements israélien et égyptien pour mettre fin au blocus illégal de la Bande de Gaza
- faire pression sur le gouvernement israélien pour mettre fin à la longue occupation illégale du territoire palestinien dans son ensemble.
Le silence actuel de l’Union Européenne n’est pas acceptable. Les déclarations orales ou écrites antérieures se sont révélées inefficaces. L’UE et ses états-membres doivent réellement faire pression sur Israël pour ce que plan soit mis en oeuvre. Si toutes les exigences ne sont pas exécutées par Israël, des sanctions doivent être clairement envisagées, y compris la suspension de l’Accord d’Association entre l’UE et Israël, en se fondant sur l’Article 2 de l’Accord.
Traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT de l’AFPS sur les prisonniers