Une Cour d’appel des USA a rouvert contre le magnat juif américain Sheldon Adelson un procès d’un milliard de dollars, qui cherche à le tenir, lui et plus de 30 autres personnes, passible de crimes de guerre et d’aide aux colonies israéliennes illégales dans les territoires palestiniens occupés (TPO).
La Cour d’Appel des USA pour le District de Columbia (DC) a voté hier à l’unanimité en faveur de la réouverture du dossier, en argumentant sur le fait qu’un juge fédéral de district avait conclu à tort en août 2017 que toutes les demandes des plaignants soulevaient des questions politiques qui ne pouvaient pas être tranchées devant les tribunaux des USA, a rapporté Ynet. A l’époque, le juge de district avait affirmé que le procès soulevait des questions politiques pour lesquelles le tribunal n’avait aucune compétence, dont celle de savoir qui exerce la souveraineté sur la Cisjordanie occupée, Jérusalem Est occupée et la Bande de Gaza assiégée. Hier, cependant, la Juge Itinérante des USA, Karen LeCraft Henderson, a déclaré que le problème de souveraineté était distinct d’une question plus large de savoir si des crimes de guerre ont été perpétrés dans les TPO, a rapporté Fortune Magazine.
« Une décision juridique selon laquelle des colons israéliens (illégaux) ont perpétré un génocide dans le territoire disputé (TpO) ne déciderait pas de l’appartenance du territoire disputé et donc ne contredirait pas directement quel choix de politique étrangère (des USA) que ce soit, » a expliqué la Juge Henderson. Le procès, a-t-elle ajouté, pourrait en conséquence être traité comme une « question strictement juridique » et, puisque le génocide enfreint le droit international, le tribunal pourrait entendre l’affaire dans le cadre de la Loi sur les Délits civils contre les Etrangers, qui autorise les citoyens étrangers à former un recours devant les tribunaux des USA pour des violations des droits humains perpétrées à l’extérieur des Etats Unis.
Les poursuites sont menées par Bassem Al-Tamimi du village de Nabi Saleh en Cisjordanie, père de l’adolescente palestinienne Ahed Tamimi qui a été emprisonnée pendant huit mois pour avoir giflé un soldat israélien qui avait fait intrusion sur les terres de sa famille. Il est l’un des 18 Palestiniens ou Palestino-Américains, ainsi qu’un conseil municipal palestinien, qui ont déposé une plainte, en déclarant que Adelson et les autres accusés ont comploté pour expulser les populations non-juives des TPO et en les accusant d’être complices du génocide et d’autres crimes de guerre.
Les autres accusés comprennent un certain nombre de milliardaires connus et de sociétés des USA ayant un passé de financement ou de coopération avec Israël. Il y a parmi eux l’homme d’affaires juif américain Larry Ellison – qui est connu pour avoir fait don de milliards de dollars à l’armée israélienne par le biais des Amis des FDI (AFDI) – ainsi que Elliot Abrams, qui a véhémentement critiqué le soutien peu enthousiaste de l’ancien Président des USA, Barack Obama, aux colonies illégales israéliennes.
Deux grandes banques israéliennes sont également concernés par la plainte — la Banque Leumi et la Banque Hapoalim – ainsi que la société de technologie Hewlett Packard Enterprise (HPE), que le mouvement de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) accuse de fournir des équipements pour les points de contrôle et le Mur de Séparation israéliens en Cisjordanie occupée.
Adelson est depuis longtemps un personnage controversé en raison de son soutien à Israël et de son implication dans le groupe de pression pro-israélien aux USA. Ayant fait fortune avec le Casino Sands à Las Vegas, la richesse d’Adelson est estimée à 36,1 milliards de $. Il est connu pour avoir donné 410 millions de dollars à Birthright [1], qui envoie de jeunes Juifs voyager en Israël, et a fait don de milliards de dollars au Parti Républicain des USA, ainsi que pour l’ élection du President Donald Trump en 2016 et pour les campagnes de mi-mandat en 2018.
Le milliardaire Adelson est aussi le propriétaire de Israel Hayom, le journal israélien au plus fort tirage, connu pour son soutien déclaré au Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahu. Israel Hayom se situe au coeur du Dossier 2.000, une des trois affaires de corruption dans lesquelles Netanyahu est impliqué. Le Premier Ministre fait l’objet d’une enquête pour avoir promis à Arnon Mozes – le propriétaire du journal israélien Yedioth Aronoth – qu’il réduirait le tirage de Israel Hayom, le principal concurrent du journal de Mozes, en échange d’une couverture médiatique qui soit favorable à lui et à sa politique. Netanyahu fait aussi l’objet d’une enquête sur deux autres dossiers – appelés Dossier 1.000 et Dossier 4.000 – et est dans l’attente d’un avis du Procureur Général d’Israël, Avichai Mandelblit, sur le fait de savoir si sa mise en accusation sera recommandée avant les prochaines élections générales dans le pays, le 9 avril.
Traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT de l’AFPS sur les prisonniers