Depuis vendredi 23 septembre nous sommes bombardés jour et nuit. En général de 2 à 4 heures du matin et puis de 6h30 à 8heures, quand les enfants vont à l’école et enfin l’après midi ou en début de soirée. On peut entendre et sentir les explosions avec la même intensité dans toute la Bande de Gaza. Ces explosions sont utilisées en plus des assassinats et de la destruction routiniers dont les Israéliens sont coutumiers.
Ce nouveau cycle de terreur a commence avec l’assassinat de quatre personnes dans la ville de Tulkarem en Cisjordanie. Le jour même le Jihad islamique répondait à Gaza en tirant des roquettes sur la ville israélienne de Sdérot. Ce même jour 19 personnes ont trouvé la mort pendant une parade militaire du Hamas. Il semble qu’elle ait été causée par une erreur de manipulation d’explosifs mais le Hamas a accusé Israël et s’est joint au Jihad islamique pour lancer des roquettes sur Sdérot où 5 personnes ont été blessées.
Le Hamas a rapidement changé de position et a annoncé l’arrêt de toutes ses opérations militaires à partir de Gaza. Le Jihad l’a suivi en déclarant qu’il se conformera à la trêve.
La campagne israélienne de bombardements continue. La nuit dernière, moi- même, comme tous les Gazaouis, j’ai été éveillé par l’horrible bruit deux fois, à 3h 30 et 7h15. Je n’ai pratiquement pas pu dormir entre les deux. Cinq autres explosions nous ont visés ces quatre dernières heures et l’une a fait trembler mon bureau au moment où j’écris.
Gaza est dans un état de panique, les enfants sont énervés, ils pleurent, ils ont peur et beaucoup font pipi au lit. Certains ont trop peur pour quitter leurs maisons et refusent d’aller à l’école. Un grand nombre d’entre eux sont hébétés, pâles, sans appétit et n’arrivent plus à dormir.
Des femmes enceintes souffrent de douleurs au ventre et certaines ont accouché prématurément. De nombreuses personnes se plaignent de maux d’oreille. Tous sont assourdis par les explosions, dans un état de stupeur.
Cette nouvelle méthode qui consiste à faire exploser dans notre ciel des bombes sonores n’avait jamais été utilisée avant le désengagement, de toute évidence pour ne pas alarmer ou blesser les colons israéliens et leurs enfants.
Israël apprend aux Palestiniens à intégrer le sentiment d’impuissance dans le but de soumettre toute la population à la peur et la paralyser. C’est un crime de guerre et un crime raciste. Il faut arrêter Israël.
* président du Programme de Santé mentale pour la Communauté de Gaza, psychiate et militant pour les droits humains.
Le 26 septembre le Palestinian Center for Human Rights, PCHR, écrivait :
Des attaques aériennes contre des militants palestiniens, contre les biens des civils et un siège total sont imposés aux habitants de Gaza.
Pour la troisième journée consécutive, les forces d’occupation israéliennes (IOF) ont poursuivi leur agression contre la Bande de Gaza. Samedi et dimanche 24 et 25 septembre 2005, l’IOF a lancé 10 attaques aériennes qui ont assassiné 4 Palestiniens, en ont blessé au moins vingt autres et ont détruit de nombreux locaux civils.
Lundi matin 26 septembre, l’IOF a lancé sur l’ensemble de la Bande de Gaza 5 nouvelles attaques aériennes, qui ont détruit ou endommagé de nombreuses maisons et ateliers et qui ont blessé 4 Palestiniens dont deux femmes. Les avions de combat israéliens F-16 ont continué à lancer contre toute la Bande de Gaza des raids annexes qui ont détruit les façades et les fenêtres de nombreuses maisons et de bâtiments civils et qui ont terrorisé les civils palestiniens, surtout les enfants.
De plus l’IOF continue à imposer un siège total de la Bande de Gaza. Ces attaques résultent de problèmes à l’intérieur du gouvernement israélien et ce sont les Palestiniens qui en paient le prix [1]
(suivent le détail des destructions, le nom des victimes))
Dans le but d’imposer de nouvelles restrictions au déplacement des civils palestiniens et de voler plus de terres, le bureau de liaison militaire israélien a informé les Palestiniens ce matin qu’il sera interdit aux Palestiniens d’approcher la limite entre la Bande de Gaza et Israël dans un périmètre de 650 mètres.
Le PCHR condamne fermement cette escalade grave des attaques de l’IOF qui prouve que l’armée d’occupation israélienne continue à occuper la Bande de Gaza malgré la récente évacuation des colonies israéliennes. Le PCHR est sérieusement préoccupé par le feu vert donné par le gouvernement israélien à l’armée, qui lui permet de lancer des qttaques de grande envergure incluant des assassinats extra-judiciaires et des incursions dans la bande de Gazas qui font de nouvelles victimes parmi les civils palestiniens.
En conséquence le PCHR appelle la communauté internationale et les Hautes Partis contractantes à la Quatrième Convention de Genève de 1949 à intervenir immédiatement pour empêcher toute détérioration supplémentaire et pour protéger les civils palestiniens des opérations militaires menées par l’IOF dans le Territoire Palestinien Occupé.
tandis que la rédaction du Monde diplomatique titrait sur son site Internet le 30 septembre :
Silence, on tue !
Dans dix ans, on en parlera encore - espérons-le ! - dans les écoles de
journalisme.
Deux événements se sont déroulés en Israël et en Palestine : d’une
part, la courte victoire du premier ministre Ariel Sharon sur son rival
Benyamin Nétanyahou au comité central du Likoud, de l’autre, une
offensive militaire israélienne d’une rare violence en Cisjordanie et
dans la bande de Gaza. De la première, téléspectateurs, auditeurs et
lecteurs savent presque tout - jusqu’au mystère du micro coupé. De la
seconde, presque rien.
Quelques faits suffisent à souligner le caractère scandaleux de cette
disproportion : en une semaine, l’armée israélienne a procédé à 91
incursions dans les Territoires palestiniens occupés ainsi qu’à 27
attaques aériennes visant des installations baptisées « terroristes »,
assassiné plusieurs dirigeants de la Résistance palestinienne (dont
Samer Al-Saadi, un des chefs des Brigades Al-Aksa, qui ont, du coup,
renoncé à la « trêve ») et opéré près de 400 arrestations (1).
« Gaza vit dans la panique, racontait hier le psychiatre Eyyad Sarraj.
Les enfants sont perturbés, ils pleurent, ils ont peur, beaucoup font
pipi au lit. Des enfants sont tellement effrayés qu’ils refusent de
quitter la maison pour se rendre à l’école. Beaucoup souffrent
d’étourdissements, d’insomnies et ont perdu l’appétit. Des femmes
enceintes ressentent des douleurs et doivent être hospitalisées pour un
accouchement prématuré. Beaucoup de gens se plaignent de maux
d’oreilles. Tous sont sous le choc. La nouvelle méthode d’explosion de
bombes assourdissantes dans notre ciel est de toute évidence un nouveau
procédé que les Israéliens n’ont pas expérimenté avant l’évacuation des
colons, de crainte de nuire à ces derniers et à leurs enfants. Israël a
apparemment décidé d’inculquer la peur et le sentiment d’impuissance à
la population de Gaza, afin de la tétaniser. Ceci est un crime de
guerre et un acte raciste. Il faut le stopper (2). »
Comme souvent depuis l’éclatement de la seconde Intifada, les
provocations du mouvement islamiste Hamas - en l’occurrence le tir de
roquettes Kassam sur la ville israélienne de Sderot - ont fourni à M.
Ariel Sharon le prétexte qu’il attendait. Le premier ministre a
démontré, moins de deux semaines après son « geste de paix », qu’il
restait avant tout l’homme de la guerre. Et, accessoirement, qu’il
savait combiner opération militaire et opération politique. Combien
chaque voix arrachée par le premier ministre à son challenger
représente-t-elle de deuil et de souffrance pour les Palestiniens ? Ne
comptez pas sur les médias pour vous le dire...
(1) Chiffres fournis par le Centre palestinien pour les droits de
l’homme (PCHR), Gaza, Weekly Report, 22-28 septembre 2005