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Ariel Sharon invité en France par le président de la République : chèque en blanc de Paris à la colonisation et au mur illégal israéliens en Palestine.
Le Président de la République a officiellement invité le Premier ministre israélien, Ariel Sharon, pour une visite en France cet été.
Eté 2005. La communauté internationale, et singulièrement la France, a les yeux rivés en Palestine occupée sur l’hypothèse d’un retrait israélien de la bande de Gaza, petit territoire surpeuplé ravagé par les chars et les bombardements et des décennies d’occupation militaire étouffante, et toujours promis à l’encerclement après le redéploiement.
Eté 2005 : cela fera un an le 9 juillet que la Cour internationale de Justice de la Haye, la plus haute instance judiciaire des Nations unies, recommande le démantèlement du réseau de murs que les forces d’occupation israéliennes édifient en profondeur à l’intérieur de la Cisjordanie, rappelant que « le tracé choisi pour le mur consacre sur le terrain les mesures illégales prises par Israël et déplorées par le Conseil de sécurité de l’ONU en ce qui concerne Jérusalem et les colonies de peuplement », et appelle les Etats à faire respecter ces recommandations. Cela fera un an le 20 juillet que l’Assemblée générale des Nations unies a adopté ces recommandations, notamment avec les voix des 25 Etats membres de l’Union européenne. Dont la France.
Eté 2005. En Palestine occupée, les programmes d’extension des blocs de colonies et même d’annexion se concrétisent de façon foudroyante. Grâce, en particulier, à la poursuite de l’édification de ce réseau de murs.
Au cœur du dispositif : Jérusalem.
Jérusalem-Est subit la destruction aux bulldozers de quartiers palestiniens entiers, celui d’al-Boustan au cœur de Silwan venant d’être promis à démolition pour y établir un « parc archéologique ». De nouvelles chaînes de colonies s’édifient, telle Ma’aleh Adumim, de la vieille ville jusqu’à la vallée du Jourdain, non seulement séparant Jérusalem du reste du territoire palestinien mais aussi coupant en deux la Cisjordanie, pour rendre irréversible l’annexion de la ville et non viable un aléatoire Etat palestinien. Le morcellement des quartiers palestiniens les transforme en ghettos asphyxiés. Les murs séparent aussi les familles entre elles, les privent de l’accès à leurs propriétés. Aujourd’hui, les murs bloquent les entrées de la ville. Mais ils en colmatent aussi la sortie. C’est la survie même de la Jérusalem palestinienne qui est aujourd’hui menacée.
Eté 2005. Ariel Sharon réaffirme son projet : achever ce qui ne l’a été en 1948, la dépossession des Palestiniens pour l’annexion de leurs territoires. En février dernier, dans un entretien à Libération, l’ancien Premier ministre travailliste israélien Ehud Barak se dit « convaincu que la seule solution viable pour l’avenir d’Israël est un retrait des territoires », mais n’hésite plus à affirmer à ce sujet : « Le tracé de la barrière de sécurité permet d’inclure 70 à 80 % des colons dans Israël, le reste doit être rapatrié « à la maison » ». Une démographie et une géographie bien plus substantielles que ce que représentent les quelque 8000 colons occupant encore 40% du territoire de la petite bande de Gaza où sont aujourd’hui focalisés les regards...
Eté 2005. La progression du mur en Cisjordanie à un rythme accéléré sur des terres confisquées découpe le territoire en enclaves, prive la population de ses ressources économiques, de ses réserves d’eau, volées, notamment dans la zone aquifère du nord ouest, entrave ses mouvements. D’un côté des murs : le bouclage dans des prisons à ciel ouvert sur des terres peaux de chagrin. De l’autre -coté « israélien »- : près de 400.000 Palestiniens totalement coincés. C’est sur le terrain, par une politique de faits accomplis qui violent le droit international et restent impunis, que la frontière s’écrit, que les murs balafrent le paysage, tronçonnent le territoire, fauchent les conditions de vie, abolissent toute viabilité pour un Etat palestinien, déciment tout espoir de paix.
Eté 2005. Malgré le sommet de Charm-el-Cheikh, malgré la trêve que respectent les Palestiniens, le gouvernement d’Ariel Sharon ne tient aucun de ses engagements. Plusieurs milliers de prisonniers politiques palestiniens croupissent toujours dans ses geôles, dont plusieurs centaines d’enfants, les barrages militaires quadrillent le territoire, les destructions de maisons se poursuivent sans relâche, des dirigeants politiques palestiniens continuent à être les cibles d’assassinats.
Eté 2005. Malgré la résolution des Nations unies qui les engage, aucun Etat n’a respecté ses obligations pour démanteler les murs. Le gouvernement français -comme les gouvernements des 24 autres Etats membres de l’Union européenne- se refuse à toute sanction contre Israël, en dépit des recommandations du Parlement européen qui en appelle notamment à la suspension de l’accord d’association entre l’UE et Israël. Pire : la coopération scientifique et militaire franchit de nouveaux pas.
Et voilà que le Président de la République invite Ariel Sharon en France.
Citoyens de ce pays attachés au droit international, au droit humanitaire et au droit des peuples à l’autodétermination, nous ne pouvons le tolérer. Ce serait un coup porté aux victimes de l’occupation et de l’exil. Un coup porté au peuple palestinien. Un coup porté à ceux qui, au sein de la société israélienne, militent au risque de leur liberté en faveur d’une paix fondée sur le droit. Un coup porté aux espoirs que la paix devienne un jour une perspective sérieuse et concrète.
Nous demandons que des sanctions soient prises tant qu’ à Israël ne respectera pas le droit international.
Nous demandons l’application des recommandations de la CIJ approuvées par l’ONU, dont la France qui doit donc mettre en œuvre ses propres obligations par des sanctions appropriées.
AFPS, Paris le 18 juin 2005