Je pense que lundi matin, lorsque j’ai lu le tweet du consul général d’Israël à New York, Dani Dayan, j’ai compris la douleur de la droite face à la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies contre les colonies.
Dayan, l’ancien président du Conseil de Yesha (colonies) , est un homme convenable et franc, même si on n’est pas d’accord avec lui. Mais lundi matin, il a lâché un tweet vraiment étrange en hébreu : "L’èpoque est terminée pendant laquelle des pays peuvent bénéficier du savoir-faire israélien en haute technologie, en sécurité, etc, du prestige d’une visite en Israël et d’une implication au Moyen-Orient sans remboursement diplomatique. "
Nous pourrions ne pas prendre ce tweet au sérieux et le considérer comme délirant si Dayan n’était pas une personne qui parle habituellement de façon raisonnable Nous ne pouvons donc l’interpréter que comme une expression de douleur et de déception. Ou du moins nous pouvons l’espérer.
Laissons de côté la question de savoir si une visite en Israël et une implication au Moyen-Orient sont prestigieuses. Allons au cœur du problème.
Aucun pays ne “bénéficie du savoir-faire israélien“ sans raison. Au contraire, ils l’achètent avec de l’argent réel. Les exportations israéliennes ont atteint 92 milliards de dollars en 2015, et près de la moitié provenaient des industries de la haute technologie et de la défense.
Même d’autres industries d’exportation, comme l’agriculture, sont basées sur le “savoir-faire israélien“. Si nous punissons le monde et cessons de lui vendre le savoir-faire israélien, l’économie israélienne s’effondrera. Personne ne nous fait une faveur en achetant nos produits, aussi bons soient-ils.
On dirait un marché consistant à se couper le nez pour blesser nos marchés d’exportation. En tout cas, on n’imagine pas Check Point, Amdocs ou Intel Israël consulter avant de vendre quelque chose à un client étranger.
Rappelons-nous aussi où sont situés nos marchés d’exportation : Union européenne 29% ; Asie, 25% ; États-Unis, 24%. Et ce ne sont pas le Sénégal ou le Venezuela qui ont commandité la résolution de l’ONU.
Le deuxième aspect est la comparaison de Dayan entre compensation économique et rémunération diplomatique. Pendant des années, le Conseil de Yesha et les gouvernements israéliens ont combattu le mouvement boycott, désinvestissement et sanctions précisément sur ce point. BDS a essayé d’imposer des pressions économiques pour atteindre des objectifs politiques, et c’est exactement ce genre de marché que Dayan propose maintenant.
Mais nous ne sommes pas assez gros et assez fort pour boycotter les puissances économiques et exiger un prix pour leurs positions. De plus, nous entrons dans ce débat après presque un demi-siècle de règne sur les Palestiniens, un point de départ qui n’arrange rien.
La troisième absurdité consiste à ignorer le fait qu’une partie de ce savoir-faire israélien repose sur des fonds non israéliens. Les industries de défense ont profité depuis des décennies de l’aide militaire des États-Unis et continueront de le faire.
L’industrie de haute technologie israélienne s’appuie en partie sur des fonds de capital-risque américains dont l’argent provient de l’épargne-retraite des Américains. Et n’oubliez pas les firmes israéliennes de haute technologie qui sont achetées par des multinationales et qui apportent des milliards de dollars aux coffres d’Israël. Devrions-nous aussi nous passer d’eux dans le cadre du boycott que Dayan propose ?
Aussi frustrés que nous puissions être, toute solution israélienne qui limite nos relations commerciales avec le reste du monde entraîne d’énormes dégâts économiques. Ce serait bien, bien pire que tout dommage causé par le mouvement BDS.
Toute altération de nos relations avec ces pays au-delà de l’annulation de visites et autres, causerait des dommages réels. Pendant des années le Premier ministre Benjamin Netanyahu a exhorté ses ministres à se rendre en Chine pour entretenir les relations commerciales, et subitement il interdit à ces ministres de s’y rendre, ou en France ou en Grande-Bretagne. Il jette à l’égout des années de travail et on ne sait sait combien de visites destinées à “renforcer les relations commerciales d’Israël“.
C’est une question politique que Netanyahu utilise à ses propres fins. Le sentiment que le monde entier est contre nous peut lui servir politiquement, mais il ne servira pas Israël, et certainement pas l’économie israélienne. Il causera seulement des dommages.
Si les paroles de Dayan sont une expression de frustration, ok. Mais s’ils sont une politique de boycott menée par Netanyahu, nous avons un gros problème.
Traduit de l’anglais par RP pour l’AFPS