Diplomate émérite (disons tout de suite, pour parler clair, que sa fréquentation régulière est appréciée ici) Pierre Duquesne est ambassadeur chargé des questions économiques de reconstruction et de développement au Quai d’Orsay. A ce titre, il s’est occupé de l’Afghanistan, d’Haïti et des territoires palestiniens. C’est à ce dernier sujet qu’il consacre un article publié dans la revue Mondes (numéro 10) éditée par le ministère des Affaires étrangères français. L’occasion pour lui de revenir sur une expérience paradoxale.
En décembre 2007, une conférence des donateurs est organisée à Paris pour appuyer le dernier processus politique israélo-palestinien en cours, celui d’Annapolis. Sans surprise, cette ultime initiative de George Bush s’enlise. Curieusement, le programme d’aide international, lui, fonctionne. Non seulement les Palestiniens obtiennent réellement plus de dons que ce qu’ils ont demandé initialement, mais ils en font plutôt un très bon usage sous la houlette de Salam Fayyad, un ancien haut fonctionnaire international placé par les parrains occidentaux du dossier au coeur de l’Autorité palestinienne à partir de 2002 (il vient d’être reconduit dans ses fonctions de premier ministre).
C’est le "printemps" et "l’été" de cette expérience, selon le découpage poétique retenu par Pierre Duquesne, qui assure côté français le suivi de cette conférence, même si Gaza reste à l’écart du mouvement. En 2009, celui qui a été chargé de lancer graduellement les fondations de la Palestine qui doit naître en parallèle de discussions politiques, M. Fayyad, évoque "un Etat palestinien dans deux ans".
En dépit de ses succès, l’expérience, pourtant, va tourner court et entrer progressivement dans son "automne". En 2011, l’Autorité palestinienne subit, selon l’expression de Pierre Duquesne un "crash test" à l’échelle des territoires avec le début de "fatigue" des donateurs, un ralentissement de la croissance et des retards de paiements israéliens (les fameuses rétrocessions du produit des taxes perçues par Israël en lieu et place des Palestiniens). En dépit du choc, l’Autorité tient bon alors même qu’aucune perspective politique ne s’esquisse. C’est d’ailleurs dans ce vide sidéral que les Palestiniens vont lancer leur initiative de reconnaissance à l’ONU, un mauvais calcul diplomatique qui ne débouche sur rien.
Depuis cette date a commencé un "hiver" palestinien, un gel dans une situation particulièrement instable, une notion sur laquelle insiste notre observateur engagé qui veut encore croire à une initiative internationale pour en sortir avant une éventuelle faillite. Croissance des colonies israéliennes, contrôle par Israël de 62% de la Cisjordanie (zone C), maintien par l’armée israélienne des restrictions de circulation qui empêchent (dixit la Banque mondiale) le décollage d’un secteur privé, tout semble pourtant se liguer pour qu’au "crash" succède, tôt ou tard, un "clash".